Primes de Guéant: sur quoi porte l'enquête ?

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Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour soupçons de détournement de fonds publics.

Après l'enquête administrative diligentée par Manuel Valls en mai dernier, c'est au tour du parquet de Paris de se pencher sur les primes en liquide perçues par Claude Guéant. Une enquête préliminaire pour détournement de fonds publics a en effet été ouverte vendredi, après que Manuel ait transmis en début de semaine le rapport d'enquête au procureur de la République de Paris. Le parquet a donc confié l'enquête à la division nationale des investigations  fiscales et financières (DNIFF).

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Les conclusions du rapport d'inspection demandé par Manuel Valls avaient permis de confirmer que de l'argent en liquide avait bien circulé au ministère de l'Intérieur après 2002, et leur abolition théorique. Entre 2002 et 2004, le cabinet du ministre, alors Nicolas Sarkozy, dirigé par Claude Guéant, aurait ainsi touché 10.000 euros par mois de primes, extraites "des frais d'enquête et de surveillance". Ces informations tirées du rapport d'inspection ont donc été transmises par Manuel Valls à la justice qui vient d'ouvrir une enquête pour soupçons de détournement de fonds publics.

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Des factures réglées en liquides. Dans cette affaire, tout commence par une perquisition menée en février au domicile de Claude Guéant. Quelques mois plus tard, début mai, le Canard Enchainé révèle le résultat de ces investigations. Sur un compte de l'ancien ministre de l'Intérieur, les enquêteurs ont d'abord retrouvé la trace d'un versement de plus de 500.000 euros, effectué depuis l'étranger, et datant de 2008. Forcé de s'expliquer, Claude Guéant assure que cet argent provient de la vente de deux tableaux de maître à "un confrère étranger". Sauf que ces toiles en questions sont expertisées… et estimées à une valeur d'environ 15.000 euros chacune.

D'autre part, les policiers trouvent également traces de "nombreux et conséquents paiements de factures en liquide". L'ex-pensionnaire de la place Beauvau assure qu'il s'agit d'achats d'appareils ménagers pour un montant compris entre 20 et 25.000 euros, acquis, explique-t-il, grâce à un pécule constitué avec des primes de cabinet en espèce touchées "jusqu'en 2006". Problème : cette version est mise à mal dès le lendemain.

Une pratique abolie puis rétablie ? "Je suis catégorique, le système des primes en espèce a cessé fin 2001, début 2002", avait alors assuré, au micro d'Europe 1, Daniel Vaillant, ministre de l'Intérieur sous Lionel Jospin jusqu'en 2002. En l'état, le gouvernement Jospin a supprimé ces primes en liquide dès le 1er janvier 2002, après le scandale des fonds secrets. L'actuel maire du 18e arrondissement de Paris s'était alors interrogé sur la possibilité que cette pratique ait pu être rétablie par la suite, sous le second mandat de Jacques Chirac.

Que révèle l'enquête ? Les primes de cabinet ont bien perduré au sein de la place Beauvau, et ce jusqu'en 2004 - malgré leur interdiction en 2002. Une partie des frais d'enquêtes inhérents aux missions spécifiques du ministère a en effet bien été utilisée comme primes de cabinet. Le montant de ces primes ? 10.000 euros mensuels, remis au directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur, soit Claude Guéant. L'enquête révèle donc une pratique illicite et l'opacité des frais de Police. Lors de la publication de l'enquête administrative, l'entourage de Claude Guéant avait relevé que ces sommes ne lui étaient pas destinées, mais utilisées pour un système de "gratifications", notamment pour les policiers en charge de la protection du ministre Sarkozy.