Tara, géante française dans l’Arctique

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G.S. avec AFP , modifié à
Le plus grand voilier polaire français s'est élancé pour un périple de 25.000 km de sept mois.

L'objectif. A l'extrémité de la presqu'île de Keroman à Lorient, devant les titanesques bunkers en béton de l'ancienne base des sous-marins allemands de la Kriegsmarine, la goélette océanographique Tara a largué les amarres, dimanche, pour un tour complet de l'océan Arctique. Le plus grand voilier polaire français vient de s'élancer dans les très hautes latitudes en quête de l'infiniment petit à l'origine de la vie sur terre. L'objet du voyage, en effet, est d'étudier les phytoplanctons (virus) et zooplanctons locaux (larves de poissons), organismes soumis à l'épreuve du réchauffement climatique. L'année dernière, la banquise d'été a enregistré un record de fonte historique. En septembre 2012 ne subsistaient plus que 3,4 millions de km2 de glace contre 15 millions de km2 au coeur de l'hiver.

Un voyage (quasi) inédit... Cette nouvelle aventure scientifique baptisée "Tara Océans Polar Circle" conduira les marins et scientifiques du deux-mâts de Russie au Canada, Alaska et Groenland, pour un périple de 25.000 km qui durera sept mois. Le voilier empruntera les fameux passages du Nord-Est (au large de la Sibérie) et du Nord-Ouest (au large du Canada), rendus à la navigation depuis quelques années pendant la fonte de la banquise en été. "Le seul océan dont nous n'avons pas encore exploré le plancton durant la précédente étude est l'Arctique", explique Romain Troublé, secrétaire général de Tara Expéditions et chef d'orchestre de la mission. "Seuls deux voiliers de plaisance ont, jusqu'à présent, fait le tour complet de l'Arctique d'une seule traite", ajoute-t-il. "Ce sera une navigation difficile, voire ici et là audacieuse, au milieu des plaques de glace dérivantes poussées par le vent".

... Et périlleux. "C'est une navigation complexe avec une visibilité souvent réduite en raison du brouillard. L'année dernière, une énorme dépression s'était longuement installée au milieu de l'Arctique, générant des vents puissants et une houle redoutable. Tara (36 mètres), avec sa coque arrondie en aluminium, ses deux robustes moteurs totalisant 700 CV, est conçue pour la glace, mais attention à ne pas s'y faire emprisonner", détaille Romain Troublé. Si c'était le cas, la goélette devrait faire appel aux brise-glaces russes ou canadiens pour se dégager. Le jeune commandant de Tara, Loïc Valette, 35 ans, capitaine au long cours, a navigué sur toutes les mers du monde à l'exception des pôles: "C'est une nouvelle aventure exaltante", confie-t-il, "une irremplaçable expérience pour un navigateur, le sommet de la qualification hauturière". "J'ai hâte de voir mon premier iceberg devant l'étrave de Tara. J'en rêvais, enfant, en lisant les récits des premiers explorateurs de la planète glacée".