"Sexe neutre" pour l'état civil : la Cour de cassation saisie mardi

La Cour de cassation se saisit mardi du cas d'un intersexe français qui souhaite voir figurer la mention "sexe neutre" sur son état civil.
La Cour de cassation se saisit mardi du cas d'un intersexe français qui souhaite voir figurer la mention "sexe neutre" sur son état civil. © RAMZI HAIDAR / AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Ni homme, ni femme, le cas d'un intersexe né il y a 65 ans "sans pénis ni vagin" est étudié mardi par la Cour de cassation. La mention "sexe neutre" sera-t-elle adoptée ? 

"Je ne suis pas homme, je ne serai jamais femme." La Cour de cassation se saisit mardi du cas d'un intersexe français qui souhaite voir figurer la mention "sexe neutre" sur son état civil, une requête validée en première instance puis cassée en appel.

Une absence de sexe. Né il y a 65 ans "sans pénis ni vagin", dépourvu de "gonades" (organes reproducteurs), "testicules ou ovaires", Gaëtan - un prénom d'emprunt - veut simplement "que soit reconnu" ce qu'il est "depuis la naissance", raconte-t-il. "Quand je me regarde nu dans un miroir, le matin ou le soir, je vois bien que je n'appartiens pas au monde des hommes ni à celui des femmes", poursuit ce psychothérapeute vivant dans l'est de la France. Une différence qui ne lui pose "pas de problème", quand bien même elle lui a fortement compliqué l'existence. A 6 ans, des médecins pratiquent sur lui une "exploration intestinale" en quête d'attributs sexuels, "sans rien trouver".

"La science des monstres". A 12 ans, son père explique à Gaëtan qu'il "relève de la tératologie", la science des monstres. Ce même père, protecteur malgré tout, l'emmènera "dans la DS" familiale se faire dispenser de service militaire après lui avoir caché la lettre de convocation, se souvient-il. Jusqu'à l'âge de 35 ans son apparence est androgyne, mais plutôt féminine, jusqu'à ce qu'il suive un traitement hormonal à base de testostérone afin notamment de prévenir l'ostéoporose. Quelques années plus tard, il se marie, puis adopte avec sa femme un enfant.

"Etre reconnu comme ce que je suis". "Je l'ai dit à mon fils quand il avait 17 ans. Il l'a très bien accepté, il n'y a eu aucun problème", raconte-t-il. La voie judiciaire s'est avérée plus chaotique. En août 2015, un juge aux affaires familiales de Tours, sa ville de naissance, accepte que la mention "sexe neutre" figure sur son état civil, pour la première fois en France. Mais la cour d'appel d'Orléans lui refuse ce droit en mars 2016, estimant notamment qu'admettre sa requête "reviendrait à reconnaître, sous couvert d'une simple rectification d'état civil, l'existence d'une autre catégorie sexuelle". "L'être humain existe au-delà de son sexe, qui n'est qu'une petite partie de sa physiologie", répond Gaëtan, qui "espère" que la Cour de cassation "ira dans le sens du jugement de première instance."

"En harmonie avec la société". Cette procédure, "c'est pour me sentir bien à l'intérieur de moi-même, pour me sentir en harmonie avec la société, pour être reconnu comme ce que je suis", affirme-t-il. "Ce n'est qu'une rectification de ce qui ne devrait pas être." Plusieurs pays dont l'Allemagne (2013), la première en Europe, l'Australie (2014) ainsi que le Népal, ont reconnu un troisième sexe ou genre, encore appelé sexe neutre ou intersexe, ni masculin ni féminin. La France a été condamnée à trois reprises en 2016 par l'ONU, notamment par son Comité contre la torture, pour des opérations faites sur des enfants afin de leur attribuer un sexe masculin ou féminin. Parmi les "nombreux combats à mener" pour les droits des personnes LGBT, François Hollande a cité vendredi l'interdiction de ces opérations "qui sont de plus en plus largement considérées comme des mutilations".