FN : Marion Maréchal-Le Pen, la véritable héritière ?

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Louis Hausalter
SUCCESSION - Candidate en région Paca à la place de son grand-père, la jeune députée du Vaucluse tente de présenter un visage de modernité, tout en rassurant la frange la plus conservatrice du FN.

C'est acté. Marion Maréchal-Le Pen conduira la liste du Front national en Paca aux élections régionales de décembre. Le bureau politique du parti a officiellement investi la députée du Vaucluse vendredi. La voie était libre après le retrait de Jean-Marie Le Pen, contraint par sa fille Marine à renoncer à ce qu'il voyait comme son ultime combat électoral.

Entre le grand-père et la petite-fille, l'affaire a été conclue le vendredi 10 avril, lors d'un tête-à-tête au domicile du président d'honneur du FN, à La Celle-Saint-Cloud. La veille, Marine Le Pen confirmait au 20 heures de TF1 qu'elle s'opposerait à la candidature de son père en Paca, et lui suggérait de se retirer de la vie politique. Jean-Marie Le Pen a cédé sur le premier point, à la condition que "Marion" prenne le relais. Lors de leur entretien, il a promis à sa petite-fille qu'il lui apporterait son soutien.

Très populaire chez les militants. Le signe de plus d'une transmission de témoin ? A 25 ans, Marion Maréchal-Le Pen confirme qu'elle est devenue une figure incontournable au sein du Front national. "Dans cette affaire, la solution qui a permis la sortie de crise, c'est Marion", se félicite-t-on dans son entourage. Et aux yeux d'une certaine frange de militants, c'est désormais elle qui incarne ce que devrait être le FN d'aujourd'hui. N'est-elle pas arrivée en tête à l'élection du comité central, sorte de parlement du parti, au congrès de novembre dernier ? 80% des votants lui avaient alors apporté leurs suffrages.

Des différences idéologiques avec Marine Le Pen. De quoi en faire la véritable héritière du père fondateur ? Parfois sévère avec sa fille, qui lui a succédé à la tête du FN, Jean-Marie Le Pen n'a jamais tari d'éloges sur sa petite-fille. C'est lui qui l'a convaincue de se lancer en politique, malgré les réticences de celle qui n'était alors qu'une simple étudiante en droit. Une filiation qui se retrouve en partie dans les idées. Sur le plan économique, Marion Maréchal-Le Pen rejoint plus la ligne libérale de son grand-père que le programme étatiste soufflé à Marine Le Pen par son bras droit, Florian Philippot. La députée du Vaucluse s'affiche aussi plus conservatrice que sa tante sur le plan sociétal. Elle n'a pas manqué un défilé de la Manif pour tous, alors que la direction du FN est restée très discrète dans le débat sur le mariage homosexuel.

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Paul-Marie Coûteaux, ancien conseiller de Marine Le Pen, décrit dans Le Figaro Magazine "une lutte de deux Fronts, avec deux programmes et deux stratégies. Celui de Marine Le Pen et de Florian Philippot, ni gauche-ni droite, face à celui de Jean-Marie Le Pen et de Marion Maréchal". Pour lui, "la question est de savoir si sa petite-fille sera comme lui à l'extrême droite ou si elle recherchera l'union des droites".

"Une Le Pen sans être Le Pen". La réponse est ambigüe. Car entre son grand-père et sa tante, Marion Maréchal-Le Pen joue les équilibristes. "J'ose espérer ne pas être la marionnette de l'un ou de l'autre", déclarait-elle mardi dans La Provence. "Je suis dans le FN de Marine Le Pen. Je ne suis pas d'accord sur tout, c'est normal, mais je suis entrée pour les mêmes motivations qu'elle". L'élue répète aussi son "immense respect pour Jean-Marie Le Pen", mais prend tout de même ses distances : "je ne me sens pas une femme d'extrême droite. Le totalitarisme, le racisme, ce n'est pas moi".

"Finalement, Marion Maréchal-Le Pen est une assez bonne synthèse entre la nouveauté qu'elle incarne par son âge et la continuité qu'elle représente grâce au soutien de son grand-père", estime le politologue Jean-Yves Camus sur Le Figaro.fr. "Elle est une Le Pen sans être Le Pen", affirme à Europe 1 le député Gilbert Collard, qui la côtoie à l'Assemblée nationale.

Un profil qui lui permet de jouer "sur tous les tableaux", avance le député UMP Julien Aubert, son rival dans le Vaucluse. "Elle s'appelle Le Pen, donc elle a la marque de fabrique", explique-t-il. Mais pour lui, les électeurs ne font "pas de lien" entre elle et son grand-père au moment de glisser leur bulletin de vote dans l'urne. "Aux législatives de 2012, elle a gagné un peu par surprise, parce qu'elle incarnait la fraîcheur et qu'elle a profité du rejet de son prédécesseur", estime Julien Aubert.

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Une stratégie de la synthèse. Pour sa future campagne en région Paca, Marion Maréchal-Le Pen ne compte pas non plus jouer la carte du FN "canal historique". La preuve : elle a sèchement écarté tout tandem avec Bruno Gollnisch, figure historique du FN et proche de Jean-Marie Le Pen. "En termes d'image, il incarne le Front d'une certaine époque, qui me semble un peu révolue", a-t-elle taclé dans Le Figaro.

L'un de ses proches précise à Europe 1 : "elle veut une liste qui lui corresponde et qui incarne le renouvellement. Si vous allez voir un électeur UMP et que vous lui donnez le choix entre voter Marion ou Gollnisch, il n'y a pas photo !" C'est toute la stratégie de l'élue du Vaucluse : capitaliser au sein du FN grâce à son nom, tout en offrant un profil appréciable aux déçus de la droite tentés de sauter le pas. Marion Maréchal-Le Pen, ou l'art de la synthèse.

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