Chômage : quel est le bilan de Sarkozy ?

Le chômage a bondi de 35% sous le quinquennat Sarkozy, une période marquée avant tout par la crise économique mais aussi par des choix de politique de l'emploi.
Le chômage a bondi de 35% sous le quinquennat Sarkozy, une période marquée avant tout par la crise économique mais aussi par des choix de politique de l'emploi. © MAXPPP
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La France compte 747.000 chômeurs de plus qu’en mars 2007, soit +35%. La faute à la crise ?

C’est la première préoccupation des Français. La lutte contre le chômage a été le premier déterminant du choix des électeurs, 50% d'entre eux plaçant cette thématique en tête, selon un sondage TNS-Sofres réalisé dimanche. La publication des derniers chiffres du chômage de l’actuel quinquennat, en hausse, est l’occasion de faire le point sur ce dossier si sensible. Quel est le bilan de Nicolas Sarkozy sur le front du chômage ? Europe1.fr a fait les comptes.

En mars, la mauvaise tendance se confirme

Pour le onzième mois consécutif, le chômage a augmenté en France selon les chiffres du ministère du Travail. 16.600 nouveaux demandeurs d’emplois ont été recensés en mars 2012, ce qui porte à 2,884 millions le nombre de personne au chômage. Si on inclut les demandeurs ayant une activité réduite, Pôle emploi comptait 4,309 millions d'inscrits fin mars, soit 30.700 de plus que le mois précédent.

Avec onze mois consécutifs de hausse du chômage, le bilan de la dernière année du quinquennat Sarkozy est  en effet sans appel : le nombre des demandeurs de catégorie A, c’est-à-dire sans activité, a crû de 7,2%. Mais qu’en est-il sur cinq ans ?

Une hausse de 35% sur cinq ans

Lorsque Nicolas Sarkozy arrive au pouvoir, en mai 2007, le taux de chômage est de 8% de la population active. L’été 2007 est encourageant avec une baisse du chômage mais la courbe s’inverse dès le début de l’année 2008 et cette tendance ne changera plus. L’effondrement de la banque Lehmann Brothers et la crise financière sont bien évidemment passés par là.

Sur cinq ans, Pôle Emploi a enregistré 747.000 chômeurs de plus en métropole, un chiffre en  hausse de 35%. Si on cumule les catégories A, B et C, le nombre de chômeurs supplémentaires monte à 1,078 million, toujours en hausse de 35%.

Qui a payé le prix fort de la crise ?

Sur cinq ans, le chômage est donc passé de 8% à 9,4% de la population active. "Au début de la crise, ce sont plutôt les hommes qui ont été impactés car la crise a été d’abord plus forte dans les secteurs de l’industrie et de la construction. Puis le secteur des services a été touché. Ce sont donc les femmes qui ont alors souffert du chômage ", décrypte Eric Heyer, directeur adjoint du département Analyse et Prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

"Tout le monde a donc été fortement touché par la hausse du chômage", poursuit-il, mais certains catégories ont été plus particulièrement concernées lorsqu’on raisonne en terme d’âge. Le nombre de senior au chômage est ainsi passé de 355.000 à 609.000, en hausse de 70%, ce qui en fait les premières victimes de la crise. Ces derniers ont mécaniquement subi deux tendances : le report de l’âge de départ à la retraite et la limitation des dispositifs de préretraite, qui leur permettait de disparaître des chiffres du chômage.

La faute à la crise ou au gouvernement ?

En période électorale, ces mauvais chiffres favorisent évidemment les critiques sur la gestion du gouvernement. L’opposition n’a pas manqué de profiter de l’occasion pour dénoncer l’action de Nicolas Sarkozy, "plus que jamais le candidat du vrai chômage", a ironisé Martine Aubry jeudi. Ce dernier se défend en rappelant que la crise est passée par là. Les deux argumentaires sont valables aux yeux d’Eric Heyer, qui dresse un bilan contrasté de la lutte pour l’emploi.

"C’est principalement la crise qui explique la dégradation du chômage", rappelle-t-il, avant de préciser que "la politique de l’emploi n’a pas forcément été la meilleure, avec une grosse erreur : la défiscalisation des heures supplémentaires".

Une politique de l’emploi à contre-temps

"Comparons avec l’Allemagne, un modèle qu’on aime bien prendre pour référence actuellement. Pourquoi a-t-elle mieux résisté à une crise tout aussi sévère ? Grâce à des dispositifs de chômage partiel, c’est-à-dire en réduisant le temps de travail pour conserver les emplois", rappelle l’économiste.

A l’inverse, "il est très curieux qu’en France le gouvernement ait donné deux directions opposées : réduisez le temps de travail et faites en même temps des heures supplémentaires", poursuit Eric Heyer, avant de faire les comptes : "on a dépensé 4,5 milliards d’euros pour augmenter le temps de travail alors que l’Allemagne a mis 6 milliards pour le réduire"

En clair, la politique du gouvernement a été à contre-temps, selon ce spécialiste. "Il faut augmenter le temps de travail en période de forte activité, mais pas en période de crise. Jusqu’au début 2008, ce n’était pas idiot mais dès que le chômage est reparti à la hausse, il aurait fallu supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires", argumente Eric Heyer.