Pascal Légitimus : "Mon métissage a été un handicap pour m’introduire dans un groupe"

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A.D , modifié à
Alors qu'il se produit au Grand Point Virgule, l'humoriste et acteur revient sur la période des Inconnus, peut-être pas définitivement finie, et sur ses envies.
INTERVIEW

Quand on associe les mots sketchs, Stéphanie de Monaco et chasseur, les Inconnus clignotent certainement dans votre esprit. Pascal Légitimus, l'une des trois têtes du trio désormais seul en scène, était invité samedi dans l'émission Il n'y a pas qu'une vie dans la vie.

"A la limite de l'autisme". Rien ne laisse imaginer qu'avant d'être un trublion de l'humour, Pascal Légitimus était un enfant mutique, qui a passé près de deux ans dans un sanatorium près d’Hyères (Var). "Ce n’est pas que j’étais mal-aimé c’était que je n’avais pas d’amour pendant deux ans. J’ai appris à parler, marcher et faire mes lacets très tard. Quand je suis revenu vers 4 ans dans ma famille, mon frère était né et avait pris ma place. D'un point de vue œdipien, c’était assez lourd." Mais son père a l'idée de lui faire faire du théâtre. D'enfant "à la limite de l'autisme", selon son expression, il réussit à s'exprimer, passe vite des castings et finit par en faire son métier. 

L'humour révélateur. C'est déjà l'humour qui l'aide dans la cour de récré. "Quand il y a 1.200 élèves, et que vous êtes déjà en carence affective, ce que vous recherchez c’est l’amour de votre prochain. Ce que je recevais, c’était des questions. J’avais toujours à expliquer d’où je venais. Mon métissage a été un handicap pour m’introduire dans un groupe", confie-t-il. Sa mère est arménienne, son père guadeloupéen d’origine éthiopienne, descendant du dernier roi d’Ethiopie selon la légende.

"A l’époque, il y avait du racisme, pas agressif mais par manque de connaissance. Avec le temps, l’humour m’a permis de me coaguler avec mes camarades." C'est  d'ailleurs l'humour qui le révèle avec ses complices Didier Bourdon et Bernard Campan. Ensemble, ils sont "les Inconnus". Un nom qui, comme pour les Nuls, prend le contre-pied de la prétention. "On est passé par plusieurs noms un peu absurdes : les 'Saltozopuc', "Made in France'", énumère d'ailleurs l'humoriste.

Entendu sur europe1 :
L’énergie politique aujourd’hui est une énergie égotique Ces gens-là ne pensent pas beaucoup à nous. Ce sont des avantages personnels, des causes personnelles, des magouilles.

De 5 à 3. Ce que l'on sait moins, c'est qu'ils étaient cinq au départ de l'aventure, avec Smaïn et Seymour Brussel, à se produire sur le plateau du petit théâtre de Bouvard. "Ensuite, naturellement, Smaïn, qui avait la fibre du one man, est parti. Seymour Brussel était un peu en conflit avec notre producteur" et s'est éclipsé aussi. A trois, ils avaient chacun un rôle naturel. Bernard était "la conscience rationnelle du groupe. Didier était plus le leader qui embarquait l’énergie. Moi, j’avais beaucoup d’idées." A trois, aussi, ils ont fait plus de 300 sketchs et vendu cinq millions de DVD.

Transmission et reformation. Un autre chiffre témoigne encore plus du carton : leurs vidéos ont été vues plus de 500 millions de fois alors que le trio est séparé de la scène depuis 20 ans. "Je pense qu’il y a eu une belle transmission de la part des parents. Les personnages qu’on a inventés ont un côté clownesque et universel à la fois", explique l'acteur. La reformation, "ne serait-ce que pour s’amuser", trotte d'ailleurs dans sa tête tout comme dans celle de Didier Bourdon. Quant à Bernard Campan, "ce n’est pas qu’il freine, mais il est dans une autre vibration. En ce moment, il est au théâtre avec Thierry Lhermitte."

Pas de politique. Patience. Rien n'est perdu niveau timing puisque l'humoriste compte "vivre très longtemps, jusqu’à 95 ans. C’est ce que je me donne comme point de mire. Il y a plein de choses à faire." Plein de choses, mais pas de politique. S'il veut bien s'engager pour la planète et le bio - il a d'ailleurs été ambassadeur eu sommet de Copenhague pour l'environnement en 2009 -, il ne souhaite pas faire de politique, à l'image de son arrière grand-père, premier député noir de l'Assemblée nationale "parce que les dés sont pipés. L’énergie politique aujourd’hui est une énergie égotique. Ces gens-là ne pensent pas beaucoup à nous. Ce sont des avantages personnels, des causes personnelles, des magouilles. On le voit tous les jours."

Aujourd'hui, à 57 ans, Pascal Légitimus joue dans Legitimus Incognitus au Grand Point Virgule, un spectacle où il parle d’infidélité, de sexualité, de la famille, des enfants, de la peur, des phobies, du téléphone...et se consacre à sa famille. Des activités qui collent bien à son envie de "vouloir transmettre, faire rire, aider, divertir".