Aquarius : des députés LREM s'indignent du silence de l'exécutif

Hugues Renson
"Qu'attendons-nous pour agir ?", a tweeté mardi matin Sonia Krimi, élue de la Manche. © Patrick KOVARIK / AFP
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avec AFP , modifié à
De nombreux parlementaires de la majorité ont fustigé, mardi, l'immobilisme de l'exécutif français face au drame de l'Aquarius. Ce bateau qui accueille des migrants est bloqué en Méditerranée.

"Depuis dimanche, l'Aquarius cherche en vain un port pour faire accoster les 629 passagers qui sont à son bord. L'Espagne a proposé son aide, la France est restée muette. Laissant à la dérive le principe d'accueil inconditionnel des migrants. Qu'attendons-nous pour agir ?" Ce message qui fustige le silence de l'Élysée face au blocage de l'Aquarius, le bateau humanitaire actuellement bloqué en Méditerranée avec des migrants à bord après le refus de l'Italie de lui ouvrir un port, n'émane pas d'un opposant politique à Emmanuel Macron…mais bien d'une députée de sa propre majorité. Il a été posté sur Twitter mardi matin par Sonia Krimi, élue de la Manche. Signe que le silence de l'exécutif, déjà critiqué à gauche, passe aussi mal au sein de LREM.

"Paralysée dans sa solidarité". Tout comme sa collègue, Anne-Christine Lang, députée de Paris, s'est fendue d'un message sur les réseaux sociaux. "Face à l'urgence et à la détresse absolue, la France se serait honorée à faire une exception et à accueillir les passagers de l'Aquarius", a-t-elle écrit. Sébastien Nadot, élu de Haute-Garonne, s'est montré plus sévère encore : "La France paralysée dans sa solidarité. La loi asile et immigration n'est pas qu'un symbole : elle a abaissé les droits des demandeurs d'asile et recroquevillé l'espace mental de nos frontières."

"J'aurais aimé que la France soit dans la tradition d'accueil". Tous ces élus prennent une position assez cohérente avec celle qu'ils avaient affichée lors du vote de cette fameuse loi asile et immigration, en avril dernier. Tous s'étaient abstenus, après avoir longuement critiqué un texte trop répressif. Mais le regret a essaimé même dans les rangs des députés en général moins critiques à l'égard de l'exécutif. Ainsi, Gabriel Attal, porte-parole du mouvement LREM, a prudemment prévenu sur Public Sénat mardi matin qu'il "n'imaginait pas que la France ne participe pas à trouver une solution humanitaire". Hugues Renson, vice-président de l'Assemblée nationale, s'est quant à lui exprimé sur BFM TV. "Nous n'avons pas entendu de réactions de l'exécutif", a-t-il reconnu. "J'aurais aimé que la France soit dans la tradition d'accueil. Aujourd'hui, c'est l'Espagne qui porte haut les valeurs de l'Europe."

Saïd Ahamada, député de Marseille, a également estimé qu'il "aurait été du devoir de la France de proposer d'accueillir les quelque 600 hommes, femmes et enfants en danger". Selon un membre du groupe LREM, "une trentaine" de députés auraient décidé de "mettre une pression" sur le gouvernement concernant l'avenir de l'Aquarius.

L'exécutif assume. Côté exécutif, néanmoins, l'heure semblait plutôt à la fermeté mardi. Interrogé sur Sud Radio, le secrétaire d'État auprès du ministre des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne, a nié toute "inertie" de la France. "La France prend plus que sa part, au sens où elle est engagée sur le théâtre libyen pour stabiliser la situation [et] pour accueillir sur trois ans 10.000 personnes éligibles au droit d'asile directement dans les pays de transit", a-t-il expliqué. Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a lui aussi jugé sur CNews lundi soir que la France "a[vait] pris sa part" en termes d'accueil des migrants.

Emmanuel Macron a attendu le Conseil des ministres, mardi, pour dénoncer le "cynisme" et l'"irresponsabilité" du gouvernement italien. Tout en continuant de refuser que l'Aquarius vienne dans un port français. "Si un bateau avait la France pour rive la plus proche, il pourrait accoster" en France car "c'est le respect du droit international", a-t-il justifié. En revanche, Paris pourrait apporter une aide à Madrid pour "accueillir" les migrants, a précisé Edouard Philippe mardi. "Nous sommes évidemment prêts [à le faire]."