Vol à ski : "La quintessence du sport, le but ultime"

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Le Slovène Peter Prevc, numéro un mondial, lors du championnat du monde de vol à ski, en 2014 © MICHAL CIZEK / AFP
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Les championnats du monde de vol à ski, discipline où les sauteurs parcourent plus de 200 mètres en l’air, ont lieu en Autriche.  Malgré le danger, la discipline fait rêver.  

Passer six secondes en l’air, parcourir plus de 200 mètres sans toucher le sol, est-ce bien raisonnable ? Pendant quatre jours, à Kulm, en Autriche, les participants aux championnats du monde de vol à ski, qui débute jeudi, ne se poseront pas la question. Ils défieront les lois de la pesanteur pour aller le plus loin possible. Tant pis si le danger est multiplié. Tant pis si la chute potentielle est plus terrible sur ces super-tremplins, près de deux fois plus grands que les tremplins classiques. Le jeu en vaut la chandelle, à en croire Nicolas Dessum, ancien sauteur à ski français. "C’est la quintessence de notre sport, le but ultime", assure celui qui fut entre 2003 et 2008 recordman de France de la spécialité avec un vol de 207,5 mètres de long. Soit deux fois la longueur d’un terrain de foot.

Six secondes d'éternité. Pour autant, le dernier français vainqueur d’une Coupe du monde, en 1995 au Japon ne cache pas que l’appréhension est présente en haut du tremplin. "Ressentir de la peur, ça peut arriver", reconnaît-il. "C’est sûr qu’en haut du sautoir, il y a plus de pression, on est plus concentré, plus stressé aussi. A plat ventre à 120 km/h, en l’air, c’est assez impressionnant." Le vol en lui-même peut durer jusqu’à 6 secondes, contre 3 ou 4 pour les sauts classiques. Une éternité. "Ça peut sembler court, mais en l’air, ça semble beaucoup plus long", assure Nicolas Dessum, qui entraîne désormais les juniors français. Pour l’heure, celui qui a passé le plus de temps en l’air est norvégien. Il s’appelle Anders Femmel et s’est posé à 251,5 mètres en février 2015 à Vikersund, dans son pays

"On saute à l'instinct". "On a très peu l’occasion de s’entraîner sur ces tremplins géants. Alors on saute à l’instinct", précise encore Nicolas Dessum. En effet, ces superstructures sont rares, puisqu’il n’en existe que quatre dans le monde, avec une compétition par an, soit huit sauts en tout et pour tout pour chaque compétiteur. L’idée, en limitant le nombre de sauts, est justement de limiter les occasions de chuter et de se blesser grièvement. Ces championnats du monde ont d’ailleurs, et malheureusement, justement commencé par la grave blessure de l’Autrichien Lukas Müller, ancien champion du monde junior, touché aux cervicales après une lourde chute.

"Il y a très, très peu d’accidents". "La chute, ça peut arriver, on le sait", convient Nicolas Dessum. "Mais si on y pense sur le sautoir, c’est qu’on est mal préparé, qu’on n’a pas pris le temps  de venir à 100% de ses capacités." Tout repose donc sur la confiance, en soi et dans les organisateurs. "Tout est fait, tout est organisé pour que les conditions soient optimales, et au final, rapporté au nombre de saut, il y a très, très peu d’accidents", assure l’ancien sauteur.

"On surfe avec son corps, avec ses skis". L’enjeu est trop grand, le plaisir procuré trop puissant pour y renoncer. "Quand les premiers 50 mètres sont passés, que le corps est bien positionné, ce n’est que du plaisir, une sensation qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. C’est aussi pour ça qu’on y va", s’enflamme Nicolas Dessum. "On a la sensation de voler, tout simplement. L’air devient solide, on surfe avec son corps, avec ses skis. Il y a une impression de liberté totale. On ne s’en rend pas compte, mais on peut faire ce qu’on veut en l’air. On peut accélérer, plonger, ralentir. On pilote, en fait. C’est vraiment quelque chose d’exceptionnel".  La majorité d’entre nous se contentera de le croire sur parole.