La loi Macron veut réformer les retraites chapeau

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AJUSTEMENT - Parmi les nombreuses réformes prévues, la loi Macron s'attaque notamment aux décriées retraites chapeau.

Qualifiée de libérale par l'aile gauche de la majorité socialiste et par l'extrême-gauche, la loi Macron pourrait néanmoins les satisfaire sur un point : la réforme des retraites chapeau. La commission spéciale de l'Assemblée sur cette vaste loi a en effet décidé samedi de modifier les règles du jeu de ce type de retraite surcomplémentaire. Son montant pourrait désormais dépendre à l'avenir des performances de son bénéficiaire.

Une réforme des retraites chapeau dans les tuyaux. La commission spéciale de l'Assemblée sur la loi Macron a décidé samedi de soumettre à la "performance" de la société les engagements pris par une entreprise au titre des "retraites chapeau" bénéficiant à ses dirigeants. "Les retraites chapeau sont incompréhensibles quand elles sont totalement déconnectées de la performance", a jugé le ministre de l'Economie Emmanuel Macron, soutenant l'amendement présenté par le socialiste Laurent Grandguillaume.

Emmanuel Macron a promis de travailler d'ici le vote en séance à d'autres pistes, comme la "fidélité à l'entreprise", pour encadrer davantage ces retraites chapeau qui scandalisent souvent l'opinion par leurs montants faramineux. Or, aucune règle n'encadre ces dispositifs, si ce n'est le code d'éthique des sociétés cotées des organisations patronales Apef et Medef, qui n'a pas de caractère obligatoire.

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© PHILIPPE DESMAZES/AFP

C'est quoi une retraite chapeau déjà ? Le système de retraite français limite le montant des retraites - hors complémentaires - à 50 % du plafond de la sécurité sociale, soit 1.564 euros bruts par mois en 2014. Même si le régime complémentaire peut faire gonfler ce montant, le passage à la retraite peut être rude pour des PDG gagnant parfois des salaires à six chiffres. Certaines entreprises proposent donc des retraites chapeau - aussi appelées retraites surcomplémentaires - pour que leurs dirigeants et certains cadres conservent leur niveau de vie. Mais aussi, arguent-elles, pour attirer les meilleurs aux postes de direction.

Début 2012, la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) affirmait que 11.000 entreprises avaient mis en place un tel dispositif au bénéfice d’un million de Français. Si, selon son décompte, la moitié des bénéficiaires touchaient moins de 2.000 euros par an, le magazine Capital d'août 2010 affirmait que les 30 retraites chapeau les plus élevées de France se situaient à une moyenne de 720.000 euros par an.

Des polémiques qui s'enchaînent... Les retraites chapeau sont, avec les "parachutes dorés", devenues le symbole des avantages rondelets dont bénéficient les patrons et qui provoquent de plus en plus de débats en temps de crise. La dernière polémique sur le sujet concerne l'ex-PDG de France Télécom Didier Lombard. La CFE-CGC a déposé une plainte au pénal auprès du procureur de la République de Paris. Dans un communiqué publié lundi, le syndicat, dénonce ainsi le "caractère illégitime, voire illégal, de la retraite chapeau perçue par l’ex-PDG de France Télécom-Orange depuis 2011, pour un montant annuel de 346.715 euros, en sus de nombreux autres émoluments".

Il y a deux semaines, c'est la retraite chapeau dont va bénéficier le PDG de GDF Suez qui avait enflammé le débat. Gérard Mestrallet touchera, en plus de sa retraite, un bonus de 831.641 euros par an. Avant lui, il y avait eu l'affaire Philippe Varin, PDG de Peugeot-Citroën, pour lequel le constructeur automobile avait mis de côté 21 millions d’euros. L’entreprise étant en pleine restructuration et ayant bénéficié du soutien financier de l’Etat, Philippe Varin avait préféré y renoncer. D’autres ont au contraire tenu bon malgré la pression médiatique : Antoine Zacharias, parti du groupe Vinci avec la certitude de toucher 2,5 millions d’euros par an, ou encore Yves-Thibault de Silguy, assuré de se voir verser par la même entreprise 380.000 euros par an, après y avoir passé seulement cinq ans.

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© MIGUEL MEDINA / AFP

... Des politiques qui patinent. Les politiques ont déjà été tentés d’encadrer ce dispositif. Mais, lancé dans une opération séduction auprès des entreprises, le gouvernement actuel n’a pas souhaité légiférer et s’est contenté de limiter la rémunération des PDG d’entreprises publiques. Si le candidat Nicolas Sarkozy avait promis de les supprimer en 2007 (puis en 2012), il n’en a finalement rien été : le gouvernement avait finalement préféré miser sur l’auto-régulation, laissant au patronat le soin de rédiger un code de bonne conduite, le code Afep-Medef. Mais ce dernier n’a aucun caractère obligatoire. Les députés ont certes essayé en 2009 d’encadrer les retraites chapeau mais leur amendement avait ensuite été retiré à la demande d’Eric Woerth.