Bac philo 2017 : les corrigés de Raphaël Enthoven

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Le professeur de philosophie et chroniqueur d'Europe 1 propose son analyse des sujets du Bac 2017 pour les séries L, S et ES.
LA FRANCE BOUGE

Il est professeur de philosophie et chroniqueur aussi. Raphaël Enthoven intervient chaque matin dans la matinale d’Europe 1 pour sa "Morale de l’info". Jeudi, dans la social room d'Europe1, il a livré à chaud son analyse des sujets sur lesquels 363.000 élèves des filières générales ont planché pour le baccalauréat 2017. Retrouvez l'intégralité de ses corrigés dans la vidéo ci-dessus.

Série S : "Défendre ses droits, est-ce défendre ses intérêts ?"

Sur ce sujet, une problématique se dégage selon Raphaël Enthoven : "A première vue, défendre ses droits, c'est défendre le droit. Donc si défendre ses droits, c'est défendre le droit, de quel droit réduit-on la défense du droit au calcul d'intérêt ?", se demande-t-il jeudi sur Europe 1.

Pour lui la dissertation peut s'articuler de cette façon. Dans un premier temps, il s'agit d'expliquer que ce n'est pas défendre ses droits qui revient à défendre ses intérêts, mais c'est la défense de ses intérêts qui défend le droit lui-même. "Si, dans le procès qui vous oppose à un promoteur immobilier, vous défendez le droit de ne pas vendre votre maison, c'est sur la loi que vous vous appuyez pour le faire. Certes, vous défendez vos intérêts mais en vertu de la loi. Vous contribuez ainsi à affermir la loi en l'appliquant à votre cas. C'est le principe de la jurisprudence. Ce qui vous arrive a force de loi".

Dans un deuxième temps, il est intéressant pour le philosophe d'expliquer que défendre ses intérêts, c'est défendre le droit quand ses intérêts ne contreviennent pas au principe d'égalité. "Je me souviens au moment de l'affaire des salariés d'Air France qui avaient arraché la chemise de leur DRH, Jean-Luc Mélenchon avait hurlé en disant qu'il était scandaleux d'arrêter ces gens là car le caractère de leur lutte venait s'interposer. La nature même de leur lutte devant leur valoir l'indulgence. Or ce raisonnement ne tient pas. Cela revient à défendre qu'au nom de l'égalité, la loi ne soit pas la même pour tous", explique t-il.

Le plan proposé :

1-Il est dans l'intérêt de tous de défendre le droit de chacun

2-La défense des droits n'est pas seulement la défense de mes droits

3-Défendre mes droits est inséparable du fait que tout le monde jouisse des mêmes droits

Série S : "Peut-on se libérer de sa culture ?"

"Ce qui est intéressant, ici, c'est que cela sous entend que la culture correspond au sentiment d'enfermement", souligne jeudi Raphaël Enthoven. Il rappelle notamment que se libérer de sa culture était le projet des Lumières. "Si l’humain n’est rien par nature, alors l’homme s’engendre lui-même, puisant dans ses propres facultés. En un mot : l’autonomie individuelle est la norme suprême", explique-t-il. Mais pour autant, il s'interroge : "Et si l'arrachement lui-même était une injonction de ma propre culture ?". 

Le plan proposé :

1-L'autonomie individuelle est la norme suprême

2-Est ce se libérer de sa culture que de s'arracher ainsi ?

3-Se libérer de sa culture, c'est savoir la remettre à sa place

Série L : "Suffit-il d'observer pour connaître ?"

Pour ce sujet, Raphaël Enthoven fait appel à Voltaire et au conte philosophique Zadig. Voltaire, dans ce chapitre, reprend l'idée que l'observation est le vecteur de la connaissance quand elle est médiée par un raisonnement rigoureux. "On a tout sous les yeux, mais la différence se fait dans la façon que l'on a d'interpréter les choses. On voit tout, mais on ne regarde pas tout. Regarder c'est observer et réfléchir en même temps", détaille le philosophe.

Le plan proposé :

1-L'observation permet la connaissance

2-L'observation est trompeuse

3-L'observation devient connaissance quand elle est étayée par la rigueur d'un raisonnement.

 

Série L : "Tout ce que j'ai le droit de faire est-il juste ?"

Pour le philosophe, c'est le sujet d'actualité par excellence. "On peut traiter uniquement ce sujet avec l'affaire Fillon", assure-t-il, faisant référence aux reproches fait à l'ancien candidat à la présidence de la République d'avoir embauché sa femme et ses enfants. "C'était légal - si toutefois il ne s'agit pas d'un emploi fictif - c'était conforme à la justice, mais cette stricte équivalence du droit et de la justice (aux yeux bandés) se heurte à l'exigence démocratique d'exemplarité", détaille Raphaël Enthoven.

Le plan proposé :

1- Tout ce que j'ai le droit de faire est conforme à la justice

2- Cette stricte équivalence du droit et de la justice se heurte à l'exigence démocratique d'exemplarité

3- Cantonner l'existence à ce que j'ai le droit de faire est source de l'injustice sociale. La justice est inséparable de l'engagement dans la cité.

 

Série ES : "La raison peut-elle rendre raison de tout ?"

Pour ce sujet, le philosophe cite Hegel : "Si quelque chose échappait au concept, il faudrait y voir le plus grand malheur". "Ce que dit Hegel ici, c'est que tout s'explique. Mais est-ce qu'en l'expliquant, on dit vraiment tout de ce que l'on explique ?" questionne Raphaël Enthoven.

Le plan proposé :

1- La raison est toute puissante

2- Ce qui se comprend n'est pas ce qui s'explique

3- Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas 

Série ES  : "Une oeuvre d'art est-elle nécessairement belle ?"

"Dans un premier temps on peut penser qu'il est complètement idiot de dire ça car cela signifierait suspendre la beauté d'une oeuvre à la beauté de son modèle. Or la beauté de la Joconde dépend-elle du physique de Mona Lisa ?", s'interroge Raphaël Enthoven. "La beauté n'est pas seulement la représentation d'une belle chose mais elle est dans la belle représentation", explique-t-il dans la Social Room d'Europe 1.

Le plan proposé :

1- La beauté d'une oeuvre dépend du modèle

2- La beauté peut se détacher de son modèle et être dans la belle représentation d'une chose

3- L'émotion permet de distinguer une oeuvre d'art d'un simple exercice narcissique