La disparition des langues mortes au collège inquiète

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Fabienne Cosnay et Virginie Salmen , modifié à
COLLÈGE - Les élèves ne pourront plus prendre l'option latin ou grec à la rentrée 2016, ce qui inquiète les professeurs. Et pas seulement eux.

La réforme du collège, qui doit entrer en application à la rentrée 2016, suscite des mécontentements. Le projet, encore en discussion avec les syndicats, prévoit la suppression de l'option langues anciennes. Concrètement, les élèves ne pourront plus choisir d'étudier le latin ou le grec en classe de cinquième comme c'est le cas aujourd'hui.

Un enseignement réduit à peau de chagrin ? L'étude des langues anciennes se poursuivra via un enseignement pratique interdisciplinaire (EPI) intitulé "Langues et cultures de l'Antiquité". Les élèves pourront suivre ce cours de la cinquième à la troisième. Mais pour combien d'heures ? Le ministère de l'Education nationale ne l'a pas encore précisé.

Du côté des profs de lettres classiques, on redoute un enseignement du latin et du grec réduit à peau de chagrin. "Certes, on va pouvoir enseigner la culture liée à l'Antiquité mais est-ce qu'on va continuer à apprendre la structuration de la langue ?", explique à Europe 1 Claire Laimé-Couturier, professeure de latin. Comme beaucoup de ses collègues, l'enseignante redoute qu'on n'apprenne plus vraiment la langue latine mais qu'on se contente d'un saupoudrage d'étymologie et d'histoire romaine.

"Non à la mort des humanités et du latin !". Sur Twitter, les hashtags "#jesuislatiniste" ou "#je suishelleniste" ont fait leur apparition pour défendre les langues anciennes. "On enseigne le latin en France depuis des siècles ! Non à la mort des humanités et du latin !", s'offusque une internaute. "Terrible pouvoir d'un ministre de raser notre héritage culturel", renchérit un autre. Quelques internautes en profitent pour adresser des citations célèbres en latin ou en grec à Najat Vallaud-Belkacem.

Aujourd'hui, 17% des collégiens suivent l'option latin ou grec au collège. Cette option est proposée aux élèves à partir de la classe de cinquième, à raison de deux heures par semaine, puis trois heures en quatrième et troisième. Et contrairement à ce qu'on entend souvent, les profs réfutent l'idée d'un enseignement élitiste. "Le latin et le grec ont pu, à un moment, être les options que l'on destinait prioritairement aux élèves dont les résultats frisaient l'excellence mais il suffit de mettre les pieds aujourd'hui dans une classe de latin d'un collège lambda pour comprendre que ce n'est plus du tout le cas", écrit Anne-Sophie Baciocchini, enseignante de lettres classiques au collège dans un billet de blog publié sur Le Huffington Post.

Rendre le latin plus accessible. Contactée par Europe 1, Florence Robine, directrice générale de l'enseignement scolaire au ministère de l'Education nationale, justifie cette réforme par la volonté de rendre les langues mortes accessibles à davantage d'élèves. "Est-ce que la question du niveau est si importante que ça ?" interroge Florence Robine. "Ce que je souhaite, c'est qu'il y ait davantage d'élèves qui aient envie de poursuivre le latin ou le grec au lycée". Aujourd'hui, seulement 7% des collégiens continuent leur apprentissage d'une langue ancienne au lycée.

Un rendez-vous au ministère. Les défenseurs du latin et du grec ont demandé un rendez-vous au ministère de l'Education nationale pour obtenir des garanties. Car ils le disent : une version de latin, c'est aussi utile que de résoudre un problème de maths.

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