Ivan Jablonka a retracé la vie d'une jeune femme "intensément vulnérable", lundi sur Europe 1. 1:06
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M.L , modifié à
Dans "Laëtitia ou la Fin des hommes", l'écrivain, lauréat du prix Médicis, raconte l'histoire de Laëtitia Perrais, assassinée par Tony Meilhon en 2011. 
INTERVIEW

Il est l'auteur d'un ovni littéraire :  ni vraiment un roman, ni vraiment un ouvrage d'investigation, mais un portrait sensible de Laëtitia Perrais, la jeune femme assassinée par Tony Meilhon en 2011. Pour écrire Laëtitia ou la Fin des hommes, publié chez Seuil, Ivan Jablonka a été auteur, mais aussi sociologue et historien, s'attachant à retracer la vie d'une victime dont on n'avait retenu que la mort.  Récompensé par le prix Médicis la semaine dernière, il était l'invité du Club de la Presse d'Europe 1, lundi.

"C'est un fait d'histoire". "Le fait qu'une jeune fille de 18 ans se fasse massacrer, ce n'est pas une anecdote, c'est un fait social, c'est un fait d'histoire", explique Ivan Jablonka lorsqu'on l'interroge sur son choix de raconter l'histoire de Laëtitia. "Cela nous interroge sur la vulnérabilité des enfants, sur les violences subies par les femmes et ça remonte à des siècles." Celui qui a "beaucoup travaillé sur les enfants de l'assistance publique" a vu en cette victime, placée en famille d'accueil dans son enfance, "la petite sœur de tous les enfants que j'ai étudiés, qui vivaient au XIXe ou au XXe siècle."

"Elle était intensément vulnérable". Cette enfance difficile a façonné la personnalité de Laëtitia telle que l'a découverte Ivan Jablonka. "Les gendarmes ont établi qu'elle avait employé la dernière journée de sa vie à suivre celui qui allait devenir son meurtrier : elle était intensément vulnérable, elle n'a pas vu le danger", raconte-t-il. "Son système de défense avait été désactivé dès la petite enfance." Pour autant, l'auteur n'estime pas avoir décrit une existence malheureuse. "Laëtitia allait boire des cocas en terrasse avec ses copines, avait des petits copains, elle s'en sortait", assure-t-il.

Entendu sur europe1 :
Je ne suis pas fasciné par le sang, encore moins par le criminel

"Notre fille morale". Pourquoi avoir choisi de n'interroger que les proches de la victime, sans rencontrer son bourreau ? "Je ne suis pas fasciné par le sang, encore moins par le criminel, c'est un livre sur la vie de Laëtitia", justifie l'auteur. "Je voulais que toute ma fascination, ma tendresse peut-être, lui aille à elle, certainement pas à son meurtrier." Père de trois filles, Ivan Jablonka insiste : "Laëtitia c'est nous tous, c'est une France silencieuse, périurbaine, dont on parle très peu. Laëtitia aurait pu être notre fille, et d'une certaine manière, c'est notre fille morale."