L'abattoir bio du Vigan a été épinglé par L214 pour ses pratiques d'abattage. 1:30
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M.Be. avec Nathalie Chevance et AFP , modifié à
Marc Soulier, ancien boucher de l'abattoir bio à Vigan, est jugé depuis jeudi avec deux autres salariés pour cruauté envers les animaux, après la diffusion d'une vidéo de L214.

Les images avaient frappé l’opinion publique. De longues minutes où l’on voit un employé de l’abattoir du Vigan fouetter, taper à coups de pieds des moutons mal étourdis, infliger des coups de poing à des ovins suspendus, et même jeter contre des grilles métalliques des brebis dans un bruit assourdissant. Ce salarié, Marc Soulier, est jugé depuis jeudi pour actes de cruauté envers les animaux, au tribunal correctionnel d’Alès, dans le Gard, avec deux autres employés mis en cause et la Communauté de communes responsable de l’abattoir.

Il crie et rit à gorge déployée. Ce procès inédit s’est justement ouvert par la diffusion de la vidéo, tournée en caméra cachée et diffusée en février 2016 par l’association de défense des animaux L214. À la barre, Marc Soulier, boucher de 24 ans, se défend de toute cruauté. "J’étais seul à ce moment-là et le troupeau ne voulait pas avancer. Ce n’était pas pour faire mal aux bêtes", explique-t-il. Dans la vidéo, le jeune homme crie et rit parfois à gorge déployée quand il inflige des décharges électriques gratuitement aux bêtes, pour "faire rire" un collègue. "Avec le recul, je me rends compte que j’ai fait une grosse connerie", confie-t-il face aux images qu’il reconnaît brutales. 

" Il a fallu apprendre vite et sur le tas "

Le manque de moyens et de formation. S’il avoue à demi-mot sa culpabilité, le principal prévenu fustige le manque de moyens de l'établissement et la dureté de son travail. Entré à l’abattoir à 15 ans, "on m'a tout de suite dit ‘il te faut tuer’ (...) On nous mettait la pression, il a fallu apprendre vite et sur le tas", raconte l'ancien salarié. Il met notamment en cause les "cadences" imposées, les "surcharges de travail", ainsi que les équipements défectueux et la direction qui "ne voulait rien entendre".

Il pointe aussi du doigt le travail des formateurs sur la protection animale, qui fait défaut selon lui. "Ces gens-là, ils sont derrière leur bureau. Si on les mettait dans une écurie, ils ne pourraient pas appliquer eux-mêmes ce qu'ils marquent sur les papiers", estime-t-il.

Les animaux ne sont pas "des égaux de l'Homme". Décrit comme "un fou" par certains collègues, Marc Soulier "ne voit pas les animaux comme des égaux de l'Homme", même s'ils "ont de la peur, du ressenti", poursuit-il.

Licencié de l'abattoir après la révélation des pratiques de cet établissement certifié bio, celui qui travaille désormais dans un atelier de découpe a confié à l'audience en sanglotant : "Cette histoire m'a détruit, j'ai perdu mon emploi, j'ai été obligé de changer de région, mes grands-parents ont reçu des lettres de menaces." L’ancien boucher encourt jusqu'à deux ans de prison et 30.000 euros d’amende.