Doubs : le FN séduit au-delà du FN

Sophie Montel
Sophie Montel © SEBASTIEN BOZON / AFP
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ON DÉCORTIQUE - La candidate FN, battue, a tout de même gagné 6.300 voix entre les deux tours de la législative partielle de dimanche.

Pour Marine Le Pen, c'est une certitude : "c'est le FN qui est le grand vainqueur de l'élection" législative partielle du Doubs. Certes, le socialiste Frédéric Barbier l'a emporté d'une courte tête dimanche, au second tour. Mais 863 voix seulement, sur 66.000 inscrits, le séparent de la candidate du FN, Sophie Montel. Et ce qui est frappant, c'est la progression de la candidate frontiste. Elle gagne 6.300 voix entre les deux tours. Signe que le Front national est désormais capable de séduire au-delà de ses partisans.

Le PS se rapproche du score de Moscovici. Il est difficile de connaître, dans le détail, le profil de ceux qui se sont décidés à voter FN entre les deux tours. Mais plusieurs éléments portent à croire qu'ils viennent majoritairement des électeurs UMP du premier tour. La baisse de l'abstention (de 60% à 50%) semble en effet plutôt avoir bénéficié au PS. Entre les deux tours, Frédéric Barbier est passé de 7.400 voix derrière lui à 15.000 voix. Or, 15.000 voix, c'est à peu prêt ce qu'avait fait Pierre Moscovici au premier tour en 2012, lors des législatives dans la même circonscription. Les électeurs socialistes qui étaient restés chez eux au premier tour semblent donc s'être davantage mobilisés au second.

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© SEBASTIEN BOZON / AFP

"L'UMP est à droite, le FN est à droite". Dans les 6.800 voix du candidat UMP, battu au premier tour,  il y a donc "manifestement eu un report important vers le FN, contre toutes les consignes" du parti, constate le politologue Olivier Duhamel, interrogé sur Europe1. "L'UMP n'a pas à nous imposer de voter blanc. Je suis toujours à l'UMP, mais là j'ai voté FN. L'UMP est à droite, le FN est à droite, je suis à droite. Il n'y a aucune raison que l'on balance l'UMP à gauche", fait entendre au micro d'Europe1 un électeur UMP qui a choisi le FN au second tour.

S'il devait y avoir un symbole de cet attrait de l'électeur UMP du Doubs pour le FN, c'est dans le bureau de vote de Fesches-le-Chatel qu'on pourrait le trouver. Cette commune, dont Charles Demouge, le candidat déchu de l'UMP, est le maire, a vu le FN l'emporter à 379 voix, loin devant le PS à 289 voix. Et ce alors même que la participation a légèrement baissé.

Le FN séduit au-delà de l'UMP. Mais tous les électeurs de l'UMP du premier tour n'ont pas non plus voté FN. Selon certaines estimations effectuées dimanche, entre 60 et 70% des électeurs de Charles Demouge se seraient tournés vers Sophie Montel au deuxième tour. Conclusion : le FN a aussi des réserves de voix chez les abstentionnistes. Selon Jean-Yves Camus, qui dirige l'Observatoire des radicalités politiques à la Fondation Jean Jaurès, le PS a "récupéré dans les parties urbaines" des voix là où la candidate FN s'est imposée dans le périurbain et le rural. La preuve dans le canton rural d'Hérimoncourt, où Sophie Montel a rassemblé 53,21% des voix au second tour.

Et ce n'est pas la première fois que le FN prouve qu'il séduit au-delà de l'UMP lorsqu'il arrive au second tour. Dans l'Oise et dans le Lot-et-Garonne, par exemple, lors des législatives partielles de 2013, les candidats FN avaient doublé leur nombre de voix entre les deux tours. Et c'était pourtant, à chaque fois, un candidat UMP qu'ils avaient en face.