Flavie Flament : les viols de mineurs sont "d'une effroyable banalité"

Flavie Flament crédit : XAVIER LEOTY / AFP - 1280
Flavie Flament évoque son combat pour faire interdire l'oeuvre du photographe David Hamilton en France © XAVIER LEOTY / AFP
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avec AFP
Flavie Flament, victime de viols par David Hamilton lorsqu'elle était enfant, raconte l'accord tacite entre sa mère et le photographe. 

Depuis la parution en 2016 de La consolation, livre autobiographique de Flavie Flament, les langues se sont déliées. L'animatrice se dit "effarée" de découvrir combien les viols de mineurs "sont d'une effroyable banalité".

Un livre pour raconter son viol. Dans son livre, dont l'adaptation en téléfilm sera diffusée mardi sur France 3, l'animatrice de RTL s'est libérée du terrible secret qui la rongeait depuis ses 13 ans : avoir été violée par le célèbre photographe anglais, David Hamilton, qui a nié les faits. Elle cherche désormais à faire interdire la diffusion de ses livres en France, comme c'est le cas au Royaume-Uni.

"J'ai écrit le livre dans une vraie forme de solitude et, seule sur ce chemin, j'ai été rejointe par une foule, une armée" de victimes de pédophiles, dit-elle à l'AFP : "Nous sommes si nombreux, c'est dingue !". Près de 4% des femmes et 0,6% des hommes en France déclarent avoir été victimes de viols ou de tentatives de viol au cours de leur vie, plus de la moitié des femmes et les trois quarts des hommes étaient mineurs.

Des viols que sa mère "ne pouvait pas ignorer". Dans le téléfilm qu'elle a co-écrit avec Magaly Richard-Serrano, primé au Festival de la Rochelle, l'animatrice rappelle une scène "importante". Sa mère, interprétée par une Léa Drucker époustouflante, livre sa fille au photographe qui ouvre la porte tout nu, et sans ciller lui demande : "Je viens la chercher à quelle heure ?". "La première réaction normale aurait été de prendre son enfant par la main et de partir en courant !", ajoute-t-elle, soulignant qu'elle n'a pas vu sa mère depuis dix ans. 

"Un polaroïd, un viol". Une photographie signée d'Hamilton était tendue à sa mère après les séances durant lesquelles elle était violée. "C'était le prix qu'il payait", dit-elle, "ma mère donnait son assentiment aux choses qu'elle ne pouvait pas ignorer". 

Elle évoque l'"emprise psychologique" de "l'accord tacite" entre la mère et le photographe, qui muselle la parole de l'enfant. "Un polaroïd, un viol", résume Flavie Flament dans "Mon combat contre l'oubli", le documentaire qui sera diffusé mardi à la suite du téléfilm et le 15 novembre sur France 5.

Un combat mené pour les autres victimes du photographe. Elle s'est tu longtemps, refoulant ses souvenirs, "enfermés à double-tour en soi", c'est "l'amnésie traumatique", poursuit-elle. Jusqu'à ce qu'un choc affectif vienne rompre le verrou. Pour elle, ce fut le décès "absolument dévastateur" de son grand-père en 2009. Après six années de psychanalyse, à laquelle elle a recours avant d'en "crever", les vannes s'ouvrent.

"Mon combat, je le mène aussi pour les autres victimes d'Hamilton", fait-elle valoir. Certaines ont eu la force de témoigner et apparaissent dans son documentaire. "Mon prédateur était connu et je l'étais moi aussi. Mais si j'avais été une anonyme...", songe-t-elle.

Rendre l'oeuvre d'Hamilton "infréquentable". Flavie Flament regrette que les livres d'Hamilton soient encore vendus en France. "Ce sont des images de gamines violées !", s'insurge-t-elle, en affirmant que l'un de ses combats reste de rendre son oeuvre "infréquentable". "Je vais tourmenter le prédateur jusque dans la mort", assure-t-elle. À l'annonce du suicide d'Hamilton, le 25 novembre 2016, dans son appartement parisien, elle a éprouvé une "colère froide". Elle aurait tant voulu le voir "à 83 ans, dans un prétoire".