Mobilisation lycéenne : 280 établissements touchés, nombreux incidents, 700 interpellations

Jeudi matin, à Marseille, la tension était grande devant certains établissements.
Jeudi matin, à Marseille, la tension était grande devant certains établissements. © AFP
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avec AFP , modifié à
Au quatrième jour d'un mouvement de contestation né dans la foulée des "gilets jaunes", près de 280 établissements scolaires ont été perturbés, dont 45 bloqués, jeudi.

Près de 280 lycées et collèges ont été perturbés en France jeudi, dont 45 bloqués au quatrième jour d'un mouvement de contestation né dans la foulée des "gilets jaunes", selon une source au ministère de l'Intérieur. De nombreux incidents ont été recensés, menant à l'interpellation de plus de 700 lycéens à travers le pays. 

"On est sur des chiffres à peu près similaires aux jours précédents", avait indiqué dans l'après-midi le ministère de l'Éducation. "Selon les établissements, les situations sont très hétérogènes, entre les blocages totaux, partiels, les barrages filtrants, des feux de palettes..." Les syndicats lycéens avait appelé à maintenir la pression et intensifier le mouvement jeudi par une "mobilisation générale" avant des manifestations vendredi. Ils réclament notamment l'abandon des réformes du bac, de la voie professionnelle et de la hausse des frais d'inscription pour les étudiants hors UE. 

Fortes tensions à Mantes-la-Jolie, une vidéo fait polémique

La tension était aussi très forte à Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines, où "de violentes échauffourées ont opposé les forces de l'ordre à des individus dans le quartier du Val-Fourré, à proximité du lycée Jules Saint-Exupéry", a rapporté une source policière à Europe 1. "À 12h20, 122 étaient interpellés et placés en garde à vue pour participation à un groupement en vue de la préparation à des violences volontaires ou des destructions ou dégradations. 37, la plupart encagoulés, étaient trouvés porteurs de bâtons, battes de base-ball et conteneurs de gaz lacrymogène. L’interpellation d’un nombre aussi important d’individus a nécessité de prendre des mesures de sécurité complémentaires", précise cette même source.

Les mains entravées ou sur la tête, à genoux ou assis au sol, des dizaines d'entre eux ont ainsi été rassemblés dans le jardin d'un pavillon et dans une maison associative par quelque 70 policiers mobilisés pour cette opération. Les images de la vidéo, relayées sur les réseaux sociaux, ont énormément fait réagir. D'autant qu'un des policiers prononce cette phrase : "Voilà une classe qui se tient sage".

"Il faut dire les choses posément mais fermement : ce qui s'est passé avec les lycéens de Mantes-la-jolie -ces scènes dont il existe de nombreuses photos et vidéos- est simplement intolérable", a notamment tweeté l'ancienne ministre Cécile Duflot. "Effrayant. Et inacceptable d'un point de vue humain et démocratique", a réagi la députée de la France insoumise Clémentine Autain. Le compte officiel du Parti communiste français ajoute : "À la répression du droit de manifester, voilà maintenant l'humiliation des lycéens. Que le gouvernement cesse ses provocations."

Pour Frédérique Rolet, la secrétaire générale du syndicat SNES-FSU, ces images sont "insupportables". Michel Vincent, lui aussi syndicaliste à la FCPE écrit quant à lui : "Quand Blanquer nous promet l'école de la confiance, Castaner met en place celle de l'humiliation ! Le scandale est sans nom ! Parents réagissons cela suffit!"

 

Des blocages à Paris, à Lille et à Marseille

Des incidents dans le Nord.  47 personnes ont été interpellées, notamment à Lille, après des rassemblements émaillés d'incidents. Au total, une trentaine d'établissements ont connu des mouvements de blocage dans le département. Trois véhicules et 23 poubelles ont également été incendiés. A Lille, des centaines de jeunes se sont rassemblés devant le lycée international Montebello. Plusieurs centaines d'élèves de différents lycées ont ensuite convergé à la mi-journée devant le rectorat et dans le centre-ville, où les forces de l'ordre les ont dispersés à l'aide de gaz lacrymogènes. Dès 7h30, des dizaines de lycéens s'étaient rassemblés devant le lycée Pasteur pour en bloquer l'entrée. 

Le mouvement lycéen a également touché Nice, avec des centaines d'élèves dans la rue et au moins quatre établissements touchés. La manifestation a dégénéré en un violent face-à-face entre la police et des jeunes aux abords du lycée du Parc Impérial, l'un des plus grands établissements de Nice, avec plusieurs interpellations "musclées" selon un enseignant. 33 interpellations ont eu lieu. 

La mobilisation s'est étendue à quelques universités, notamment à Tolbiac (Paris 1) ou Paris 3-Censier. 

En Seine-Saint-Denis, 37 lycées et deux collèges étaient bloqués, avec une situation très tendue devant plusieurs établissements. À la Courneuve, devant le lycée Denis-Papin, une trentaine de jeunes cagoulés ont jeté des cocktails Molotov et incendié une voiture, selon la police.

Dans les Hauts-de-Seine, 35 personnes ont été placées en garde à vue après des échauffourées. 

Des jets de pierre à Marseille. À Marseille, une vingtaine d'établissements sont touchés, avec des "blocages plus ou moins filtrants", selon le rectorat. Après les violences et les incidents constatés les jours précédents, et notamment une jeune fille victime de brûlures mercredi en tentant de mettre le feu à une poubelle, plusieurs lycées avaient été fermés à l'avance. "Il y avait trop de risques de blessés parmi les lycéens", a précisé le rectorat, en soulignant la présence d'éléments extérieurs. 3.000 lycéens sont partis de la faculté Saint-Charles vers le Vieux Port avant de revenir à leur point de départ, encadrés par plusieurs enseignants CGT, SUD-Solidaires et SNES, et sous étroite surveillance des forces de l'ordre. 

Le long de la manifestation et surtout lors de sa dispersion, des voitures ont été brûlées et les forces de l'ordre, victimes de caillassages et de jets de projectiles divers, ont répondu par des tirs de grenades lacrymogènes.

Des blessés à Béziers et Toulouse

Deux blessés légers à Béziers. Une trentaine d'établissements ont été impactés dans l'académie de Montpellier, dans l'Hérault, avec de nombreux "incidents et actes d'incivilité" : deux élèves ont été légèrement blessés dans des heurts, à la pommette et à la cuisse. Une voiture a été brûlée, une autre renversée, et plusieurs dégradées, tandis que du mobilier urbain a été dégradé. Huit personnes ont été interpellées, a-t-on appris de source policière.    

Deux policiers blessés à Toulouse. La mobilisation des lycéens à Toulouse s'est poursuivie jeudi, avec des blocages d'établissements, et une manifestation réunissant 300 personnes a été ponctuée de violences au cours de laquelle onze personnes ont été blessées, dont deux policiers, a indiqué la préfecture de la Haute-Garonne. Sept personnes ont été interpellées. 

Trois lycéens condamnés à de la prison ferme en Isère et à Pau

Deux lycéens ont été condamnés mercredi par le tribunal correctionnel de Bourgoin-Jallieu, en Isère, à six mois de prison ferme pour des violences lors des manifestations contre la réforme de l'Éducation, a indiqué jeudi le parquet. Les deux lycéens, majeurs, étaient jugés en comparution immédiate pour des dégradations et des jets de projectiles contre les forces de l'ordre lors des manifestations qui ont agité le centre-ville de Bourgoin-Jallieu lundi et mardi. Ils ont également écopé de 500 euros d'amende mais n'ont pas été incarcérés, a ajouté le parquet, confirmant une information du Dauphiné libéré.

Par ailleurs, à Pau, un jeune homme de 19 ans interpellé en marge d'une manifestation lycéenne mardi a été condamné jeudi à 2 mois de prison ferme par le tribunal correctionnel.