L'enlèvement du baron Empain : "Pour lui, les méchants étaient ceux qui étaient dehors"

Une Une de Paris Match avec une photo Édouard-Jean Empain (à gauche) et une photo-portrait du baron (à droite).
Une Une de Paris Match avec une photo Édouard-Jean Empain (à gauche) et une photo-portrait du baron (à droite). © AFP
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Guillaume Perrodeau , modifié à
Chez Christophe Hondelatte, l'avocat du baron Empain, Me Jean-Yves Dupeux, revient sur l'état d'esprit de son client à l'époque des faits, après sa libération.

Dans les années 1970, les enlèvements contre rançon étaient courants. Et celui du baron Édouard-Jean Empain, en 1978, n'a pas manqué de défrayer la chronique. Libre après 63 jours de captivité, le retour à la vie réelle fut, lui aussi, éprouvant. Chez Christophe Hondelatte, son avocat, Me Jean-Yves Dupeux, revient sur cet épisode qui changea la vie du baron à tout jamais.

80 millions de francs de rançon. Le baron Édouard-Jean Empain est enlevé avenue Hoche, à Paris, le 23 janvier 1978. Ses ravisseurs veulent montrer qu'ils ne plaisantent pas. On lui coupe l'auriculaire, qui sera adressé aux collaborateurs de l'entreprise quelques jours plus tard, accompagné d'une lettre réclamant une rançon de 80 millions de francs et une menace : "Aujourd'hui vous avez reçu un doigt, mais par la suite, nous n'hésiterons pas à vous envoyer un pied ou un œil". "Une fois libéré, où qu'on aille, dans une réception ou un restaurant, tout le monde fixait son petit doigt", se souvient Me Jean-Yves Dupeux.

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Me Jean-Yves Dupeux et Christophe Hondelatte ©

"À ses yeux à l'époque, on a mégoté, barguigné, concernant la rançon". Il faut dire qu'à l'époque, l'affaire fait rapidement la une des journaux. L'homme n'est pas n'importe qui : riche héritier et PDG du groupe Empain-Schneider, qui employait à l'époque 150.000 personnes, il est aussi un ami personnel du président Valéry Giscard d'Estaing. Et outre l'affaire, la vie du baron va donc vite intéresser la presse. Sa passion pour le poker, mais surtout ses relations extra-conjugales, sont dévoilés aux yeux de tous.

Après 63 jours, l'enfer du baron prend fin. Lors d'un échange de fausse rançon planifié par la police, un ravisseur est tué, un autre arrêté, ce qui permet dans les heures qui suivent la libération d'Édouard-Jean Empain. La fin du cauchemar ? Pas totalement. "Je savais que tu allais sortir ce soir", lui lance sa femme en guise de seul et unique accueil. Les révélations de la presse sur la vie privée du baron ont laissé des traces dans son couple, auprès de sa famille et au niveau de son entreprise, affectant son image.

Le baron Édouard-Jean Empain ne supporte pas l’accueil qui lui est réservé après sa libération, ni la manière dont ses proches ont géré les opérations pour le libérer. "À ses yeux à l'époque, on a mégoté, barguigné, au niveau d'une rançon, alors que sa vie en dépendait", explique Me Jean-Yves Dupeux. "Pour lui, les méchants étaient ceux qui étaient dehors : sa famille, les associés, les membre du groupe".

 

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"Il ne fait pas preuve de haine à l'égard de ces accusés". À l'inverse, pendant le procès de ses ravisseurs, il fait preuve de mansuétude. "Il ne montre pas de haine à l'égard de ces accusés", confie Me Jean-Yves Dupeux. "Ce n'était pas un pardon", tient à préciser l'avocat, "mais il a expliqué que pendant un temps, il avait vécu deux mois et demi avec ces gens-là, les ravisseurs, et il avait considéré que ceux qui le retenaient et le maintenaient en vie étaient les bons". Une sorte de syndrome de Stockholm, qui a poussé le baron Édouard-Jean Empain loin de la France, de son entreprise et de sa famille, pendant sept mois. "Il a vécu ces moments de manière très pénible. Il en reparlait, avec le recul, mais c'était quelque chose qu'il voulait oublier". Après son enlèvement, le baron Empain a vendu ses parts et s'est reconverti dans l'immobilier. Il est mort en juin dernier.