Xavier Beulin, une certaine idée de l'agriculture

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Xavier Beulin était céréalier dans la Beauce, il était à la tête de la FNSEA depuis 2010. © AFP
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Pauline Jacot , modifié à
Le patron du premier syndicat agricole de France est décédé d'une mort "brutale" à 58 ans dimanche.
L'ENQUÊTE DU 8H

Son profil était atypique. Xavier Beulin, le président de la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), est mort dimanche, à 58 ans. Costume cravate, chaussures cirées, le patron du premier syndicat agricole de France était avant tout un homme d’affaires à la tête d’un empire de l’agroalimentaire : le groupe Avril, connu pour les marques Lesieur et Puget. Ce groupe brasse des milliards d’euros de chiffre d’affaires, ce qui explique qu'en pleine crise agricole, la figure Beulin a eu du mal à rassembler.

Critiqué, secoué. Sa double casquette businessman, porte-parole syndical, énervait. Xavier Beulin avait d'ailleurs été critiqué dès son élection à la FNSEA en 2010, mais la fracture a vraiment éclaté l'an dernier. L'homme est alors secoué, interpellé au moment des manifestations de milliers d’éleveurs au bord de la faillite.

Favorable aux OGM. Sa vision de l’agriculture était également loin de faire l’unanimité. L’agriculture pour lui était une agriculture compétitive, qui exporte, en faveur des OGM. Xavier Beulin encourageait ainsi beaucoup plus la biotechnologie que l’agriculture bio. Son modèle était clairement tourné vers les grandes exploitations. "Xavier Beulin a agi pour que l'on donne un peu moins aux petites fermes et un peu plus aux céréaliers", souligne Laurent Pinatel, le président de la confédération paysanne. "Il est intervenu pour que les privilèges des céréaliers ne soient pas attaqués par les réformes de la PAC. Et régulièrement, Stéphane Le Foll a cédé", regrette-t-il.

"Vice-ministre de l'Agriculture". Car Xavier Beulin était à la manœuvre dans toutes les décisions concernant les aides agricoles ou les orientations de la PAC. Certains parlaient d’ailleurs de lui comme d'un vice-ministre de l’Agriculture, pour ne pas dire le véritable ministre de l’Agriculture, tant son influence dans le monde politique était impressionnante.

Peser sur les programmes. Tous les hommes politiques l’écoutaient. Il avait rencontré François Fillon jeudi dernier. Il était aussi très proche de Manuel Valls. Il n’hésitait pas à passer au-dessus de Stéphane Le Foll, et à appeler directement François Hollande quand il le voulait. Et dernièrement, il était en pleine opération pour peser dans le programme des candidats à la présidentielle.

"Il était écœuré que les hommes politiques ne parlent pas d'agriculture. Il rencontrait les différents candidats à la présidentielle en leur disant, 'portez une vraie vision, portez des engagements pour qu'une fois président ce ne soit pas seulement des paroles en l'air. Les agriculteurs ont besoin de prix, les agriculteurs sont une solution pour la France'", explique Luc Smessart son ami et agriculteur, membre de la FNSEA.

Un livre testament. Xavier Beulin avait récemment rassemblé ses idées sur l’agriculture française dans un ouvrage : Notre agriculture est en danger. Un livre qui fait désormais office de testament.