Vœux de Macron : "peu de concret" mais un exercice "plutôt réussi"

Emmanuel Macron s'est adressé aux Français avant de basculer en 2018.
Emmanuel Macron s'est adressé aux Français avant de basculer en 2018. © STRINGER / AFP
  • Copié
, modifié à
Dans une allocution télévisée d'un peu moins de 18 minutes, Emmanuel Macron a présenté ses vœux pour 2018. Un exercice sobre pour mettre en avant sa détermination.
ANALYSE

Les premiers vœux sont toujours un moment très scruté pour chaque président de la République. Pour son baptême du feu, Emmanuel Macron a misé sur une mise en scène sobre et un discours volontariste lors d'une allocution télévisée enregistrée, dimanche. Sans faire d'annonces concrètes, le chef de l'État a rappelé sa détermination à réformer la France, assurant que l'année à venir "est celle de nombreux défis".

Au menu : travail, Europe, immigration… Parmi les thèmes abordés dimanche soir, Emmanuel Macron a insisté sur l'importance du travail dans son projet. La France a "besoin du travail et je le défendrai sans relâche", a insisté le chef de l'État. Il a aussi pointé l'importance de "la formation tout au long de la vie pour faire face aux grands changements". Le président a également mis l'accent sur l'Europe. "Nous avons besoin de retrouver une Europe plus souveraine, plus unie, plus démocratique, parce-que c'est bon pour nos peuples". Emmanuel Macron s'est ainsi montré persuadé que l'Europe peut devenir "cette puissance qui faire face à la Chine et aux États-Unis".

Emmanuel Macron a aussi défendu sa "ligne d'humanité et d'efficacité" sur l'immigration, alors que le projet de loi en préparation sur le droit d'asile est l'objet de critiques. "Nous devons accueillir les femmes et les hommes qui fuient leur pays parce qu'ils y sont menacés en raison de leur origine, de leur religion, de leurs convictions politiques, c'est ce qu'on appelle le droit d'asile, c'est un devoir moral, politique et je ne céderai rien, nous respecterons celui-ci".

"Il a donné aux Français la ligne directrice". "L'exercice est plutôt réussi car Emmanuel Macron a prononcé des vœux assez longs et sans prompteur. Il a parlé un peu moins de 18 minutes, aussi long que le général De Gaulle en 1962", a souligné Hélène Jouan, chef du service politique d'Europe 1 lors de l'émission spéciale consacrée à la prise de parole du président. "Il a déroulé ce qu’il voulait dire. Il a donné aux Français la ligne directrice. On retient les mots 'faire', 'agir', les occurrences de ces deux verbes sont très nombreuses."

Entendu sur europe1 :
C'était un rabâchage de propos qu’il a déjà tenu en huit mois de mandats

Pas de concret. Malgré ce volontarisme affiché, Emmanuel Macron n'a "pas fait d'annonces concrètes" concernant sa politique pour l'année à venir. "Il n'y a pas eu de nouvelles annonces. Emmanuel Macron a surtout insisté sur sa volonté de continuer à transformer le pays en profondeur, le mot d’ordre depuis son arrivée à l’Élysée. Ces réformes vont continuer à se faire avec la même force et la même intensité que le premier chantier de la réforme du code du travail", retient Olivier Samain, journaliste au service économie d'Europe 1.

Un manque de substance qui vaut au président quelques critiques. "C'était un exercice très convenu, un rabâchage de propos qu’il a déjà tenu en huit mois de mandats", déplore Nicolas Bay, vice-président du Front National. C’est assez révélateur de la manière dont Emmanuel Macron agit depuis son élection. Il utilise à plein le caractère autoritaire de la 5ème République, encore ce soir avec beaucoup de 'je'", pointe de son côté le député de la France insoumise Alexis Corbière.

Entendu sur europe1 :
On sent la volonté de Macron de s’adresser aux gens du centre et de la gauche

Un message au centre et à la gauche. Fautes d'annonces, que retenir du fond du discours ? "Ces vœux s’adressaient aussi aux électeurs de centre et de centre gauche si on s’intéresse au vocabulaire : école, formation, égalité hommes-femmes… Certes, il y a le projet sur le travail, mais derrière on sent la volonté de Macron de s’adresser aux gens du centre et de la gauche", analyse au micro d'Europe 1 Bruno Cautrès, politologue au Cevipof, le centre de recherche politique de Sciences Po. "Je suis frappée par le rééquilibrage de ce discours. Macron dit : 'l'année 2018 sera l'année de la cohésion de la nation'. 'Que valent les succès de quelques uns ?', ajoute-t-il. Il veut que tous les Français soient impliqués", abonde Hélène Jouan.

Un clin d’œil à Kennedy. L'éditorialiste d'Europe 1 retient aussi deux tournures de phrases : "j’ai besoin de vous" et "demandez-vous toujours ce que vous pouvez faire pour votre pays". "La seconde est mot pour mot une formule de John F. Kennedy, ce n'est pas anodin", estime Hélène Jouan. "Il a dit 'mes chers concitoyens européens', je croie que c’est une première. Macron veut lancer des consultations citoyennes pour bâtir un projet européen. Il appelle les Français à s’emparer de l’Europe pour construire un projet ensemble", ajoute-t-elle.

Nicolas Bay relève néanmoins une "distorsion spectaculaire entre les propos et les actes". "Emmanuel Macron parle de solidarité et en même temps il instaure une hausse de la CSG et du forfait hospitalier. Il parle de lutte contre l’immigration clandestine mais il augmente les crédits alloués aux centres de migrants. Aujourd'hui, les centres d'accueil sont saturés, on ne peut même plus héberger les sans-abris", ajoute le vice-président du FN. Le délégué général de La République En Marche ! Christophe Castaner a lui salué les mots du chef de l'État : "Les vœux d'Emmanuel Macron sont ceux de l'engagement, tournés vers l’avenir et vers l’action. Des vœux portés par deux engagements : écouter les voix discordantes et respecter les oppositions, expliquer sans relâche ; et continuer à faire, à agir, à transformer le pays".