Hollande et Valls déplorent la visite des élus français en Syrie

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Louis Hausalter avec Aurélie Herbemont et Alexandre Kara , modifié à
POLÉMIQUE - L'Elysée et Matignon étaient pourtant au courant de cette visite depuis au moins deux semaines.

La visite de quatre parlementaires français en Syrie - et surtout leur rencontre avec Bachar al-Assad - fait débat jusqu'au sommet de l'Etat. En visite aux Philippines, François Hollande a condamné jeudi cette initiative. "Je la condamne parce qu'il s'agit d'une rencontre entre des parlementaires français qui n'ont été mandatés que par eux-mêmes avec un dictateur qui est à l'origine d'une des plus graves guerres civiles de ces dernières années, qui a fait 200.000 morts. 200.000 !" a déclaré le chef de l'Etat lors d'une conférence de presse à Manille.

"Une faute morale" pour Valls. Plus tôt dans la matinée, Manuel Valls a condamné "avec la plus grande vigueur" l'initiative de ces deux députés et deux sénateurs. "Que des parlementaires aient ainsi, sans crier gare, rencontré un boucher", "je crois que c'est une faute morale", a insisté le Premier ministre, interrogé sur BFMTV. "Ils ne sont pas allés rencontrer n'importe qui, ils sont allés rencontrer Bachar al-Assad, responsable de plusieurs dizaines de milliers de morts. Il ne s'agit pas seulement d'un dialogue, il s'agit là d'un geste qui ne les honore pas", a ajouté le locataire de Matignon.

L'exécutif était au courant. L'Elysée et Matignon étaient pourtant au courant de cette visite depuis au moins deux semaines, selon les informations d'Europe 1, et n'ont semble-t-il rien fait pour l'empêcher. Le député PS Gérard Bapt, membre de la délégation, a lui-même affirmé avoir averti le gouvernement. Le problème, c'est que cette visite contredit frontalement la ligne officielle du Quai d'Orsay. Depuis 2012, les relations diplomatiques entre Paris et Damas sont rompues.

Cambadélis veut sanctionner Gérard Bapt. Les trois autres parlementaires qui se sont rendus en Syrie, le député UMP Jacques Myard, le sénateur UMP Jean-Pierre Vial et le sénateur UDI François Zocchetto, ont été reçus par le président Assad mercredi matin, mais pas Gérard Bapt. Il n'empêche, le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, qui a lui aussi condamné cette initiative, compte sévir à l'encontre du député socialiste. "J'ai écrit à Gérard Bapt, je le convoquerai et je prendrai des sanctions", a-t-il averti jeudi sur RTL.

Fillon valide l'initiative. Cette visite divise à droite. Au micro d'Europe 1 mercredi, François Fillon a approuvé l'initiative. "C'est dans la grande tradition parlementaire que d'aller là où il se passe des choses, et d'entendre des gens", a justifié l'ancien Premier ministre, qui estime qu'"ils ont eu raison d'y aller". "Ce n'est pas de la diplomatie parallèle, il y a des parlementaires qui ont le droit de s'informer pour contrôler l'action du gouvernement. Moi-même, je suis allé en Irak et au Liban il n'y a pas longtemps et honnêtement, si j'avais l'occasion d'aller en Syrie, j'irais sans hésiter".

Des "gugusses" pour Sarkozy. Nicolas Sarkozy, en revanche, ne voit pas cette initiative d'un bon œil. "Moi, personnellement, je n'y serais pas allé. Mais dans une démocratie, on ne peut pas empêcher quatre gugusses de faire ce qu'ils veulent", a-t-il estimé jeudi en marge d'une visite à l'hôpital Necker à Paris.

"Leçons de morale". Le député UMP Jacques Myard a réfuté toutes ces critiques, des "leçons de morale", a-t-il balayé au micro d'Europe 1. "La diplomatie française, ça ne se gouverne pas des salons parisiens, du tribunal médiatique et des appareils politiques", a-t-il asséné.

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