SwissLeaks : cinq questions sur un scandale mondial

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Le Monde et plusieurs médias internationaux ont révélé un gigantesque système de fraude fiscale mis en place par la banque HSBC.

Les chiffres donnent le vertige. Plus de 100.000 clients de la filiale suisse de HSBC auraient dissimulé près de 180,6 milliards d'euros aux autorités fiscales du monde entier entre 2006 et 2007. Ce gigantesque système de fraude fiscale mis en place par la banque anglaise, baptisé "SwissLeaks", a été révélé par le Monde et une cinquantaine d'autres médias internationaux. Mais au-delà des chiffres, cette affaire pose plusieurs questions.

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Quel est le montant de la fraude ?

Les données analysées portent sur la période allant du 9 novembre 2006 au 31 mars 2007. Durant ces quelques mois, près de 180,6 milliards d'euros auraient transité sur des comptes à Genève, cachés derrière des structures offshore au Panama et dans les îles vierges britanniques. Selon les informations du Monde, HSBC aurait permis, voire encouragé ses clients à contourner certains impôts. La banque aurait notamment incité au contournement de "la directive ESD, une taxe européenne applicable en Suisse à partir du 1er juillet 2005", révèle le quotidien.

Gad Elmaleh.

© AFP

Combien de personnes sont concernées ?

Les journalistes ont eu accès aux données bancaires de plus de 100.000 clients et de 20.000 sociétés offshore. Parmi eux figurent aussi bien des personnalités du show-business que des chefs d'entreprise, des hommes politiques ou des personnes fortunées. En France, 3.000 personnes ont eu recours aux services de HSBC, dont plusieurs célébrités.

Le plus connu : l'humoriste Gad Elmaleh, qui disposait d'un compte de 80.000 euros et qui aurait depuis régularisé sa situation. Jacques Dessange, le fondateur d'un empire de la coiffure, l'ancien footballeur Christophe Dugarry ou l'héritière de la maison de couture Nina Ricci sont également cités. Des personnalités du monde entier sont aussi concernées, comme le roi du Maroc Mohammed VI ou le roi de Jordanie Abdallah II.

La banque a-t-elle couvert des activités criminelles ?

Cette enquête a également dévoilée la face sombre du secret bancaire suisse. Car l'opacité du système suisse n'a pas seulement permis de frauder le fisc, mais également de couvrir des activités criminelles de grande échelle, comme le blanchiment d'argent de la drogue ou le financement du terrorisme international. Ainsi, les fichiers dévoilent les noms de Saoudiens, suspectés d'avoir financé Oussama Ben Laden dans les années 2000, de barons de la drogue, de trafiquants d'armes ou encore de diamantaires véreux.

Comment ces informations ont-elles été obtenues ?

Hervé Falciani.

© AFP

Le quotidien Le Monde a eu accès à ces données bancaires et les a mis à disposition du Consortium des journalistes d'investigation (ICIJ), basé à Washington. L'ICIJ, une structure qui regroupe des journalistes d'investigation du monde entier, a mis en ligne dès dimanche soir les documents relatifs au "Swissleaks". Près de 154 journalistes de 47 pays ont alors épluché cette masse d'informations. Plus d'une cinquantaine de médias internationaux ont participé à cette opération, dont The Guardian au Royaume-Uni ou la Süddeutsche Zeitung en Allemagne.

Cette enquête est basée sur les fichiers de la banque HSBC Suisse, dont le siège est à Genève, et volés en 2007 par un lanceur d'alerte, l'ancien informaticien franco-italien Hervé Falciani. Le journal Le Monde a eu accès à ces fichiers, par un informateur secret qui a remis aux journalistes une clé USB. Les "listings Falciani" sont ces fichiers volés chez HSBC PB par Hervé Falciani, un ancien employé de la banque, qui avait alors fourni toutes ces données aux autorités françaises.

Quelles suites judiciaires ?

HSBC Suisse a réagi lundi à ces informations. La banque estime avoir fait le ménage dans son portefeuille clients, qui a subi une sévère cure d'amaigrissement. Sa clientèle s'est réduite de 70% depuis 2007 et les comptes gérés ne sont plus que 10.000, contre 30.000 il y a 8 ans. Les avoirs gérés par la banque ont aussi fondu, passant de 118 millions de dollars à 68 milliards fin 2014, selon l'établissement bancaire. "Ces révélations concernant des pratiques du passé doivent rappeler que ce vieux modèle d'affaires de la banque privée suisse n'est plus acceptable", a conclu la banque suisse.

Mais ces circonvolutions n'ont pas convaincu les autorités suisses. Des voix se sont élevées dans le pays pour réclamer l'ouverture d'une enquête judiciaire. A ce jour, seul Hervé Falciani, le lanceur d'alerte à l'origine du scandale, est visé par une enquête. HSBC Suisse fait elle déjà l'objet d'enquêtes en France et en Belgique, suite à des soupçons de fraude fiscale. L'établissement bancaire est loin d'être sorti d'affaire.

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VIDEO – SwissLeaks : les cinq chiffres à retenirpar Europe1fr