A Paris, les "dames pipi" en grève

toilettes 1280
© PHILIPPE LOPEZ / AFP
  • Copié
B.G. , modifié à
DROIT DU TRAVAIL - La société qui exploite les toilettes parisiennes et emploie les "dames pipi" refuse de conserver onze d'entre elles. Conséquence, la profession s'est mise en grève.

Surnommées les "dames pipi" bien que des hommes assument eux aussi cette fonction, elles font partie du paysage parisien. Un paysage sous-terrain, celui des toilettes situées dans les lieux les plus touristiques de la capitale, où elles accueillent le public et assurent la propreté des commodités. Mais, comme le révèle Le Monde jeudi, ces "dames pipi" se battent actuellement contre leur nouvel employeur, la société néerlandaise "2theloo" (aux toilettes en anglais), qui a repris le marché depuis le 1er juillet.

Onze emplois menacés. Et pour cause, cette société, qui gère plus de 150 toilettes dans 13 pays différents, n'est pas en conformité avec le droit du travail français, précisément l'article L1224-1 qui, quand arrive un changement d'employeur, oblige le nouveau prestataire à conserver l'ensemble des contrats de travail existants. Or, 2theloo refuse de garder sous ses ordres onze "dames-pipi" pour faire travailler ses propres agents. Pour protester contre cette irrégularité, les employés ont donc manifesté à Paris, répondant ainsi à l'appel du syndicat Feets-FO (Feets pour Fédération de l'équipement, de l'environnement, des transports et des services). De plus, plusieurs salariés sont en grève depuis neuf jours.

"Les serrures ont été changées, tout a disparu." "Le coup est trop dur, c’est inimaginable", lâche Dédé Lier, agent de nettoyage travaillant depuis douze ans pour la Ville de Paris sur le site de Force Ouvrière. "Un soir pour le lendemain, on m’a dit que ce n’était pas la peine de revenir. Les serrures ont été changées. J’avais laissé une bouilloire et d’autres affaires, tout a disparu. Parce qu’on est des femmes de ménage, on pense qu’on ne connaît rien et qu’on ne se défendra pas", s'emporte-t-elle.

Une interprétation particulière du code du travail. Contactée par Le Monde, la société 2theloo développe un argumentaire bien rôdé pour justifier son comportement. Elle ne se présente pas comme une société de nettoyage mais comme une entreprise vendant "un concept de boutique-toilette payante" qui "vend des produits". Une configuration dans laquelle 2theloo ne "relève pas de la convention collective de la propreté mais du code du travail". Problème, l'article L1224-1 s'applique à tous les employeurs, qu'ils travaillent dans le secteur de la propreté ou ailleurs.

Un précédent dans les gares SNCF. Un précédent peut redonner espoir aux "dames pipi" : celui des toilettes des gares SNCF, désormais gérées par 2theloo. Après une semaine de grève, l'entreprise s'était finalement engagée à conserver l'ensemble des employés.