Corruption : la loi Sapin 2 "sera très utile"

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Le ministre des Finances Michel Sapin s'apprête à présenter la loi Sapin 2, destinée à améliorer la lutte contre la corruption, mieux encadrer le lobbying et protéger les lanceurs d'alerte. © ERIC PIERMONT / AFP
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3 QUESTIONS A - "La loi Sapin 2 est une forme de rattrapage", estime Daniel Lebègue, président de l’association Transparency International France.
INTERVIEW

23 ans plus tard, il remet le couvert. Après un premier texte en 1993, le ministre des Finances Michel Sapin est en train de peaufiner une nouvelle loi qui porte son nom, baptisée loi Sapin 2. Son objectif : doter la France de nouveaux outils pour lutter contre la corruption, le trafic d’influence et rendre plus transparente l’activité des lobbyistes. Concrètement, une agence nationale de lutte contre la corruption va voir le jour pour mieux accompagner les entreprises, surveiller les lobbys et accompagner les lanceurs d’alerte. Mais ce projet de loi est-il suffisant ? Europe 1 a posé la question à Daniel Lebègue,  président de l’association Transparency International France.

La France avait-elle besoin d'une nouvelle loi contre la corruption ? "Oui, aujourd’hui la France n’est pas considérée comme l’un des pays les plus vertueux et les plus intègres en matière de vie publique et de vie économique. Nous avons des progrès à faire, d’autant que nous sommes l’un des pays qui ont inventé les droits de l’Homme. Cette loi sera donc utile, très utile : elle va venir compléter les deux grandes lois adoptées en 2013 pour améliorer la transparence de la vie publique d’une part, et pour renforcer la lutte contre la corruption et la fraude fiscale d’autre part. En 2013, le législateur avait oublié un certain nombre de chapitres qui figurent aujourd’hui dans le projet de loi de Michel Sapin".

Justement, quelles sont les principales avancées permises par la loi Sapin ? "La loi Sapin 2 apporte dans le dispositif français trois éléments vraiment nouveaux : l’encadrement du lobbying, la protection des lanceurs d’alerte et la création d’une agence anticorruption. La loi Sapin crée notamment un registre national des groupes d’intérêt où ils doivent s’inscrire de manière obligatoire avant d’effectuer des démarches ou de rendre visite à des décideurs publiques.

Le deuxième élément concerne la protection des lanceurs d’alerte : il faut les protéger et leur donner les moyens de faire des signalements. Pensez à Irène Frachon dans l’affaire du Mediator, qui a eu du courage malgré les risques de représailles. A notre avis, il faudrait également leur apporter un soutien financier, nous aurons des amendements à proposer. Enfin, le projet de loi Sapin 2 permet la création d’une agence anticorruption avec des moyens de contrôles et de sanctions. Cela va lui permettre d’imposer aux entreprises l’adoption d'un ensemble de mesures préventives pour prévenir les risques futurs de corruption".

Cet ensemble de réformes sera-t-il suffisant ? "La lutte contre la corruption, c’est la bataille du glaive et du bouclier, elle se poursuit tout au long des siècles. Il y aura donc sûrement de nouvelles réformes à opérer dans le futur mais nous attachons beaucoup d’importance à ce projet de loi. Pour nous, c’est une des grandes réformes à débattre dans notre pays cette année, la dynamique va dans le bon sens. La loi Sapin 2 est une forme de rattrapage par rapport aux pays considérés comme les plus intègres, qu’il s’agisse de certains pays d’Europe du Nord ou encore du Canada. Dans notre classement annuel, la France apparaît toujours moins bien classée que ces pays. Je pense qu’avec les lois de 2013 et la nouvelle loi qui est envisagée, la France devrait être en mesure de nous hisser dans le groupe des pays considérés comme exemplaires".