Etudiant éborgné à Rennes en 2016 : non-lieu pour les deux policiers

Les investigations confiées à l'IGPN n'auraient pas permis "d’identifier avec certitude l’auteur du tir de LBD".
Les investigations confiées à l'IGPN n'auraient pas permis "d’identifier avec certitude l’auteur du tir de LBD". © Valery HACHE / AFP
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avec AFP
Un non-lieu a été prononcé par la justice pour les deux policiers mis en cause dans l'enquête sur un étudiant de 20 ans éborgné par un tir de LBD lors d'une manifestation à Rennes en avril 2016. Jean-François Martin, l'étudiant blessé, avait perdu l'usage de son oeil gauche qui avait dû être énucléé. 

La justice a prononcé un non-lieu pour les deux policiers mis en cause dans l'enquête sur Jean-François Martin, un étudiant éborgné par un tir de LBD à Rennes en 2016, l'auteur n'ayant pu être "identifié avec certitude", a-t-on appris vendredi auprès du parquet de Rennes.

L'auteur du tir de LBD n'aurait pas pu être identifié "avec certitude"

L'étudiant en géographie, alors âgé de 20 ans, avait été blessé lors d'une manifestation le 28 avril 2016 par un tir de LBD 40 (lanceur de balles de défense) et avait perdu l'usage de son oeil gauche, qui avait dû être énucléé. Deux policiers, Nicolas P. et Anthony P., avaient fait usage de leur arme au moment des faits et placés sous le statut de témoin assisté pour "violences volontaires ayant entraîné une infirmité ou une mutilation permanente par personne dépositaire de l'autorité publique".

Le 29 mai, le juge d'instruction a conclu à un non-lieu, suivant les réquisitions du parquet, a indiqué le procureur de la République de Rennes, Philippe Astruc, précisant que la victime avait fait appel de cette décision. Selon l'ordonnance consultée par l'AFP, les investigations confiées à l'IGPN n'ayant pas permis "d’identifier avec certitude l’auteur du tir de LBD (...), il ne pourra être prononcé qu'un non-lieu".

"L’usage de la force a été fait à bon droit en regard des violences et voies de faits importantes qui ont été commises par les manifestants à l’adresse des forces de l’ordre dans un temps contemporain des faits", précise le procureur.

"Le juge d'instruction a prêté la main à la loi du silence"

"Je m'y attendais, il y a une forme de lassitude face à une justice très lente", a réagi Jean-François Martin. "On déploie des moyens gigantesques pour retrouver un manifestant masqué au milieu de 5.000 personnes mais on n'est pas capable de retrouver le policier avec une arme", lâche-t-il.

Pour son avocat Arié Alimi, "il s'agit d'une défense assez classique de la part d'un policier d'empêcher d'identifier l'auteur de l'infraction, notamment dans le maintien de l'ordre". "Ce qui est dramatique, c'est qu'il incombait aux policiers soit de se dénoncer, soit de témoigner l'un contre l'autre, mais visiblement il règne une omerta et il est regrettable que le juge d'instruction ait prêté la main à la loi du silence", a-t-il ajouté.

En janvier, le Défenseur des droits Jacques Toubon avait réclamé des poursuites disciplinaires contre les deux policiers "pour usage disproportionné de la force". Il avait souligné que les policiers n'avaient pas "rendu compte de manière précise des circonstances dans lesquelles ils ont fait usage de leur arme".