"Sur Canal+, la Formule 1 fait aussi bien que le rugby"

Cyril Linette est le patron des sports du groupe Canal+.
Cyril Linette est le patron des sports du groupe Canal+. © Canal+
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INTERVIEW - Le patron des sports de Canal+ dresse un bilan de cette première saison diffusée sur la chaîne cryptée.

En février 2013, Canal+ raflait à TF1 les droits de retransmission du championnat du monde de Formule 1 pour une trentaine de millions d'euros par an. Alors que la saison s'achève dimanche avec le Grand Prix du Brésil, Cyril Linette, qui dirige le service des sports de la chaîne cryptée, se dit très satisfait de cette acquisition. Il répond aux questions d'Europe1.fr.

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Quel bilan tirez-vous de cette première saison de Formule 1 sur Canal+ ?

Nous étions très heureux de cette acquisition en début d'année et cette joie n'a fait que s'intensifier, puisqu'on a réalisé une super saison. La F1 a eu pour nous un triple effet. Le premier, c'est un impact commercial. L'acquisition de la F1 a eu le mérite de booster un peu les ventes de Canal.

Le deuxième élément, ce sont les audiences. Sur la saison, on a atteint une moyenne de 900.000 téléspectateurs et 35% de part d'audience sur les abonnés. Ce sont des audiences comparables au rugby. Je pense enfin que c'est très bon pour l'image des sports de Canal. Nous avons été assez fortement concurrencés sur un certain nombre de droits, notamment il y a deux ans, lors de l'irruption de beIN Sport. Il était important de réaffirmer la puissance de notre offre.

Justement, dans le contexte de lutte pour les droits TV avec votre rivale beIN Sport, en quoi est-ce stratégique d'avoir mis la main sur la F1 ?

BeIN Sport est venue nous concurrencer avec des investissements très massifs, qui nous ont amenés à repenser notre offre. Aujourd'hui, l'objectif de Canal, ce n'est pas de proposer tout, mais de proposer le meilleur. C'est vrai pour le cinéma et les séries, c'est aussi vrai pour le sport. De toute façon, nous ne pourrons pas avoir tous les contrats. Notre but est donc de conserver absolument nos contrats premium. Entre la Ligue 1, la Ligue des champions, le Top 14, le foot anglais et la F1, je pense que nous avons les cinq plus grands championnats du monde. Cela nous donne une offre premium très lisible, qui rencontre un grand succès.

Alonso devant Webber (930x620)

Avez-vous une estimation du nombre d'abonnés engrangés grâce à la F1 ?

Non, parce que les gens ne font pas de déclaration d'intention lorsqu'ils s'abonnent à Canal+. Mais nous avons observé un bon frémissement de nos abonnements au moment de l'acquisition des droits, qui a fait beaucoup de bruit à l'époque. Ensuite, notre dispositif a plu et nos débuts ont été salués assez unanimement. Nous avons donc enregistré de bons chiffres de ventes sur la période mars-avril, pour lesquels nous n'avons pas réellement d'autre explication que la F1.

Nous verrons si la tendance se confirme à la reprise du prochain championnat. On peut penser que tous les fans de F1 ne se sont pas abonnés l'année dernière et que beaucoup d'entre eux le feront peut-être l'année prochaine.

L'an dernier, la Formule 1 rassemblait 2,8 millions de téléspectateurs en moyenne sur TF1. Vous êtes certes une chaîne payante, mais ne pouvez-vous pas espérer plus que 900.000 ?

Je dirige le service des sports de Canal, pas de TF1. Pour bien connaître ma boutique, je sais que 900.000 téléspectateurs de moyenne, c'est énorme. En comparaison, les matches de Ligue 1 sont autour de 25% de part d'audience en moyenne, donc 35%, c'est beaucoup ! Certes, les horaires de la F1 sont plus avantageux, parce que le contexte est moins concurrentiel en journée que le soir. Mais cela veut dire qu'il y a un public particulièrement captif, et que sur les deux critères que sont le nombre de téléspectateurs et la part d'audience, la F1 est tout à fait au niveau du foot et du rugby.

22/11/2013 Sebastian Vettel GP Japon Suzuka Reuters 930x620

© REUTERS

Le suspense a été très faible cette saison en Formule 1, Sebastian Vettel ayant écrasé ses concurrents. Cela n'est-il pas un handicap ?

Non, cela n'a eu aucun impact sur nos audiences. Quand on est une chaîne gratuite comme TF1 et qu'on s'adresse à un public plus large, on est assez sensible à la conjoncture sportive. Sur Canal+, ce n'est pas la même chose : la F1 attire un public de passionnés, et je n'ai pas le sentiment que ce soit un problème pour eux. En tout cas, cela ne s'est pas ressenti sur les audiences.

Après, on peut effectivement espérer que le championnat du monde soit un peu plus disputé l'année prochaine, ou que Romain Grosjean, qui est en progrès, puisse gagner un Grand Prix. Si on a la chance que cette discipline revienne plus sur le devant de la scène sur le plan sportif, tant mieux.  Mais tout cela ne m'empêche pas de dormir, puisque je n'y peux rien !

Vous avez acheté les droits de la F1 pour trois saisons. Prévoyez-vous des évolutions dans votre dispositif l'année prochaine ?

Je pense que notre dispositif actuel est assez efficace et dynamique. Nous avons l'avantage de ne pas avoir de coupures publicitaires. Nous diffusons les essais libres et les qualifications tout au long du week-end sur Canal+ Sport. Côté consultants, Alain Prost et Jacques Villeneuve font référence. Nous envoyons une quarantaine de personnes sur tous les Grands Prix, y compris ceux qui sont très loin, ce que TF1 ne faisait plus pour des raisons économiques. Je pense honnêtement qu'en très peu de temps, on a fait énormément de choses.

A mon sens, l'année prochaine, nous serons dans la continuité. Nous venons de recruter Karim Bennani, qui était à beIN Sport, pour présenter le magazine Formula One. C'est sans doute sur cette émission que nous allons travailler le plus. Elle est à 500.000 téléspectateurs de moyenne le dimanche, c'est déjà très bien, mais on a peut-être moyen de la faire progresser encore. Mais ces ajustements seront relatifs, car je n'ai que des retours positifs sur notre dispositif à l'antenne.

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