Polytechnique : l’Etat remet de l'ordre dans la "pantoufle"

Polytechnique défilé 2012 1280x640
Défilé d'élèves de l'école Polytechnique, le 114 juillet 2012. Image d'illustration. © BERTRAND GUAY / AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
ÉTUDES - Les diplômés qui s'engageaient directement dans le secteur privé échappaient jusqu'alors à son remboursement.

Le gouvernement a décidé de mettre de l'ordre dans un dossier qui ternissait l'image de l'"X". Un décret publié samedi réforme en effet la "pantoufle", cette somme que les diplômés ne servant pas l'État sont censés rembourser. Les élèves de Polytechnique perçoivent en effet pendant leur scolarité une solde d'environ 500 euros par mois et doivent, en échange de ce financement, travailler au service de l'État pendant dix ans. Or, si ceux qui servaient l'Etat moins de dix ans devaient rembourser, une réforme décidée en 2000 permettait aux polytechniciens travaillant directement dans le secteur privé d'échapper à ce remboursement. Un privilège vu comme une injustice.

Un privilège. Trois cas de figure se présentaient alors depuis la dernière réforme de 2000. Le diplômé, qui s'engageait pendant dix ans dans la fonction publique, n'avait pas à rembourser la "pantoufle" puisque son travail est censé la remplacer. Deuxième cas de figure, le polytechnicien, qui s'engageait dans la fonction publique mais la quittait avant d'avoir effectué ces dix ans, se voyait obliger de rembourser la "pantoufle". Enfin et c'était la nouveauté de la réforme de 2000, celui qui s'engageait directement dans le secteur privé une fois son diplôme en poche, échappait au remboursement. 

Seuls 13% des diplômés s'engagent pour l'État. Selon François Cornut-Gentille, député UMP de Haute-Marne et auteur d’un rapport sur l’école en 2014, "un polytechnicien menant carrière dans des institutions bancaires américaines est exonéré de remboursement, à la différence d’un ingénieur des Ponts travaillant dans une direction régionale de l’État". Et la dérive n'est pas rare puisqu'en 2012, selon le même rapport, 23% des diplômés "ont leur premier emploi à l'étranger" alors que seuls "13% ont rejoint un corps d'État".

Un manque à gagner pour l'école. La Cour des comptes avait également dénoncé la dérive dans un rapport en 2012. La direction de l'école, elle, avait demandé à l'État de s'emparer du problème dès 2010. Elle relève en effet un manque à gagner important, 300.000 euros par an selon la Cour des Comptes, même si chaque année, une trentaine d'élèves remboursent la "pantoufle".

Un avis négatif du Conseil de l'État. Avec son décret, le gouvernement souhaite donc revenir à la pratique d'avant 2000 : tous les polytechniciens, qu'ils servent l'État moins de dix ans ou qu'ils rentrent dans le privé, devront rembourser les soldes perçues pendant leur scolarité.

En février, le Conseil d'État avait cependant donné un avis défavorable au projet de décret. Il estimait qu'il permettait encore à des polytechniciens d'échapper au remboursement de la "pantoufle", notamment ceux décidant de travailler comme contractuel dans la fonction publique. Le gouvernement est passé outre cet avis. Cette nouvelle réforme s'appliquera donc "aux élèves et anciens élèves admis à l’Ecole polytechnique à compter de la promotion 2015", précise le décret.