Assigné à résidence, le terroriste Merouane Benahmed témoigne

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François Coulon avec , modifié à
TÉMOIGNAGE E1 - Condamné à 10 ans de prison pour terrorisme et libéré en 2011, l'homme vit reclus et sous contrainte dans un village de l'ouest de la France. Une prison à ciel ouvert, assure-t-il.

Ils sont neuf à vivre assignés à résidence dans des petites villes françaises. En exclusivité pour Europe 1, voici le témoignage d’un islamiste, condamné à 10 ans de prison pour terrorisme dans le cadre des filières tchétchènes qui voulaient frapper en France entre 2001 et 2002. Merouane Benahmed a été libéré en 2011. Il est depuis interdit de séjour en France mais aussi en Algérie, ou il a été condamné à mort. Résultat : l’homme est assigné à résidence depuis près de 4 ans dans des prisons à ciel ouvert. Il vit en ce moment dans une petite commune de l’Ouest.

"En réalité, je suis en prison". Le maire de ce petit village a hérité de cet "invité" encombrant un jour de novembre, sans qu’il ait eu son mot à dire. Dans la commune, peu de gens sont au courant du profil djihadiste de l’Algérien : un "barbu" de 42 ans, logé à l’hôtel aux frais de la République. L’homme a la stricte interdiction de sortir du village, il encourt sinon trois ans de prison. "Ils disent que je suis assigné à résidence… mais en réalité, je suis en prison. Quelle est la différence ?  Vous ne parlez à personne, vous signez quatre fois par jours à la gendarmerie. Je me trouve comme quelqu’un qui serait enchaîné, entravé : je ne peux rien faire", déplore Merouane Benahmed.

"Je n’ai même pas 1 euro par mois".  Ce statut lui permet-il au moins de travailler ? "C’est impossible", assure-t-il. "On ne peut pas travailler. Où peut-on travailler lorsque l’on doit signer quatre fois par jour à la gendarmerie. C’est impossible. Ce n’est pas une vie. Je ne touche rien, je n’ai même pas 1 euro par mois". Sa famille, son épouse et ses quatre enfants, se trouvent actuellement dans le Gers. "Ils sont bloqués comme moi. C’est de la pression depuis 2011 à ma sortie de prison", raconte l’Algérien.  

"Jamais repenti, je ne suis pas Charlie". Toutefois, la situation de l’homme, si ubuesque soit-elle, prend un tout autre sens au regard de sa dangerosité potentielle. En effet, Merouane Benahmed ne cache aucune ses convictions djihadistes. "Si vous me demandez, ‘êtes-vous un ancien terroriste’…  Je ne vous réponds pas non", confie-t-il.  Et ainsi, à la question de savoir s’il est repenti, sa réponse est sans détour. "Non, jamais. Jamais", répète-t-il.

Et quand il s’agit d’aborder les récents attentats qui ont touché la France et l’Europe, il se fait elliptique… tout en restant fidèle à sa ligne de pensée. "Je suis loin de tout ça. Je n’ai aucun pouvoir et je ne peux pas changer tout ça. Mais je ne suis pas Charlie". La seule issue aujourd’hui pour Merouane Benahmed serait de trouver une terre d’accueil. Mais en trois ans, la vingtaine de pays qu’il a sollicités n’ont pas donné suite.

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