L’assurance vie est-elle un placement encore rentable ?

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ARGENT - Les épargnants ont retiré davantage d’argent qu’ils n’en ont investi sur les assurances vie en octobre.

L’assurance vie est sans conteste le placement préféré des Français. Pourtant, cette forme d’épargne a connu un mois d’octobre mouvementé, avec des retraits d’argent supérieurs aux dépôts. Comment expliquer cette décollecte ? L’assurance vie serait-elle devenue moins intéressante pour les épargnants ? Les réponses de Philippe Crevel, économiste et directeur du cercle de l’épargne.

L’assurance passe dans le rouge en octobre. Cela n’était pas arrivé depuis décembre 2013. Les épargnants ayant investi dans l’assurance-vie ont retiré plus d’argent qu’ils n’en ont investi en octobre, provoquant une décollecte nette de 100 millions, a annoncé vendredi la Fédération française de l'assurance. Dans le détail, les épargnants ont déposé 10,1 milliards d’euros en octobre mais ont dans le même temps retiré 10,2 milliards, ce qui montre une désaffection des épargnants pour ce type d’investissement.

Comment expliquer cette méfiance ? L'assurance vie est victime d'une rentabilité en baisse continue, et pour cause : la majorité de l’argent ainsi épargné est ensuite prêté aux Etats à des taux qui n’ont cessé de baisser, notamment en raison d’une inflation quais nulle et de la politique menée par la BCE pour enrayer la crise de la dette. Mais il y a également une explication législative, comme le souligne Philippe Crevel. "cette décollecte du mois d’octobre, qui fait suite à une collecte nulle en septembre, c’est un peu la conséquence de la polémique liée à la loi Sapin : désormais, en cas de circonstances exceptionnelles, le gouvernement pourra bloquer les contrats d’assurance vie. Cela a un peu refroidi les épargnants, ce qui explique qu’il y ait eu un peu plus de rachat", détaille-t-il. "Par ailleurs, il y a tout le contexte économique et financier, avec des taux qui restent très faibles et donc les épargnants se disent ‘je vais attendre avant de m’engager, voir comment ça évolue’. Il y a une forme d’attentisme qui explique la tendance de ces deux derniers mois", ajoute le directeur du cercle de l’épargne.

L’assurance-vie reste-elle intéressante ? "L’assurance vie reste une enveloppe d’épargne extrêmement attractive. Premièrement, elle bénéficie d’avantages fiscaux importants, tant au niveau des revenus qu’au niveau des droits de succession. Et puis l’assurance vie, ce n’est pas que les fonds en euros : certes, cela représente 85% du stock d’épargne sur l’assurance vie, mais il y a également les unités de compte qui permettent d’investir sur les marchés d’actions, à la fois français et étrangers", souligne Philippe Crevel.

D’ailleurs, si les assurances vie investies en fonds euros sont victimes de désaffection, celles investies en unités de compte rencontrent un succès croissant, même si elles sont aussi plus risquées. "Aujourd’hui, sur l’assurance vie, ce qui est plutôt intéressant, c’est d’aller vers les unités de compte sur les marchés financiers pour bénéficier de la bonne santé des actions et un peu moins sur les fonds euros, dont on sait qu’il vont baisser en 2016 et certainement encore en 2017", précise Philippe Crevel, avant d’ajouter : "ce qui a évidemment une conséquence : dès qu’on est sur les marchés financiers, il y a une part de risque un peu plus importante".

Au fait, quelle différence entre assurance vie et plan d’épargne en actions ? "La différence, c’est que le plan d'épargne en action (PEA) est investi en actions européennes alors qu’avec l’assurance vie on peut accéder à toutes les zones géographiques à travers les unités de comptes, que ce soit les Etats-Unis ou l’Asie. La palette est donc beaucoup plus large en matière d’investissements. Et puis le PEA est plafonné à 150.000 euros quand il n’y a pas de plafond sur l’assurance vie.  Enfin, l’assurance vie bénéficie d’un régime fiscal attractif en ce qui concerne les droits de succession, le PEA ne l’a pas. Ce sont deux produits qui peuvent se ressembler, mais l’assurance vie est un peu plus vaste que le PEA", précise-t-il.