Disparition de Sophie Le Tan : de troublantes similitudes avec une autre affaire

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Malgré les lourds indices qui le désignent, Jean-Marc R., 58 ans, refuse de s'exprimer sur la récente disparition d'une jeune étudiante strasbourgeoise. En 2001, il avait été acquitté dans une affaire similaire.

"Nous avons, à trente ans d'intervalle, deux jeunes femmes qui ont sonné à l'appartement de Jean-Marc R., et qui, potentiellement, n'en sont jamais ressorties vivantes". Interrogée par France Bleu, l'avocate Valérie Gletty dresse un parallèle troublant entre deux affaires. Celle de Sophie Le Tan, 20 ans, portée disparue depuis près de deux semaines à Schiltigheim, après s'être rendue chez Jean-Marc R., croyant visiter un logement à louer. Et celle, beaucoup plus ancienne, de Françoise Hohmann, volatilisée en 1987. Représentante en commerce, elle avait effectué sa dernière visite chez le même Jean-Marc R..

"Son territoire de chasse". La troublante coïncidence a été mise au jour par les enquêteurs strasbourgeois, à la recherche de Sophie Le Tan. Grâce à des expertises téléphoniques et aux témoignages de deux jeunes femmes ayant également répondu à l'annonce de Jean-Marc R. - sans, finalement, se rendre jusqu'à l'appartement -, ceux-ci ont remonté la piste du principal suspect. À son domicile, ils ont retrouvé des traces de sang portant l'ADN de la jeune femme, malgré un nettoyage manifeste "en profondeur", récemment effectué. Mis en examen pour assassinat, enlèvement et séquestration et écroué, le quinquagénaire refuse de s'exprimer sur les faits.

Mais pour le Directeur interrégional de la police judiciaire de Strasbourg, Christophe Allain, les éléments recueillis suffisent à penser que le "seul but" de Jean-Marc R. était d'attirer de jeunes femmes "dans son territoire de chasse". Interrogé au côté de la procureure Yolande Renzi lors d'une conférence de presse, mardi, le responsable a décrit le profil "compliqué" d'un individu "qui n'a pas envie de participer ni d'aider les services de la justice à découvrir la vérité". Et d'ajouter : "on peut imaginer qu'il observait ses futures victimes depuis son appartement".  

Un siège de voiture reculé "à fond". Ces propos ont une résonance particulière pour les proches de Françoise Hohmann : dans les années 1990, Jean-Marc R. avait été accusé du meurtre de la jeune femme. "C'était l'une des premières affaires où il était question de GHB", se souvient auprès des Dernières Nouvelles d'Alsaceson avocat de l'époque, Me Braun. Lors de son interpellation, Jean-Marc R. circulait à bord d'un véhicule contenant notamment des armes de poing, des cagoules et des photos pornographiques, sur lesquelles des jeunes femmes semblaient endormies.

Condamné en 2001 pour deux viols, commis sur une ancienne petite amie et une auto-stoppeuse, Jean-Marc R. a en revanche été acquitté dans l'affaire Hohmann. Un verdict "pas volé", selon Me Braun. "Il y avait juste le fait que son immeuble était le dernier endroit où avait été vue la victime, et que sa voiture avait été retrouvée le siège conducteur reculé à fond, la victime étant très petite et lui très grand."

Un regard "glaçant". Mais à l'époque, "il n'y avait pas de portable ou de géolocalisation, pas d'analyse ADN", se souvient Valérie Gletty, alors défenseuse de la famille Hohmann. L'avocate se souvient de la "froideur" et du "regard glaçant" de l'accusé. "Je n'ai moi-même pas à réussi à percer sa personnalité", reconnaît Me Braun, interrogé par Europe 1. "Impossible de savoir ce que cet homme pense".

Quoi que révèle la suite de l'enquête, Jean-Marc R. ne pourra être poursuivi dans l'affaire Hohmann, le code de procédure pénale disposant qu'aucune personne acquittée ne peut être accusée des mêmes faits. "Cette affaire, c'est comme une plaie qui se rouvre", déplore la nièce de la disparue de 1987 dans les Dernières Nouvelles d'Alsace.