Malouda : "la faillite d'un système"

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LAURENT DUYCK , modifié à
EQUIPE DE FRANCE - Le milieu français dénonce les méthodes de Domenech dans L'Equipe Mag.

EQUIPE DE FRANCE - Le milieu français dénonce les méthodes de Domenech dans L'Equipe Mag. Raymond Domenech s'est peut-être étranglé en feuilletant samedi matin L'Equipe Mag, si tant est qu'il achète encore ce quotidien sportif et son supplément du samedi, cause pour lui de tous les maux de l'équipe de France en Afrique du Sud. "J'ai protégé, surprotégé les joueurs, et je continuerai de le faire. Je n'ai pas l'intention aujourd'hui de dénoncer les faits ou les dires de tel ou tel", disait-il encore mercredi lors de son audition à l'Assemblée nationale. Rares internationaux à s'être exprimés, Thierry Henry, Patrice Evra et Eric Abidal avaient eu la même discrétion à son sujet en retour, fruit selon France Football d'un pacte conclu dans l'avion du retour d'Afrique du Sud. Rentré par ses propres moyens, pour voir sa famille avant de s'envoler pour Haïti, Florent Malouda s'est affranchi de cet accord lors d'un entretien accordé à L'Equipe Mag. D'abord prudent, refusant de se "substituer au sélectionneur" pour livrer des explications de la faillite des Bleus en Afrique du Sud – "Demandez-lui s'il est fier de son travail", lance-t-il – le milieu de terrain de Chelsea finit par livrer sa version. "C'est la faillite d'un système qui a mené à une débâcle, annonce l'ancien Lyonnais, qui compte 57 sélections avec les Bleus. Les joueurs qui évoluent à Chelsea, Barcelone, Arsenal, Munich ou Lyon ont besoin d'un contexte de haut niveau pour s'épanouir. Si ce n'est pas le cas, une fois à l'intérieur, ils ne peuvent pas combattre le système." De quel système parle-t-il ? "Une méthode de travail qui, deux fois de suite, a conduit à un échec dans une grande compétition. Une continuité qui s'est transformée en descente aux enfers." "J'ai eu l'impression de ramer à contre-courant" S'il ne fuit pas ses responsabilités en tant que joueur et donc acteur de ce fiasco, jusqu'à être prêt à accepter une éventuelle sanction pour la grève de l'entraînement - "une mauvaise décision", reconnaît-il aujourd'hui - en soutien à Nicolas Anelka, son coéquipier à Chelsea, Malouda va plus loin dans la dénonciation de la méthode de fonctionnement du désormais ancien sélectionneur de l'équipe de France. "A aucun moment, ces dernières années, ma parole n'a pesé face au sélectionneur. J'ai eu l'impression de ramer à contre-courant. Je vivais mal la différence entre le fonctionnement de la sélection et celui d'un grand club comme Chelsea", explique-t-il. Une situation qui ne serait pas propre à lui seul, lui qui a "déjà payé pour savoir qu'il vaut mieux se taire sous peine d'en prendre plein la gueule", faisant référence à sa mise à l'écart de huit mois pour avoir critiqué les décisions de son sélectionneur après l'échec de l'Euro 2008. Malouda, encore: "On n'essayait même pas d'aller voir le coach pour lui parler tactique, système de jeu, 4-3-3 ou 4-2-3-1... C'était: 'Tu te mets là et tu fais pas d'histoires'. On ne cherchait pas d'explications." Des propos qui rappellent furieusement ceux que l'on prêtait début septembre à Thierry Henry, quant ce dernier était encore capitaine de l'équipe de France, à la veille de France-Roumanie comptant pour les éliminatoires de la Coupe du monde (1-1). "Coach, nous aussi on a quelque chose à vous dire. Là, je parle au nom du groupe. Nous aussi, on reste sur notre faim. On s'ennuie pendant vos entraînements", avait-il lancé selon Le Parisien, propos évidemment démentis dans la foulée par l'intéressé. Depuis, l'équipe de France avait affiché une unité de façade, trahie par les revendications de Franck Ribéry ou les critiques, déjà, d'un certain Nicolas Anelka sur la qualité du jeu de l'équipe de France après la défaite contre l'Espagne début mars (0-2)... Contrairement à ce que certains laissent entendre, Raymond Domenech avait donc beaucoup plus d'emprise sur son groupe, finalement plutôt dociles pour des "caïds". Son échec est celui de ne pas avoir convaincu ses joueurs. Lesquels se tournent vers l'avenir. A l'image de Malouda: "L'important est d'en venir à un fonctionnement normal, tendu vers la performance. Le sélectionneur doit exprimer sa façon de diriger, sa stratégie. Sa vision tout simplement. Les joueurs ont besoin d'une direction, d'un cadre de travail. D'être confronté à un chef." Autrement dit, tout ce que n'était pas Raymond Domenech à ses yeux.