Valls : "oui, la France est en guerre contre le terrorisme"

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Devant l’Assemblée, le Premier ministre a formulé un ensemble de propositions visant à améliorer la lutte contre le terrorisme ainsi qu’à enrayer les voies de radicalisation.

"Après le temps du recueillement –il n’est pas fini-, vient le temps de la lucidité et de l’action ". C’est par ces mots, que mardi, après une standing ovation, le Premier ministre Manuel Valls s’est exprimé devant l’Assemblée nationale, en conclusion d’une séance spéciale d'hommage aux 17 victimes des attaques terroristes qui ont secoué la capitale en fin de semaine dernière. Devant l’hémicycle, le chef du gouvernement a précisé un ensemble de propositions évoquées dès lundi, visant à lutter contre le terrorisme. Les services de renseignement, le milieu carcéral et les sites internet extrémistes apparaissent au cœur de cet éventail de mesures qu’Europe 1 vous détaille.

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"Oui, la France est en guerre contre le terrorisme"

Après avoir salué la mémoire des victimes des attaques et "l’abnégation de toutes les forces de l’ordre", le Premier ministre a repris la parole à l’issue d’une longue salve d’applaudissements. "Il faut toujours dire les choses clairement : oui, la France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l’islamisme radical", a clairement énoncé Manuel Valls, avant de nuancer ses propos, contre tout risque d’amalgame. "La France n’est pas en guerre contre une religion, la France n’est pas en guerre contre l’Islam et les musulmans", a-t-il poursuivi.

 Le chef du gouvernement a aussi mis en garde contre tout risque de "précipitation". "A une situation exceptionnelle doivent répondre des mesures exceptionnelles. Mais je le dis aussi avec la même force : jamais des mesures d’exceptions qui dérogeraient aux principes du droit et des valeurs. La meilleur des réponses au terrorisme (…) c’est le droit, c’est la démocratie, c’est la liberté et c’est le peuple français. Nous devons apporter des réponses aux victimes, aux familles, aux Français. Il faut le faire, avec détermination, sérénité, sans jamais céder à la précipitation".

La prison, le renseignement, le suivi et Internet

En prison : des quartiers spécifiques d’ici fin 2015. La première des mesures annoncées par le Premier ministre concerne les prisons, le passage en milieu carcéral étant aujourd’hui un facteur de radicalisation reconnu, notamment pour les frères Kouachi, Amédy Coulibaly, mais aussi pour Mehdi Nemmouche, l’auteur de la tuerie du Musée juif de Bruxelles, en mai dernier. Ainsi Manuel Valls a annoncé la création "avant la fin de l'année" de "quartiers spécifiques" en prison pour les détenus "radicalisés". "La surveillance des détenus considérés comme radicalisés sera organisée dans des quartiers spécifiques créés au sein d'établissements pénitentiaires", a précisé le Premier ministre.

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Pour le renseignement : un renforcement régulier. C’est l’éternelle question, à chaque acte terroriste. Y-a-t-il eu une faille des services de renseignement ? Le Premier ministre a éludé la question mardi, en expliquant qu’il fallait "tirer des leçons" des attentats de la semaine dernière. Ainsi, il faut "d'abord prendre conscience que la situation change en permanence et que les services en charge du renseignement intérieur et la juridiction anti-terroriste doivent être régulièrement renforcés", a affirmé Manuel Valls, alors que deux lois antiterroristes ont été adoptées en deux ans, dont la dernière en novembre dernier.

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Mais "sans renforcement très significatif des moyens humains et matériels, les services de renseignement intérieur pourraient se trouver débordés. On dépasse désormais 1.250 individus pour les seuls filières irako-syriennes", a-t-il relevé. "Nous affecterons donc les moyens nécessaires pour tenir compte de cette nouvelle donne", a assuré le Premier ministre, qui a rappelé la création prévue de 432 emplois à la DGSI. "Ils doivent permettre de renforcer les compétences et de diversifier les recrutement : informaticiens, analystes, chercheurs ou interprètes", d'après le locataire de Matignon.

Un meilleur suivi : un fichier en France, vers une collaboration européenne ?  Améliorer le renseignement, c’est aussi faire évoluer le suivi des personnes à risques. Dans ce sens, Manuel Valls a formulé deux propositions à l’échelon national, comme européen. En France, le Premier ministre souhaite la mise en place d'un "nouveau fichier" recensant les personnes condamnées pour terrorisme ou "membres d'un groupe de combat". "Il obligera les personnes condamnées à des faits de terrorisme ou ayant intégré des groupes de combat terroristes à déclarer leur domicile et à se soumettre à des obligations de contrôle", a-t-il précisé.

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A l’échelon européen, Manuel Valls a annoncé que le dispositif français en vue de la mise en place d'un système européen sur les échanges de données des passagers européens (PNR) sera prêt en septembre 2015. "Au cours de l'année, nous lancerons également la surveillance des déplacements aériens des personnes suspectes d'activités criminelles", a-t-il assuré.  Ce projet de système dit PNR (Passenger name record, données des dossiers passagers) est actuellement gelé au Parlement européen.

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Sur Internet : un contrôle contre l’embrigadement. Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, dispose de huit jours pour remettre au Premier ministre des propositions concernant le contrôle d'Internet.

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"Elles devront concerner notamment Internet et les réseaux sociaux, plus que jamais utilisés pour l'embrigadement, la mise en contact et l'acquisition de techniques permettant de passer à l'acte", a assuré Manuel Valls.