Les zones d’attente, comment ça fonctionne ?

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DÉCRYPTAGE - Deux petites filles ont été retenues seules, pendant plusieurs jours en zone d'attente à l'aéroport de Roissy. Comment fonctionnent ces zones et à quoi servent-elles ?

Andréane, Française de six ans en provenance du Cameroun, a été retenue trois jours dans une zone d’attente à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle suite à un imbroglio sur son identité, tout comme Fanta, petite Ivoirienne de trois ans et demi, qui y a passé quatre jours. Europe 1 vous explique le rôle de ce lieu d'enfermement, à ne pas confondre avec les centres de rétention. 

  • Qu’est-ce qu’une zone d’attente ?

"La zone d’attente est une zone où sont enfermés les étrangers avant de rentrer sur le territoire français", explique sur Europe 1, Cécile Poletti, déléguée Île-de-France de la Cimade, association d'aide aux migrants. Plus précisément, l’étranger qui, "soit n'est pas autorisé à entrer sur le territoire français, soit demande son admission au titre de l'asile", stipule le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

  • A quoi ça ressemble ?

On trouve ces lieux d’enfermement dans les gares ferroviaires ouvertes au trafic international, les aéroports et les ports. Même si ces locaux sont fermés, ils ne relèvent pas de l’administration pénitentiaire, mais de la direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) ou des douanes. La zone d'attente de Roissy est la plus importante de France, celle où ont lieu 90% des entrées sur le territoire français, selon Serge Slama, maître de conférences en droit public contacté par Europe 1.

A Roissy, la zone où ont été retenues deux fillettes cette semaine se nomme la "ZAPI 3" pour zone d'attente des personnes en instance. Elle a été inaugurée en janvier 2001 et "ressemble à un hôtel Formule 1", décrit brièvement Serge Slama. Dans cet endroit sommaire où les conditions de vie sont parfois propices aux tensions, "les gens ne sont pas maltraités, c’est plutôt l’ennui", ajoute le spécialiste. L’humanitaire y est assuré par la Croix-Rouge et, depuis quelques années, un petit espace "famille" a été aménagé pour accueillir, notamment, les mineurs isolés. 

  • A quoi ça sert ?  

"Pour entrer en France, il faut y être autorisé, entrer sur le territoire en situation régulière. Si vous ne l’êtes pas, on vous place en zone d’attente", explique à Europe 1 Me Alain Mikowski, avocat spécialiste du droit des étrangers. N’importe qui peut être concerné à partir du moment où les agents de la PAF pensent qu’il ne remplit pas les conditions d’entrée sur le territoire ou qu’ils ont un doute, par exemple, sur son visa, son passeport ou ses papiers d’identité. La personne est donc retenue le temps nécessaire aux vérifications et contrôles sur son identité, avant d'être réacheminée à l'étranger ou admise en France.

  • Quelle est la différence avec un centre de rétention ?

Il ne faut pas confondre la zone d’attente avec la rétention administrative, même si "ce sont deux lieux où l'on enferme les gens dans un dispositif carcéral", souligne Céline Poletti de la Cimade. Un centre de rétention accueille les étrangers qui, eux, sont déjà sur le territoire français et qui, sous le coup d’une obligation de quitter le territoire, sont en attente d’expulsion.

Au regard de la loi, "un mineur étranger ne peut être placé en centre de rétention puisque qu’il ne peut être expulsé avant ses 18 ans. Seuls les majeurs peuvent l’être", indique Me Mikowski. Mais dans les faits, la loi est régulièrement enfreinte. En ce qui concerne le placement d'enfants en centre de rétention, la France a d'ailleurs déjà été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme, en janvier 2012, avec l'arrêt Popov

  • Un mineur peut-il y être enfermé ?

Il faut savoir que "dans une zone d'attente, il n’y a pas de limite d’âge", précise Cécile Poletti. A la différence d’un centre de rétention, un mineur peut donc légalement y être retenu. "Un bébé de trois mois a déjà été enfermé en zone d'attente", souligne-t-elle, ajoutant : "'Enormément de rapports disent que lorsqu'on sépare des enfants aussi jeunes de leurs parents, cela crée des traumatismes extrêmement forts". En 2014, plus d’une centaine de mineurs non accompagnés, comme Fanta ou Andreane, ont été retenus dans ces lieux d’enfermement, rapporte cette spécialiste. 

  • Comment ça se passe dans le cas d‘un mineur isolé ?

Un administrateur ad hoc, désigné par le procureur de la République, se voit confier l’enfant qu'il assiste et représente dans ses démarches administratives et juridictionnelles. Il accompagne par exemple le mineur isolé dans le cadre de sa demande d'asile, précise la loi.

  • Combien de temps peut-on y être retenu ?

Le droit français permet de maintenir en zone d’attente toute personne, y compris un mineur isolé, jusqu’à 20 jours. Après quatre jours de maintien administratif – décidé par les policiers de la PAF -, le juge des libertés et de la détention intervient. Il peut prolonger cette mesure privative de liberté de huit jours, renouvelable une seule fois. C'est dans ce laps de temps que l'administration évalue si la demande d'asile de la personne est recevable. S'il elle ne l'est pas, l'entrée en France est refusée et l'étranger est alors renvoyé dans son pays.