Lavigne: "Un Dakar d'hommes"

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Propos recueillis par Guillaume BARDOU , modifié à
A quelques jours du grand départ du Dakar 2011 à Buenos Aires, prévu le 1er janvier, le directeur de l'épreuve, Etienne Lavigne, nous détaille les particularités d'une troisième édition consécutive en Amérique du Sud. Entre parcours varié et durcissement de la navigation, le patron du Dakar souhaite un retour aux sources de la course créée par Thierry Sabine.

A quelques jours du grand départ du Dakar 2011 à Buenos Aires, prévu le 1er janvier, le directeur de l'épreuve, Etienne Lavigne, nous détaille les particularités d'une troisième édition consécutive en Amérique du Sud. Entre parcours varié et durcissement de la navigation, le patron du Dakar souhaite un retour aux sources de la course créée par Thierry Sabine. Etienne, comment se présente ce Dakar 2011 et notamment son parcours tracé pour la troisième fois consécutive sur les territoires argentins et chiliens ? Si l'on devait en donner les grandes lignes, on pourrait le décrire comme un parcours de difficultés, varié. La plus grande course extrême du monde va se dérouler sur des parcours absolument fabuleux. Avec en plus un plateau exceptionnels puisque 430 véhicules vont prendre le départ ce samedi 1er janvier. Ce Dakar, c'est donc 13 jours de compétition pour 9000 kilomètres dont 5000 de spéciales. Il y a du costaud, du très costaud même au programme. A la vue de ce parcours, prédomine le sentiment d'une progression des difficultés par palier... Exact, c'est un Dakar qu'on a voulu crescendo, avec trois tronçons. Des premiers jours de mise en jambe mais vous savez que, sur le Dakar, elles sont déjà assez relevées puis on rentre dans le vif du sujet avec le désert de l'Atacama et beaucoup de dunes, de franchissement, de navigation. Les étapes feront 400, 600 kilomètres. Ce sera le coeur du Dakar, "el corazon del Dakar "comme on dit là bas ! Mais le retour sur la partie argentine ne sera pas plus facile puisqu'à deux jours de la fin, se présentera encore une étape de 552 kilomètres. L'épreuve sera vraiment ultime jusqu'à la fin en terme de difficultés et de kilométrage. La découverte de territoires plus au nord entre t-elle dans cette démarche d'augmenter la difficulté, d'apporter de l'imprévu après deux éditions déjà courues en Amérique du Sud ? Oui, on est vraiment monté à l'extrême nord des deux pays, Argentine et Chili. On va toucher les frontières boliviennes et péruviennes. On y a découvert des paysages absolument incroyables, des canyons rougeoyants à la Sergio Leone, des paysages de western absolument fabuleux. On est très contents d'avoir su trouver ces nouvelles opportunités de terrain, des terrains d'expression géniaux pour le Dakar. Je rappelle qu'il fera très chaud puisque c'est l'été là bas, les conditions de course seront extrêmement difficiles, arides. Le tout sur un terrain très divers, allant de la pampa au désert. Poussières, dunes, haut plateaux, rien ne semble épargné aux concurrents. Est-ce une manière de perpétuer la légende du Dakar auprès d'un grand public un peu perdu par le changement de continent ? Oui, montagne, poussières, dunes parmi les plus hautes du monde notamment sur la partie chilienne. Il faut savoir que certaines dunes culminent à 1400 mètres d'altitude donc du très costaud. C'est la plus grande course mécanique extrême au monde ! Avec une partie cassante pour le matériel sur les spéciales roulantes, piégeuses. Puis, sur la partie de sable, c'est moins cassant mais tout aussi difficile puisqu'on peut y rester longtemps à chercher son chemin. ″Renvoyer la course à ses fondements″ Vous semblez bien vous plaire sur ce continent américain. Cela veut-il dire que l'Afrique est oubliée ? L'Afrique, malheureusement pour elle, vous connaissez son actualité. Elle est dramatique. Des pays comme le Mali ou la Mauritanie sont touchés par le terrorisme, avec des problématiques d'otages ou de combat. C'est malheureux. J'aimerais beaucoup ramener le Dakar en Afrique. Ce ne sera pas maintenant, peut-être dans quelques années. Mais encore faut-il que les conditions de sécurité nécessaires soient là pour qu'on puisse revenir la tête haute sur ce continent. Ce n'est donc pas d'actualité. On a fait des études au Brésil, au Paraguay qui sont des pays très sympas, où l'on peut faire de très belles courses... On a également été en Arabie Saoudite qui possède des déserts fabuleux. Nous avons des idées, de la curiosité, on ne se refuse rien en terme de perspective. Cette édition 2011 marque d'ailleurs une nouveauté. Pouvez-vous nous expliquer cette volonté de distinguer les parcours autos, motos et camions ? Le premier objectif de ces différenciations de parcours est la sécurité. C'est la priorité de l'organisation en Amérique du Sud, que ce soit pour les participants ou les spectateurs avec un programme de prévention. On a un tronçon commun aux trois courses au début. Vous savez que les motos partent en premier suivies des autos et camions. Puis, on fera une dérivation pour les motos qui auront un parcours plus court, mais pas moins intéressants avec sans doute plus de technique, des crêtes de montagne, des endroits extrêmement trialisants. Le tout en laissant plus d'espace entre la dernière moto et la première auto. Les courses ne se rattrapent donc jamais sur les quatre premiers jours de course. On évite les problèmes de danger en cas de dépassement. Par contre, dès qu'on arrive sur le désert de l'Atacama, et ses zones désertiques immenses, ce sera le Dakar traditionnel avec les trois courses mélangées puisqu'on peut s'y doubler. Parcours différencié mais réglementation unique en moto avec ces fameuses 450cc pour tout le monde ? Effectivement. Tous les top pilotes du plateau vont courir avec le même type de motos. Cela nous ramène dans la compétition des marques mythiques comme BMW, Honda, Yamaha ou Aprilia. Le tout avec les meilleurs ténors du monde. Ce Dakar 2011 incarne aussi le renforcement du poids de la navigation. Pouvez vous nous détailler ce nouveau règlement, notamment sur l'utilisation du GPS ? Effectivement, peu de gens connaissent les règles sur le GPS, c'est donc une bonne question afin de la décrire. Sur le Dakar, le GPS est aveugle et ne se déclenche que lorsque vous arrivez à proximité du point que vous devez atteindre. Le GPS ne sert donc qu'à partir du moment où vous arrivez près du point que le roadbook vous a indiqué. Jusque là, le rayon à partir duquel le GPS s'activait était de 3 kilomètres. On l'a désormais restreint à 800 mètres. Ça change la donne en terme de navigation pour les copilotes et pilotes motos. Vous devez être plus exigeants et plus vigilants, donc ralentir pour assurer votre navigation. C'est renvoyer la course à ses fondements. Le Dakar, c'est surtout des hommes, avec leurs compétences, leurs faiblesses, leurs fatigues. On aime ça, voir les gens les plus malins. C'est aussi redonner leur place aux excellents navigateurs moins rapides en vitesse pure. Ils pourront mieux exprimer leur talent. Un retour aux sources en quelque sorte... On revient à ces fondamentaux, à l'homme. C'est bien, le Dakar est une course d'hommes, pas seulement du sport mécanique. C'est de l'endurance, de la fatigue, du courage, la chaleur, l'usure du matériel combinée à cette recherche du chemin. C'est cette composante de difficultés qui fait la richesse de l'épreuve. Un cocktail extrêmement fort, dense, difficile à avaler...