Tensions Corée du Nord-États-Unis : les Japonais investissent dans les abris anti-atomiques

porte-avion Carl Vinson crédit : AFP PHOTO /US NAVY/MC2 SEAN M.CASTELLANO - 1280
Le porte-avion américain Carl Vinson s'est positionné aux côtés de l'armée maritime d'autodéfense japonaise © AFP PHOTO /US NAVY/MC2 SEAN M.CASTELLANO
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Marthe Ronteix avec Reuters , modifié à
Pour faire face à un éventuel affrontement nucléaire entre les États-Unis et la Corée du Nord, les Japonais tentent de se protéger en faisant installer des abris anti-atomiques et des purificateurs d'air chez eux.

Entre les essais balistiques et nucléaires de leur voisin, la Corée du Nord, et l'armada déployée par les États-Unis au large de leurs côtes, les Japonais ont de quoi craindre des conséquences d'une dégradation des relations entre les deux pays sur leur sol. L'archipel, qui n'a plus d'armée depuis 1945, se trouve à la portée des missiles nord-coréens. Le gouvernement de Kim Jong-Un a même précisé lors d'un essai de tir balistique en mars dernier qu'il visait les bases américaines installées sur le sol japonais. Alors les Nippons se protègent comme ils le peuvent et investissent dans des abris anti-atomiques et des purificateurs d'air.  

Ruée sur des équipements coûteux. La menace d'une attaque nucléaire brandie par la Corée du Nord qui n'est pas sans réveiller le traumatisme des bombes larguées sur Hiroshima et Nagasaki lors de la Seconde Guerre mondiale. Alors pour assurer leur sécurité face à la menace nucléaire brandie par la Corée du Nord, les habitants font installer des abris anti-atomiques. D'ailleurs la petite société, Earth Shift, a observé une multiplication par dix des demandes d'information pour ses abris souterrains, selon Akira Shiga, directeur des ventes. Des demandes qui ont commencé à augmenter dès février dernier et proviennent de l'ensemble de l'archipel.

Même constat auprès du directeur d'Oribe Seiki Seisakusho, une petite entreprise de Kobe spécialisée dans la construction d'abris, généralement sous les domiciles des particuliers, interrogé par Reuters. Nobuko Oribe assure avoir enregistré huit commandes rien que pour le mois d'avril. Habituellement, sa société en reçoit six pour toute une année. Pourtant ces installations sont de véritables investissements. Un abri pour treize personnes coûte en moyenne 25 millions de yen (soit 209.000 euros) et sa construction dure quatre mois.

Des purificateurs d'air pour se protéger des radiations… L'entreprise de Kobe a également vendu son stock de cinquante purificateurs d'air fabriqués en Suisse. Ils sont censés protéger des radiations et des gaz toxiques. Des appareils coûteux, 620.000 yens (5.182 euros) pour six personnes, qui paraissent pourtant dérisoires par rapport à la menace. Mi-avril, le Premier ministre japonais Shinzo Abe a jugé possible que la Corée du Nord "ait déjà la capacité d'équiper ses têtes de missiles de gaz sarin".

Poussés par un sentiment d'urgence. Alors les Japonais tentent de s'équiper au plus vite pour se protéger. "Il faut du temps et de l'argent pour construire un abri", explique le directeur d'Oribe Seiki Seisakusho. "Mais tout ce qu'on entend ces jours-ci, dans ce climat tendu, ce sont des clients qui en veulent un tout de suite. Ils nous demandent de venir et de leur présenter un devis." Un sentiment d'urgence qui n'est pas vraiment tempéré par les autorités.

Le gouvernement japonais a ainsi donné instruction vendredi dernier aux autorités locales d'organiser des exercices d'évacuation en cas d'attaque de missile. Une mesure que certaines villes n'ont pas attendue pour s'entraîner, comme le raconte FranceInfo. En mars dernier, une centaine de Japonais se sont ainsi exercés à Oga (dans le Nord du Japon). Sans parler clairement de la menace représentée par la Corée du Nord, les participants ont reçu des alertes factices explicites : "Un missile semble avoir été tiré. Il est possible qu'une partie de l'engin tombe". Les habitants devaient alors se réfugier dans des locaux municipaux et une école élémentaire.

Une crainte renforcée par une certaine vulnérabilité. Les nombreuses démonstrations de Pyongyang entretiennent ce climat de crainte. Le mois dernier, trois missiles sont tombés en mer dans la zone économique exclusive du Japon, à quelque 300-350 km de la côte de la préfecture d'Akita (nord). Et dimanche dernier, la Corée du Nord a menacé de couler le porte-avions à propulsion nucléaire américain USS Carl Vinson alors que deux contre-torpilleurs japonais ont entamé un exercice militaire avec le groupe aéronaval dans l'ouest du Pacifique.

Bien que le Japon possède des forces armées terrestres et maritimes depuis 1954, il s'agit seulement d'une force "d'autodéfense". Car après la défaite de la guerre du Pacifique, l'archipel a renoncé au droit d'avoir une armée. Mais en vertu d'un traité de coopération mutuelle, ce sont les États-Unis qui sont chargés d'assurer sa sécurité. C'est la raison pour laquelle plusieurs bases militaires américaines ont été établies sur le sol japonais. Une alliance qui, si elle fournit une protection militaire limitée, pourrait devenir une faiblesse si un conflit se déclarait.