Lock-out : vers un "hiver nucléaire" en NBA

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avec agences , modifié à
BASKET - Les joueurs ont refusé la proposition des propriétaires. La saison est en danger.

Le syndicat des joueurs (NBPA) a décidé lundi de ne pas accepter la dernière proposition en date des propriétaires de franchises NBA de mettre fin au lock-out, grève patronale entamée le 1er juillet dernier. Cela change (presque) tout. Explications.

Deux semaines de plus, au moins...

Une bataille juridique à venir. Lundi, le lock-out s'est déplacé du terrain social au terrain juridique. En effet, le syndicat des joueurs a annoncé son retrait des négociations collectives et opté pour l'autodissolution. Cette décision permet désormais aux joueurs de pouvoir intenter collectivement un procès à la NBA pour abus de position dominante, sur la base de la loi anti-trust. Pour gérer leurs intérêts, ils ont engagé deux avocats de renom, Jeffrey Kessler et David Boies. Ce dernier a notamment participé aux procès antitrust de Microsoft et de Napster. L'objectif des joueurs est simple : que le lock-out soit rapidement déclaré illégal. Alors qu'ils sont actuellement privés de toute rémunération, cette action en justice pourrait permettre aux joueurs de toucher plusieurs millions de dollars en dommages et intérêts. "Nous allons vers un hiver nucléaire de la NBA et c'est très triste", a regretté le "commissaire" de la NBA, David Stern (photo), qui a lancé une contre-offensive devant les tribunaux.

L'American Airlines Center (930x620)

La saison entière en danger. La dernière proposition des propriétaires prévoyait une saison réduite à 72 matches (au lieu de 82) avec un début le 15 décembre. Le refus des joueurs va automatiquement repousser cette date. Pour autant, la dissolution du syndicat ne signifie pas (encore) qu'il n'y aura pas de saison. Pendant la procédure en justice, les deux parties peuvent en effet continuer à négocier. Les discussions continuent d'achopper sur quelques points cruciaux, à commencer par le partage des 4 milliards de revenus (3,4 milliards d'euros) générés chaque année par la Ligue. Les propriétaires souhaitent un partage à 50-50 alors que les joueurs, qui touchaient encore 57% la saison dernière, ne veulent pas descendre sous les 53%. Les deux autres pierres d'achoppement principales sont le plafonnement des salaires et le passage de six à cinq ans comme durée maximale de contrat. En 1998-99, dans une situation équivalente, la saison n'avait débuté qu'en février et avait été réduite à 50 matches de saison régulière. Dans l'état actuel des choses, ce serait un moindre mal. 

L'union désunie ?

De graves conséquences économiques. Les semaines qui s'écoulent sans match se font au détriment de tous, et à commencer des joueurs, qui ne sont pas rémunérés pendant cette période. En cas d'annulation totale de la saison, comme ce fut le cas pour le hockey-sur-glace et la NHL, en 2004-05, cela signifierait un manque à gagner de plusieurs dizaines de millions de dollars pour les joueurs disposant des plus gros contrats... Cela fait réfléchir. Mais la NBA, ce ne sont pas seulement ces gros salaires, ce sont aussi de plus modestes employés qui vont souffrir autant, voire plus, de la situation. Outre-Atlantique, certains observateurs n'hésitent pas à souligner le côté indécent de la grève mais aussi du combat mené par les joueurs, pour la plupart afro-américains et issus de milieu modeste. "Les joueurs n'arrêtent pas de dire que l'accord qui leur a été proposé n'est pas juste, comme si quelqu'un trouvait la réalité économique actuelle "juste"", s'irrite Michael Wilbon sur ESPN.com. "Les gens qui essaient de s'accrocher en tant que vendeurs ou agents de stationnement vont perdre leur emploi à 30.000 dollars par an (22.000 euros) et même peut-être leur maison et devront en plus entendre des hommes pleurnicher sur leurs conditions de travail dans des franchises qui pèsent des centaines de millions de dollars ou sur leur réduction de salaire à 5 millions de dollars par an (3,7 millions d'euros)…" Le président du désormais ancien syndicat, Derek Fisher (photo), a expliqué agir dans l'intérêt des "joueurs qui viendront dans cette Ligue dans la décennie à venir et au-delà".

Tony Parker, avec l'Asvel (930x620)

Une ruée possible vers l'Europe. Plusieurs dizaines de joueurs ont déjà décidé de franchir l'Atlantique. La plupart sont européens et ont rejoint leur pays d'origine. En France, ils sont sept à avoir fait ce choix, dont, évidemment, le triple champion NBA Tony Parker à Villeurbanne (photo). Avec ces mauvaises nouvelles sur le front du lock-out, d'autres pourraient suivre cet exemple. Joakim Noah, d'abord réfractaire à quitter les Etats-Unis, se verrait bien du côté de Paris-Levallois. Mickaël Piétrus pourrait rejoindre son club formateur, Pau-Lacq-Orthez. Des stars américaines songeraient également à jouer en Europe. C'est le cas notamment de Kevin Durant, meilleur marqueur la saison dernière. La star du Thunder d'Oklahoma City serait en contact avec Valence, en Espagne, mais aussi Bayreuth, en Allemagne. Pour tous ces joueurs, il s'agit de jouer au basket, parfois de monnayer leurs talents, toujours de rester en forme en vue, notamment, des Jeux olympiques de Londres, l'été prochain. Le lock-out n'est pas seulement un imbroglio socio-économique, c'est aussi un beau chamboule-tout sportif...