Les TGV de la SNCF ont de moins en moins rentables

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avec Olivier Samain et François Coulon , modifié à
TRANSPORT - La compagnie ferroviaire envisage de moins desservir les petites gares TGV pour améliorer ses marges.

Au fil des années, les tarifs des TGV sont devenus illisibles et de plus en plus élevés. Et pourtant, ces lignes à grande vitesse ne sont pas si rentables que cela pour la SNCF, comme le pointe un rapport de la Cour des comptes publié jeudi : aux yeux des Sages, les objectifs de rentabilité de ces lignes sont loin d’être atteints. Et cela risque de s’aggraver avec les lignes actuellement en construction, pour lesquelles les prévisions de la SNCF sont jugées bien trop optimistes. La compagnie ferroviaire planche donc sur des modifications pour améliorer ses marges, avec une stratégie qui risque de faire polémique : réduire la voilure sur la desserte des petites villes en bout de ligne.

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Le TGV, un modèle pas si rentable. Dans son rapport publié jeudi, la Cour des comptes se montre très critique : le réseau de lignes ferroviaires à grande vitesse en France est "un modèle à bout de souffle, au coût devenu non soutenable". Selon la Cour, le "choix systématique de la grande vitesse ferroviaire (...) a abouti à un système peu cohérent, où les rames de TGV desservent 230 destinations et passent 40% de leur temps en moyenne sur les lignes classiques, ce qui nécessite en outre un parc important de rames".

Atlantique, Nord, Méditerranée, Rhône-Alpes, interconnexion en Ile-de-France : aucune de ces liaisons n'a atteint les objectifs de rentabilité annoncés par la SNCF, la fréquentation ayant été, à chaque fois, surestimée. Résultat, la marge opérationnelle (Ndlr : un ratio qui permet de calculer la rentabilité) de l'activité TGV est tombée "de 29% du chiffre d'affaires en 2008 à 12% en 2013".

Et qui risque de l’être de moins en moins. Non seulement la SNCF gagne moins d’argent qu’elle ne le devrait avec les lignes à grande vitesse, mais la situation risque d’empirer : chaque région souhaite être desservie et ses élus font pression pour construire de nouvelles lignes. Sauf que ces "nouveaux projets (sont) de plus en plus coûteux" et leur montage financier de moins en moins certain : "le financement des projets de LGV déjà décidés n'est (...) pas assuré", dénonce la Cour des comptes. Ce qui risque de faire grossir encore un peu plus la dette abyssale de Réseau Ferré de France, le propriétaire des lignes.

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Le dilemme : faut-il se recentrer sur les grandes métropoles ? Pour la Cour des comptes, il serait plus judicieux et rentable de limiter l’offre aux zones les plus peuplées. Un diagnostic que confirment les comparaisons internationales : alors que le réseau TGV français dessert 230 villes, les autres pays ont préféré limiter les leurs à quelques dizaines de villes tout au plus, des grandes métropoles, avec des bassins de population importants. Résultat, la grande vitesse est bien plus rentable au Japon, en Italie, en Espagne ou encore en Allemagne.

La Cour des comptes conseille donc de réduire la voilure, une stratégie à laquelle la SNCF n’est pas opposée. La directrice générale Voyageurs de la compagnie, Barbara Dalibard, l’a confirmé au micro d’Europe 1 : "mettre à plat l’articulation du système ferroviaire, c’est, je pense, ce qui s’ouvre devant nous". En  clair, en finir avec la desserte systématique des petites villes en bout de ligne quand il ne reste plus que quelques dizaines de voyageurs dans le train.

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Une desserte revue à la baisse pour les petites gares TGV ? La ville du Croisic, un peu moins de 5.000 habitants, illustre parfaitement cette situation. Sa gare TGV voit passer en semaine au moins trois trains directs par jour en provenance de Paris. Mais mercredi à 17h17, seule une trentaine de voyageurs descendent d’un train pourtant bondé à son départ à Paris. Et en moyenne, un TGV ne transporte plus que 20 passagers sur cette fin de ligne.

La SNCF envisage donc de revoir sa copie : si elle compte maintenir les TGV pour les fins de semaine et les vacances, elle ne serait pas contre les remplacer par des TER le reste du temps. Les voyageurs descendraient donc à Saint-Nazaire pour ensuite changer de train, ce que les personnes concernées n’envisagent pas un seul instant. "Mais bien sûr qu’on a besoin de ce TGV. Vous voulez nous arrêter où : à La Baule, à Nantes ? Et puis prendre un bus, un TER ? Non, je pense que le TGV c’est formidable", témoigne Julie, interrogée à la sortie du train.

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