Martin Scorsese : "Je viens d’un monde où la violence était très présente"

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A.D , modifié à
Le cinéaste américain interroge la foi dans son nouveau film "Silence". Il était l'invité exceptionnel d'Europe 1, vendredi matin.
INTERVIEW

Trente ans après voir lu le livre Silence du Japonais Shūsaku Endō, le cinéaste américain l’a adapté au cinéma. Le film, qui conte le parcours, au XVIIe siècle, de deux prêtres jésuites partis au Japon retrouver leur mentor, sort en salles le 8 février. Martin Scorsese était l'invité exceptionnel d'Europe 1 vendredi matin pour présenter ce nouveau long-métrage.

"Des années pour m'acclimater". A la lecture de l’ouvrage, le cinéaste "a tout de suite su" qu’il avait envie de faire le film. S’il a attendu si longtemps, c’est qu’il "ne savait pas comment" s’y prendre. "Je ne comprenais pas un certain nombre de chapitres ou de passages de ce livre. J’avais l’impression de ne pas savoir comment structurer mon scénario. Et je me demandais comment rendre en réalité visuelle un certain nombre de moments clés, par exemple lorsque Rodrigues entend des voix. Cela m’a demandé des années de travail pour m’acclimater à l’atmosphère de ce roman et pour commencer à me sentir à l’aise", explique-t-il.

Entendu sur europe1 :
Pour moi c’est le catholicisme, pour d’autres, ce sera autre chose, peut-être une idéologie politique.

Rencontre avec le pape. Le film traite de persécution liée à la religion. "Cela a fait raisonner beaucoup de choses en moi. Mais cela va au-delà de cette histoire de persécution. Ce que j’y trouve, c’est la question de la foi. Pour moi c’est le catholicisme, pour d’autres, ce sera autre chose, peut-être une idéologie politique, que sais-je. Mais pour moi, c’est quelque chose de très pur, auquel il faut aspirer." Le réalisateur a d'ailleurs rencontré le pape à Rome fin novembre, pour notamment parler "du christianisme au Japon", thème central du film. 

"Pas une bagarre de saloon". Dans le film, le silence de Dieu interroge face à la barbarie et à la souffrance. "C’est l’un des grands mystères et l’une des raisons pour laquelle il m’a fallu trente ans pour oser m’y mettre. Peut-être que d’une certaine façon, la réponse est dans le silence", conclut Martin Scorsese. Violent, le film s'inscrit dans sa filmographie. "Je viens d’un monde où la violence était très présente, où on pouvait aller vers elle. Je parle de vraie violence, pas une bagarre dans un saloon. Mais de violences très graves, au sein de la famille, entre un père et un fils, par exemple. Les conséquences peuvent être dramatiques. La simple menace peut être perturbante sur le plan psychologique. Ce sont des choses que j’ai personnellement ressenti et que j’ai fini par exprimer dans les films."