"Blanchiment de fraude fiscale" : l'ex-diplomate Boris Boillon fixé sur son sort vendredi

Face à son arrogance et son absence de regrets sincères, le parquet a requis 18 mois de prison avec sursis contre l'ancien diplomate
Face à son arrogance et son absence de regrets sincères, le parquet a requis 18 mois de prison avec sursis contre l'ancien diplomate © FETHI BELAID / AFP
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avec AFP , modifié à
Boris Boillon a assuré avoir fait office d'intermédiaire pour une société irakienne qui, respectant les coutumes orientales, lui aurait remis la somme de 400.000 euros en liquide.

Le tribunal correctionnel de Paris dira vendredi si l'ancien diplomate et "Sarko boy" Boris Boillon s'est rendu coupable de "blanchiment de fraude fiscale" en transportant clandestinement quelque 400.000 euros en liquide à l'été 2013.

Arrêté en possession de 350.000 euros et 40.000 dollars. L'ancien conseiller du président Nicolas Sarkozy avait été interpellé par des douaniers à la gare du Nord à Paris le 31 juillet 2013 en possession de 350.000 euros et 40.000 dollars en espèces, non déclarés, alors qu'il s'apprêtait à monter dans un train pour la Belgique. L'ex-diplomate, qui fut notamment ambassadeur de France à Tunis, est poursuivi pour "blanchiment de fraude fiscale, "faux et usage de faux", "abus de biens sociaux" et "manquement à l'obligation déclarative de transfert de capitaux".

Il risque jusqu'à cinq ans de prison. Le code des douanes impose de déclarer tout transfert international en liquide à l'intérieur de l'Union européenne au-delà de 10.000 euros sous peine d'amende. L'ex-diplomate encourt jusqu'à cinq de prison et d'importantes amendes pour les autres chefs de poursuite.

Un accusé arrogant. Le procureur a requis 18 mois de prison avec sursis et l'interdiction pour cinq ans d'exercer toute activité dans la fonction publique en fustigeant "l'arrogance" de Boris Boillon, devenu homme d'affaires, qui a vu dans l'action des douaniers un "complot" contre lui et n'a exprimé à l'audience que des "regrets nombrilistes". "Je vous demande de lui faire barrage, de lui interdire de reprendre des activités diplomatiques", a lancé le magistrat soulignant "l'incompatibilité totale" entre les faits reprochés et la nécessaire "probité des représentants de l'État".

Boris Boillon "a travaillé" et a "été payé pour cela", a assuré son avocat Me Jean Reinhart en plaidant la relaxe pour l'ensemble des poursuites, à l'exception de l'amende douanière qui s'élève à un quart de la somme saisie, soit 95.036 euros et 50.000 euros au titre de l'impôt sur le revenu.

Seulement un intermédiaire ? À 47 ans, Boris Boillon, muscles saillants sous un costume ajusté, a raconté à l'audience qu'il se trouvait au moment des faits en "apesanteur" entre l'Irak, où il avait lancé une activité de conseil, et la France. Il affirme avoir gagné l'argent en faisant office d'intermédiaire pour une société irakienne, en particulier dans un grand projet de BTP - autour duquel flotte un "lancinant parfum de corruption", selon le président du tribunal Peimane Ghaleh-Marzban. La somme lui aurait été remise en mai 2013 par un homme d'affaires irakien sous forme de quatre "pains" plastifiés de billets neufs. Billets qui tomberont dans le filet des douanes.

L'ex-diplomate a justifié des transactions en liquide par les défaillances du système bancaire irakien et les coutumes orientales : "À Rome, on fait comme les Romains", a-t-il dit avec aplomb. Il a également assuré "les yeux dans les yeux", reprenant l'expression malheureuse de l'ex-ministre du budget Jérôme Cahuzac condamné pour fraude fiscale et blanchiment, qu'il était sur le point de régulariser l'argent liquide qu'il transportait lorsqu'il a été arrêté.

Un acharnement. Le procureur a balayé ces dénégations et dépeint un homme "prêt à recommencer" si l'occasion se présentait. Me Reinhart a au contraire dénoncé un acharnement contre son client, qui "paye le fait d'avoir été ambassadeur" et de faire depuis des affaires, même si tout est "légal". "Toucher une commission" pour avoir facilité un contrat, comme "un agent immobilier prend 5%" d'une vente, "c'est toujours très choquant" pour l'opinion, a-t-il avancé.