Les frères Kouachi, des hommes "calmes, déterminés, professionnels"

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Noémie Schulz avec , modifié à
TÉMOIGNAGE EXCLUSIF - Les frères Kouachi, auteurs présumés de l'attentat contre Charlie Hebdo, ont volé une voiture dans leur fuite mercredi. Le conducteur raconte son face à face avec eux.

Dans leur fuite, les deux auteurs présumés de l'attaque de Charlie Hebdo qui s'est déroulée mercredi, ont dû changer de véhicule. Après s'être enfuis des environs des locaux de l'hebdomadaire, ils s'emparent d'une Clio grise, rue de Meaux, dans le 19e arrondissement, à Paris. L'homme, braqué près de la porte de Pantin, raconte comment les deux frères l'ont approché pour lui voler son véhicule.

Les deux hommes, armés jusqu'aux dents, l'abordent alors qu'ils sont à bord d'une Citroën noire : "Le conducteur descend, armé d'un pistolet mitrailleur. J'ai su par après que c'était une kalachnikov. Comme j'avais ma vitre ouverte, il me dit : 'Descends de ta voiture, on a besoin de ta voiture.'" L'homme s'exécute et "à ce moment-là arrive une deuxième personne qui monte côté passager avec aussi un fusil avec une sorte de grenade au bout. Certainement un lance-grenades, quelque chose comme ça."

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"J'ai récupéré mon chien". Une fois installé à l'avant de la voiture, raconte-t-il, "à ce moment-là, j'ai le réflexe d'ouvrir la porte arrière et de dire : 'Je récupère mon chien.' J'ai donc récupéré mon chien".

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"Ils n'ont jamais couru, jamais élevé la voix". Alors que les deux hommes s'étaient présentés cagoulés à Charlie Hebdo, l'homme braqué raconte qu'ils "n'étaient plus masqués" lorsqu'ils l'abordent. Il se souvient très bien de leur visage : "Ils ressemblent aux personnes que vous avez vues (aux photos diffusées, ndlr.). Sauf qu'à ce moment-là, ils étaient en tenue paramilitaire avec leurs armes à la main." Ce témoin parle d'eux comme de personnes "très très calmes, très déterminées, très posées, très professionnelles, des commandos !" L'homme qui lui a adressé la parole "n'a jamais élevé la voix, ils n'ont jamais couru, ils n'ont jamais paru excités. Ils n'étaient pas transpirants. Rien de tout ça. Des gens qui ont donné l'impression d'être en opération.", raconte-t-il.

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Ils se revendiquent d'Al-Qaïda au Yémen. Les deux hommes s'éloignent sans lui faire de mal mais lui demandent de faire passer un message : "En partant, ils m'ont dit : 'Si jamais, tu t'adresses… enfin, si les médias t'interrogent, tu diras : 'C'est Al-Qaïda au Yémen'.'" Le témoin rapporte une anecdote : "Ils sont partis et ont calé. Et la deuxième fois ils sont partis avec ma voiture". Le modèle : "une Clio grise de 2000 qui a 150.000 kilomètres, une vieille voiture qui me servait à venir travailler".

Pendant tout ce temps, il ne se doute pas un instant de ce que viennent de commettre les deux braqueurs. Il n'avait pas encore entendu parlé de l'attentat à Charlie Hebdo. "Je n'avais pas la radio dans la voiture", dit-il. Mais quand il abandonne son véhicule aux braqueurs, il se retourne et "voit dans une pâtisserie une télé qui tournait en boucle et où ils parlaient des affaires de Charlie Hebdo". Il se rend compte de sa chance : "Je me suis dit que j'avais une sacrée étoile au-dessus de moi. Etant donné que je les ai vus à visage découvert et que je dois être certainement parmi les rares à les avoir vus à ce moment-là à visage découvert, j'ai eu de la chance, énormément de chance de pouvoir vous parler".

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