Quand les entreprises espionnent leurs salariés

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avec Guillaume Biet et Martin Choteau , modifié à
DECRYPTAGE - De nombreuses entreprises paient pour obtenir des informations sur leurs employés.

Les derniers exemples en date viennent d'Ikea et de Disney, deux grosses entreprises suspectées d'avoir "fliquer" certains salariés. Pour obtenir les informations qu'elles désirent, elles font appel à des officines privées, des petites structures souvent créées par d'anciens policiers ou gendarmes.

Le but officiel est d'assurer la sécurité de son entreprise et de se protéger contre l'espionnage industriel. Mais discrètement, ces officines se vantent aussi de pouvoir fournir des informations auxquelles seuls des fonctionnaires peuvent accéder.

450 euros la fadette

"Tout le monde peut aller chercher des renseignements sur Internet. Mais pour d'autres, il faut aller les chercher où ils se trouvent, où c'est beaucoup plus fermé : auprès des administrations", confie à Europe 1 un ancien gendarme qui avait monté une entreprise d'intelligence économique et depuis rattrapé par la justice pour pratiques illicites.

Son témoignage ne laisse pas de doute : tout s'achète en matière de renseignement. "J'allais voir mes anciens collègues. Par exemple, une fadette avec tous les appels passés et reçus sur les trois derniers mois coûte 450 euros", assure-t-il.

Les policiers aussi risquent gros

Les officines privées sont légales dans la mesure où elles respectent le cadre défini par la loi. Mais certains franchissent rapidement la ligne jaune. "Un patron de PME avait l'angoisse qu'un de ses chauffeurs n'ayant plus le permis ait un accident avec un de ses poids lourd", ce qui le conduisait régulièrement à vérifier qu'ils étaient bien en règle, explique Bruno Delamotte, patron de Risk&Co, l'une des plus grandes sociétés de conseil en sûreté et en stratégie.

Ce dernier rappelle toutefois qu'il convient au consultant "de dire où se situent les limites" lorsqu'un client passe commande. Mais le besoin d'arrondir ses fins de mois est parfois plus fort.

Si les patrons des officines privées risquent gros avec ces méthodes illégales, les policiers aussi. D'après les chiffres du ministère de l'Intérieur, entre 2003 et 2010, 161 sanctions ont été prononcées, dont 31 révocations, rien que pour des policiers qui avaient illégalement consulté des fichiers.