Violence et absolutisme religieux : une enquête tente de mesurer la pénétration des idées radicales chez les jeunes

L'étude montre que les 7.000 lycéens du panel légitiment plus facilement que les autres l'usage de la violence.
L'étude montre que les 7.000 lycéens du panel légitiment plus facilement que les autres l'usage de la violence. © CELINE MIHALACHI / AFP
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avec AFP , modifié à
L'enquête montre notamment que 25% des jeunes du panel jugent acceptables certains comportements violents ou déviants.

Une vaste enquête du CNRS, lancée après les attentats de 2015 et publiée lundi, tente de mesurer la "porosité des idées radicales dans l'univers des lycéens d'aujourd'hui", en ciblant certaines catégories de jeunes, notamment musulmans. Elle pointe une propension modérée des jeunes musulmans à être plus concerné par "l'absolutisme religieux" et "la tolérance à la violence".

L'enquête a été réalisée auprès de 7.000 élèves de seconde, un "échantillon raisonné et diversifié" s'intéressant aux "jeunes habitants des Zones urbaines sensibles (ZUS), jeunes musulmans, jeunes frontistes, jeunes scolarisés dans des filières professionnelles". Cet échantillon a été conçu afin "d'atteindre des segments spécifiques de la jeunesse peu étudiés habituellement", expliquent les chercheurs, Anne Muxel et Olivier Galland. "Volontairement biaisé", le panel compte ainsi 25% de jeunes de confession musulmane et 16% de lycéens des ZUS.

La religion face à l'État et la science. L'étude montre que les 7.000 lycéens du panel légitiment plus facilement que les autres l'usage de la violence : près de 25% des jeunes interrogés jugent acceptables certains comportements violents ou déviants (voler un scooter, mener une action violente pour ses idées, affronter la police, etc.) contre 8% des jeunes en général (échantillon témoin). Chez les lycéens de confession musulmane, ils sont près d'un tiers à défendre ces idées (33%), contre 20% des chrétiens et 22% de ceux qui se déclarent sans religion.

Un sondé sur dix du panel (11%) déclare à la fois qu'il y a "une seule vraie religion" et que "la religion a raison contre la science dans l'explication de la création du monde". Des idées trois fois plus répandues (32%) chez les élèves de confession musulmane que dans l'ensemble des 7.000 lycéens. En outre, soulignent les chercheurs, près de 4% des jeunes du panel sont concernés à la fois par "l'absolutisme religieux" et par la "tolérance à la violence", une proportion qui grimpe à 12% chez les élèves musulmans.

"L'absolutisme est très loin d'être majoritaire !" Les deux chercheurs se sont dits conscients qu'en pleine campagne présidentielle une telle étude pourrait être "instrumentalisée". "Pour le débat citoyen, il nous semblait important qu'on ait accès aux connaissances de notre enquête", fait valoir cependant Olivier Galland. "L'absolutisme est très loin d'être majoritaire chez les musulmans !", tempère Anne Muxel.

En septembre 2016, une étude de l'Ifop pour l'Institut Montaigne ("think tank" libéral) sur les musulmans de France avait fait débat. Elle affirmait qu'un quart d'entre eux ont une pratique rigoriste de l'islam.

L'enquête publiée lundi répond à un appel à propositions "Attentats-recherche" du CNRS avec le soutien du ministère de l'Education nationale, de l'Institut national pour la jeunesse et l'éducation populaire (Injep), de la CAF et de la Fondation Jean-Jaurès. Elle a été réalisée par questionnaire d'octobre 2016 à mars 2017.