Pourquoi les minarets cristallisent les peurs ?

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Rivalisant avec le clocher des églises, les minarets matérialisent pour certains "la peur de l’envahisseur", selon un sociologue.

"En France, il y a des débats pour savoir jusqu’à quelle hauteur doit aller un minaret, parce que, plus il est visible, plus certains peuvent avoir le sentiment que cette ville, inconsciemment n’est plus une ville chrétienne mais une ville musulmane. Il y a, inconsciemment, cette peur de l’envahisseur", explique, mardi sur Europe 1, Raphaël Liogier, professeur de sociologie à Sciences-Po Aix.

Egalement directeur de l’Observatoire du religieux, il condamne le vote surprise et massif de 57,5% des citoyens suisses qui ont opté dimanche pour l’interdiction des minarets, dans un pays qui compte 400.000 musulmans. "C’est un vote grave", explique-t-il. "En France quand on a débattu sur la suppression de la burqa dans les espaces publics, on l’a fait en rapport aux libertés publiques, aux droits des femmes. Bref, on a pu replacer ce discours en terme de valeurs républicaines. En Suisse, au contraire, il n’y a eu aucune mise en rapport avec les libertés publiques. C’est uniquement le désir de "ne pas voir" les signes d’appartenance à l’islam. Et cela, c’est quand même la première fois", estime-t-il.

"En France, le problématique est plus ambigüe", ajoute le sociologue. "D’un côté, les pouvoirs publics ont la volonté de rendre "visible" l’islam, pour lutter contre l’islam des caves, à travers des mosquées qui sont véritablement des mosquées comme la mosquée de Marseille (voir la maquette en vidéo) ou la grande mosquée de Paris. Et d’un autre côté, il y a une sorte de rejet épidermique de la population. Un rejet de voir des signes, comme les minarets, qui ont l’air d’être contraire à leurs valeurs", assure Raphaël Liogier.