Novès: "Si on n'est pas européen..."

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Propos recueillis par SYLVAIN LABBE , modifié à
"Le Brennus est derrière nous, on repart de zéro." Comme pour mieux planter le décor d'une saison particulière, Guy Novès annonce la couleur. A la veille d'une reprise du Top 14 vendredi, à Bayonne, de tous les dangers pour des Champions de France, amputés de leurs internationaux et diminués par les blessures, le manager toulousain, s'il refuse de polémiquer, n'en pense pas moins et évoque un possible classement au-delà de la sixième place.

"Le Brennus est derrière nous, on repart de zéro." Comme pour mieux planter le décor d'une saison particulière, Guy Novès annonce la couleur. A la veille d'une reprise du Top 14 vendredi, à Bayonne, de tous les dangers pour des Champions de France, amputés de leurs internationaux et diminués par les blessures, le manager toulousain, s'il refuse de polémiquer, n'en pense pas moins et évoque un possible classement au-delà de la sixième place. Guy, on vous avait soumis aux doublons durant le Tournoi ; faut-il s'inquiéter de cette saison au cours de laquelle les internationaux feront défaut durant un tiers du Top 14 ? (il soupire) Qu'est-ce qu'on peut dire... Je ne sais même pas s'il est encore opportun d'en discuter... On est conscient depuis la moitié de la saison dernière qu'on aurait à faire à une rentrée difficile. On s'est donné le temps de s'organiser et on n'avait pas d'autre choix que d'en passer par là. Après, définir ce championnat comme un championnat tronqué, ou pas, je laisse chacun à sa propre appréciation. En ce qui me concerne, je ne suis plus dans cet état d'esprit, je suis dans le travail, malgré les circonstances, de faire le mieux possible. Je ne vais pas passer ma vie à parler de championnat tronqué, ou pas. C'est un championnat particulier, qui va sûrement donner des résultats différents parce que les circonstances sont quand même pénibles à vivre avec jusqu'à 40 % d'effectif en moins pour certains clubs (l'effectif toulousain est amputé de douze internationaux, mobilisés par la Coupe du monde, ndlr). Faut-il y voir l'opportunité offerte d'explorer de nouvelles pistes, de donner la chance à de jeunes joueurs, mais aussi la nécessité d'intégrer au plus vite les recrues ? Ce n'est pas qu'une jeunesse qui va être promue et ce ne sont pas seulement des recrues que nous avons attirées en vue de ce championnat, c'est un tout. Il y a des joueurs restants, qui sont ne pas sélectionnés, comme Jauzion, Poitrenaud ou Maestri, et qui auraient pu disputer cette Coupe du monde ; nous avons récupéré aussi des jokers Coupe du monde (Delasau, Vernet-Basualdo, Hoeft), il y a, c'est vrai, aussi les recrues, comme Matanavou, mais on oublie aussi les retours de blessure comme Yann David. Je crois que chaque club a essayé de construire, non pas un effectif en surnombre parce qu'il est illusoire de vouloir compenser l'absence de 14 ou 15 joueurs internationaux par des recrues et des jokers Coupe du monde âgés de 35 ou 36 ans. C'est particulier... "L'état d'esprit, je crois que c'est le Smic " La saison dernière, Jean-Baptiste Elissalde avait salué l'état d'esprit du vestiaire, déjà privé des internationaux, en cours de Tournoi. C'est cet état d'esprit qu'il faudra restaurer dès la reprise ? Je crois qu'il a été démontré que le Stade Toulousain, non pas simplement depuis la saison dernière, mais depuis que les doublons existent, avait toujours bien abordé ces périodes. Cet état d'esprit n'est pas nouveau, il est bien ancré au club depuis un grand nombre d'années, même du temps où Jean-Baptiste était joueur. Maintenant, démarrer une saison lorsqu'une équipe n'est pas en pleine possession de ses moyens et lui demander d'avoir les meilleurs résultats possibles, sachant que même lorsqu'on dispose de tout l'effectif, trois ou quatre matches sont nécessaires pour être dans le coup, ça devient compliqué. Mais l'état d'esprit, pour moi, c'est le Smic. Est-ce trop schématique de se dire qu'il faut serrer les dents jusqu'au retour des internationaux, qui seront forcément éprouvés par leur campagne en Coupe du monde ? Ou faut-il avant tout aborder cette saison sans rechigner ? Je pense qu'il faut l'aborder sans rechigner. On sait qu'on nous a placés dans des conditions particulières et qu'on ne fera pas de miracles dans ces conditions. Déjà dans les meilleures dispositions, c'est très, très dur parce que le championnat est de plus en plus resserré. Si à l'issue de cette saison particulière, on n'est pas européen, on n'est pas dans les six premiers, ce sera la première fois en 19 ans, mais quelque part, je crois qu'il y aura une certaine logique à voir qu'on ne peut pas toujours être les meilleurs quand on nous met autant de difficultés sur notre route. Votre recrutement est marqué par une orientation assez inhabituelle au Stade vers l'étranger, et notamment vers le Sud (McAlister, Burgess, Steenkamp, Botha)... C'est bizarre cette sensation à l'égard du Stade Toulousain... Ce n'est pas totalement vrai, on a quand même aussi intégré dans notre effectif des garçons tels que Bézy, issu de notre formation, Doussain, issu de notre formation, Boukerou, issu de notre formation, autant de jeunes joueurs français. Nous comptons sur deux ou trois autres jeunes encore, qui sont en train d'émerger. Nous avons aussi lâché un joueur comme Kelleher, des joueurs comme Delasau ou Hoeft nous quitteront après la Coupe du monde. Pour compenser ces départs, on s'est certes tourné vers quelques recrues étrangères, telles que Burgess ou McAlister, mais on oublie aussi que Beauxis nous a rejoints. Notre pourcentage de joueurs étrangers au Stade Toulousain sera cette année encore l'un des plus faibles du Top 14. Si l'on recrute un ou deux joueurs à l'étranger, ça fait l'effet d'une bombe, c'est rigolo. Je peux vous citer une équipe française du style : Poux, Montes, Servat - Maestri, Millo-Chluski - Bouilhou, Nyanga, Picamoles - Doussain, Beauxis - Clerc, David, Jauzion ou Fritz, Médard, Poitrenaud. Là, je ne vous annonce que les Français ; citez-moi une autre équipe du Top 14 capable d'aligner une équipe comme celle-ci. Et je ne parle pas de Donguy, ni de certains joueurs que j'ai volontairement oubliés... "Le Brennus est derrière nous, on repart de zéro" Dans ces conditions, il semble très compliqué de défendre ce Bouclier de Brennus... Vous savez quand on gagné un titre, je l'avais déjà dit après notre dernier titre de Champion d'Europe, c'est la validation de la saison dernière. Le Brennus est derrière nous, on repart de zéro. On n'est pas tenants du Brennus. L'année dernière, nous étions Champions. On est dans une nouvelle compétition, sur la même ligne de départ que les autres. Je ne me sens pas du tout une couronne de Champion de France sur la tête cette saison et ce n'est certainement pas ce genre de chose qui me met la pression. Doit-on s'attendre selon vous à voir une équipe comme Castres, qui ne doit se passer que de quatre internationaux, prendre le large en ce début de saison ? Sur le papier, on peut le dire. Dans la compétition, on le verra. Ce n'est pas uniquement le fait de ne pas pouvoir aligner une formation en particulier. Même aujourd'hui, nous sommes en mesure de pouvoir aligner une équipe de qualité, ce qui est compliqué, c'est que cette équipe ne puisse pas tourner et souffler durant dix matches. C'est dans les rotations et dans les blessures qu'on va rencontrer des difficultés. Malgré ses conséquences sur le championnat, vous allez suivre, on l'imagine, cette Coupe du monde ? Je vais faire comme tout le monde, bien évidemment, essayer de suivre les matches. Etre vivement supporter de l'équipe de France parce qu'on ne peut pas laisser une équipe de France jouer en Coupe du monde sans la soutenir quand on est passionné par le jeu. Et puis bien sûr avoir un oeil sur nos joueurs comme essayer d'avoir aussi un oeil sur l'ensemble du rugby pour continuer à apprendre et à évoluer en regardant ce qui se fait ailleurs.