Sexualité : ces trois chiffres qui montrent les inégalités hommes-femmes

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Romain David , modifié à
Invitée d'Europe 1, la sociologue Nathalie Bajos détaille les conclusions d’une grande enquête de Santé public France sur la sexualité des Français.
INTERVIEW

Voilà plus de dix ans qu'une telle étude n'avait pas été menée. Santé public France publie une grande enquête, Genre et sexualité d'une décennie à l'autre, conduite auprès de plus de 15.000 Français âgés de 15 à 75 ans. Ces conclusions "montrent que dès l'entrée dans la sexualité, c'est à dire dès le premier rapport sexuel, on voit deux modèles se dessiner entre les filles et les garçons", explique Nathalie Bajos, sociologue, directrice de recherche à l'Inserm et co-auteur de cette étude. Au micro d'Europe 1, cette spécialiste revient sur trois chiffres marquants, qui trahissent selon elle l'emprise des stéréotypes femmes-hommes sur la mise en place de la sexualité.

L'âge du premier rapport sexuel : 17 ans pour les garçons et 17 ans et 6 mois pour les filles

Si ces chiffres sont stables depuis une vingtaine d'années, "les motivations qui conduisent les jeunes à débuter leur vie sexuelle sont très différentes chez les filles et les garçons", souligne Nathalie Bajos. "Les filles, c'est plus par désir d'affectivité, de tendresse, d’amour, alors que pour les garçons c'est beaucoup plus le désir, le plaisir. On pourrait opposer une sexualité dite 'relationnelle' pour les filles et une sexualité dite 'nécessaire' pour les garçons, ce qui signe déjà qu'ils ont intégré des stéréotypes de genre sur la sexualité".

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Dans plus de 10% des cas, les filles n'avaient pas envie d'avoir leur premier rapport sexuel et ont cédé

"C'est, derrière ce chiffre, toute la problématique du consentement qui se dessine. C'est un enjeu très compliqué parce que le consentement va au-delà d'une simple expression binaire : 'je veux', 'je ne veux pas'. C'est quelque chose qui s'apprend, qui se construit", insiste la chercheuse. "Il est absolument important que les jeunes, et les moins jeunes, soient préparés à cet enjeu de savoir quels sont ses propres désirs, quels sont les désirs du partenaire, comment j'exprime mes désirs, verbalement ou par des gestes, comment je tiens compte du partenaire pour que la sexualité soit véritablement un acte entre deux personnes qui souhaitent vraiment, à ce moment-là, s'engager dans une relation sexuelle."

Les femmes déclarent 6 partenaires au cours de leur vie, les hommes presque 14

"Cet écart se réduit au fil du temps, mais reste toujours marqué", pointe Nathalie Bajos. "La définition d'un partenaire sexuel n'est pas la même chez les hommes et les femmes, parce que les femmes ne comptent que les hommes qui ont compté. Là encore, on renvoie à des représentations de la sexualité qui restent très différentes".

 

Une femme sur cinq déclare avoir été confrontée à un viol ou à une tentative de viol au cours de sa vie. Ce chiffre édifiant témoigne de "taux de déclarations de violences extrêmement élevés",  pointe Nathalie Bajos, et ce bien que l'enquête ait été conduite en 2016, avant le mouvement #MeToo.