"J'ai entendu : 'Dégagez de là, sales Corses !'"

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Johann, l'un des pompiers blessés le 24 décembre à Ajaccio témoigne mardi. Son agression, ainsi que celle d'un autre pompier et d'un policier, est à l’origine de toutes les violences sur l'île depuis le réveillon. 

Une tradition de Noël. Johann est pompier professionnel depuis dix ans. Le jeune homme de 30 ans a d'abord exercé à Marseille avant de venir travailler à Ajaccio, en Corse. C'est dans cette ville que, le soir du réveillon de Noël, il est tombé dans un guet-apens avec trois autres collèges. Il raconte mardi, dans une interview accordée au Parisien, ce qu'il a vécu le 24 décembre au soir. "Nous étions quatre, dont une jeune femme, à l'intérieur du camion. A cette époque de l'année, c'est une tradition chez nous, les gens organisent des feux dans les quartiers après avoir amassé des palettes. On appelle cette tradition le machja de Noël", raconte-t-il. Après une première intervention sans encombre, la patrouille est rapidement envoyée dans la cité des Jardins de l'Empereur, sur les hauteurs d'Ajaccio. 

Un quartier sans problème. "D'habitude, nous entrons et sortons sans aucun risque, laissant même tourner les véhicules, clés sur le contact, gyrophare allumé", assure Johann. Sauf que ce soir là, même si le feu ne présente aucun risque pour les habitations, les pompiers rencontrent un autre problème. "C'est au moment où je cherchais à faire demi-tour, dans un virage serré en bas de la cité, que nous avons essuyé les premiers jets de pierres". S'en suit alors une déferlante de violence. Johann raconte : "j'ai vu arriver une dizaine de personnes, précédées d'un jeune homme d'origine maghrébine, à visage découvert. Les autres le suivaient, visage masqué par des tee-shirts ou des cagoules". Croyant au départ que ces personnes tenaient en main des perches à selfie, Johann ne s'est pas méfié du groupe de personnes, jusqu'à ce que la vitre du véhicule éclate. "J'ai réalisé le danger : ils nous attaquaient à coups de clubs de golf". 

"Vous n'êtes pas chez vous !". S'en suit alors une série de propos xénophobes dont Johann retient surtout "Dégagez de là, sales Corses ! Vous n'êtes pas chez vous !". Voyant que l'un des assaillants essayait de pénétrer à l'arrière du camion, Johann continue d'avancer. Heureusement, les vitres de leur camion, prévu pour les feux de forêt, n'ont pas éclaté sous les coups mais Johann, ainsi qu'un collègue à l'arrière du véhicule, ont reçu des éclats de verre dans les yeux. 

Le pire a été évité. "J'ai appris plus tard que nos agresseurs disposaient d'une bouteille remplie d'un mélange potentiellement explosif d'acide chlorhydrique. Je n'ose imaginer ce qui se serait passé s'il avait atterri dans l'habitacle", admet le jeune pompier qui a alors eu le réflexe d'avancer pour se rendre rapidement à l’hôpital se faire soigner. Il remercie aujourd'hui toutes les personnes venues leur manifester du soutien, même s'il regrette, "les débordements imbéciles. Attaquer un lieu de culte n'est pas tolérable".