"Contrôle au faciès" : rien d'illégal dans les textes, selon le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a jugé mardi que si certaines pratiques de contrôle pouvaient être illégales, la loi en vigueur était, elle, conforme à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel a jugé mardi que si certaines pratiques de contrôle pouvaient être illégales, la loi en vigueur était, elle, conforme à la Constitution. © AFP
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avec AFP
Le Conseil constitutionnel a jugé mardi que si certaines pratiques de contrôle pouvaient être illégales, la loi en vigueur était, elle, conforme à la Constitution, déboutant les avocats et associations requérants.

Appelé à "mettre fin aux contrôles au faciès", le Conseil constitutionnel a jugé mardi que si certaines pratiques de contrôle pouvaient être illégales, la loi en vigueur était, elle, conforme à la Constitution, déboutant les avocats et associations requérants.

Le Conseil constitutionnel "a jugé les dispositions contestées (...) conformes à la Constitution" tout en formulant des "réserves d'interprétation", invitant notamment les magistrats à un strict "contrôle de la légalité des contrôles d'identité". En clair, les "sages" expliquent qu'on ne peut censurer la loi parce que la pratique est mauvaise. Ils rappellent les bons usages, d'une part aux procureurs dont les réquisitions permettant les contrôles doivent être limités dans le temps et l'espace, et d'autre part à l'autorité judiciaire qui doit le cas échéant réprimer les "contrôles au faciès".

En finir avec des "pratiques de discriminations raciales". À l'audience du 17 janvier, le Syndicat des avocats de France (SAF) et plusieurs associations de défense des droits des étrangers avaient appelé les "sages" à en finir avec des "pratiques de discriminations raciales" d'autant plus inacceptables "qu'elles sont commises par les forces de police, dépositaires de l'ordre public". Les requérants s'appuyaient notamment sur la décision rendue le 9 novembre 2016 par la Cour de cassation. La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire avait condamné l'État français pour des contrôles d'identité "au faciès", les qualifiant de "faute lourde" engageant la responsabilité de l'Etat. Une première historique.

Contrôles ciblés et récurrents dans certaines zones. Le même jour, la Cour de cassation avait transmis au Conseil constitutionnel deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) relatives au contrôle d'identité, portant sur des articles du code de procédure pénale encadrant les contrôles d'identité (78-2 et 78-2-2) et des articles du code du séjour et de l'entrée des étrangers (L 611-1 et L 611-1-1). Les requérants avaient dénoncé un usage "dévoyé" de ces textes et un tour de passe-passe: les policiers, mandatés pour constater une infraction, effectuaient en fait un contrôle de la régularité du séjour. Les avocats avaient aussi dénoncé des contrôles ciblés récurrents dans certaines zones, comme les grandes gares de la capitale.

Sensible à ce dernier point, le Conseil constitutionnel rappelle au procureur qu'il "ne peut retenir des lieux et périodes sans lien avec la recherche des infractions visées dans ses réquisitions", ni, "par un cumul de réquisitions portant sur des lieux ou des périodes différents, autoriser la pratique de contrôles d'identité généralisés dans le temps ou dans l'espace".

"On est évidemment déçu". "On est évidemment déçu", a réagi Maxime Cessieux, un des avocats du SAF et de plusieurs associations, rappelant qu'un rapport du défenseur des droits publié il y a quelques jours indique que les jeunes hommes "perçus comme noirs ou arabes" ont "une probabilité 20 fois plus élevée que les autres d'être contrôlés". Mais, a-t-il souligné, "c'est aussi une avancée significative": "le Conseil constitutionnel constate la réalité des contrôles discriminatoires". "Il enjoint les policiers à justifier en quoi leurs contrôles ne sont pas discriminatoires et renvoie aux magistrats la responsabilité de garantir que ces contrôles ne sont pas généralisés (...) et bien en lien avec une infraction", a-t-il souligné, saluant une évolution positive depuis 2010, quand une précédente requête du SAF n'avait "même pas été transmise au Conseil constitutionnel".