Martine 50 ans, séparée d'un mari avare : "Le plus dur, dans la radinerie, c'est celle du cœur"

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Romain David , modifié à
Au micro d'Olivier Delacroix, sur Europe 1, Martine évoque l'avarice de son ex-époux, devenue peu à peu une pierre d'achoppement dans leur couple.
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Martine, 50 ans, vit à Besançon. Après une grave maladie et une greffe, le comportement de son ex-mari a progressivement changé. Il s'est montré de plus en plus soucieux des dépenses du ménage, jusqu'à devenir complètement pingre. Martine raconte à Olivier Delacroix de quelle manière l'avarice de son ancien compagnon a fini par se répercuter sur leur vie sentimentale, jusqu'à détruire leur couple.

"Quand on s'est connu, c'était quelqu'un de joyeux, de vivant, et de plutôt généreux. Il ne comptait pas spécialement, sans être trop dépensier. On vivait normalement. Arrivé à la trentaine, une maladie génétique rare et grave s'est déclenchée. […] Il a été greffé, mais il a refusé toute prise en charge psychologique, et à partir de là j'ai vu, petit à petit, apparaître des comportements curieux. […] Je travaillais. J'avais un bon salaire. On avait tous les deux de bonnes situations. Je ne comprenais pas, c'était assez irrationnel.

 

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Peu à peu, le mari de Martine rechigne aux dépenses quotidiennes

Ça a commencé tout doucement, sur les courses. Il ne comprenait pas que l'on en ait pour si cher de nourritures et de produits frais. Je lui répondais que l'on était une famille nombreuse, que l'on avait besoin de ça.

On faisait garder les enfants par une nourrice agrée, et chaque mois, c'était un vrai scandale quand je faisais le bulletin de salaire de la nounou. C'était une catastrophe au point que j'en devenais craintive, et j'ai fini par lui dire de le faire lui-même. Ce qu'il n'a pas fait. C'était pathologique et plus fort que lui : ça le rendait fou de voir des sommes considérables partir chez une nounou, alors que nous ne manquions de rien. Il était extrêmement compliqué de lui faire comprendre qu'il avait changé d'une part, et qu'il y avait un souci d'autre part.

Son avarice finit aussi par empiéter sur leur vie sociale...

[…]

Il comptabilisait tout ce qu'il faisait. […] À chaque fois, ça lui coûtait […]. Pour rendre service à des amis, il disait : 'non, on ne me rendrait pas service, donc je ne vois pas pourquoi je rendrais service.' […] Je me rends compte, avec le temps, que l'on a fini vraiment isolés. Ça n'est pas entièrement de sa faute. Moi aussi je n'ai pas tout fait pour rattraper les amis. C'est vrai que l'on finit par cacher ces choses-là. […]  On culpabilise, on a honte.

L'avis de notre expert

Pour Patrick Avrane, psychanalyste et auteur de la Petite psychanalyse de l'argent aux Presses universitaires de France, dans ses formes les plus extrêmes, l'avarice dépasse de loin le seul domaine financier, et se répercute sur de très nombreuses situations du quotidien. "L'avarice se traduit généralement par une peur de dépenser. Cela veut dire que quand on dépense, on a l'impression de perdre quelque chose, mais pas seulement de l'argent, la vie aussi. Un radin, c’est quelqu'un qui s'économise, et pour s'économiser, il économise sur tout", explique le psychanalyste.

"Quand on a frôlé la mort, il y a toujours la peur que ça recommence. Une façon de s'économiser, de pouvoir rester en vie, est de se dire : moins j'en fais, et plus j'aurais de temps pour moi", relève-t-il encore.

 

... et sentimentale

À la limite, la générosité matérielle n'est pas très grave, mais ce qui est le plus dur, dans la radinerie, c'est celle du cœur. Le temps que l'on passe avec l'autre, que l'on consacre à l'autre, c'était aussi des temps comptés, qui devenaient de plus en plus rares. Parler avec lui était devenu impossible.

[...] Lorsqu'il débarrassait le lave-vaisselle, je me prenais une remarque. J'étais obligée de dire : moi, j'ai mis la table, j'ai fait à manger, j'ai couché les petits… À un moment, je lui ai dit : 'si tu veux avoir une relation comptable du temps que l'on passe chacun aux tâches ménagères, ça va devenir invivable, mais je peux faire le compte.' Même pour les moments passés ensemble, ceux de l'intimité du couple… il n'y en n'avait plus, pendant des mois et des mois. C'était dur."

>> Retrouvez l'intégralité du témoignage de Martine.