Magistrats : ce polémique "mur des cons"

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Frédéric Frangeul , modifié à
Des portraits épinglés dans un local du Syndicat de la magistrature (SM) suscitent l’indignation.

L’INFO. Le "Mur des cons" du Syndicat de la magistrature, révélé dans une vidéo mise en ligne mardi par le site Atlantico, provoque l'émoi. Ce mur, discrètement filmé par un magistrat "apolitique" invité dans le local du syndicat, présente un patchwork de portraits de personnalités du monde de la politique ou des médias, agrémentés de commentaires plus ou moins délicats. Un "acte de potache" qui soulève de nombreuses réactions négatives.  

La classe politique et médiatique épinglée. Le "Mur des cons" du Syndicat de la magistrature, classé à gauche, épingle de nombreuses personnalités politiques de droite. Figurent ainsi les portraits de Nicolas Sarkozy, Eric Woerth, Nadine Morano, Michèle Alliot-Marie, Patrick Balkany ou Luc Ferry. Le portrait de Brice Hortefeux est, lui, orné d'un auto-collant du Front national et accompagné de la mention "L’homme de Vichy".  Le criminologue Alain Bauer est également épinglé tout comme plusieurs journalistes, tels Béatrice Schönberg, David Pujadas ou l’éditorialiste du Figaro Yves Thréard.  

La vidéo du "Mur des cons" au coeur de la polémique :

Les victimes s’insurgent. Plusieurs victimes de ce "Mur des cons" ont rapidement réagi mercredi sur les réseaux sociaux. Christophe Régnard, le président de l’Union Syndicale des Magistrats a fait part de sa "surprise attristée d'être sur le mur des cons du SM", tout en relevant qu’on est "toujours le con de quelqu’un". "Si c'est vrai, l'indépendance du Syndicat de la Magistrature bat son plein !" , a pour sa part commenté Christian Estrosi, le député-maire de Nice.  

Des réactions outrées.  La réaction la plus virulente est venue de l’Institut pour la justice, classé à droite, qui s’est dit "indigné" par la présence sur ce mur du père d’une des victimes du tueur en série Guy Georges. Pour cette association, cette vidéo illustre "l’intolérance et l’approche profondément idéologique des questions de justice de la part du Syndicat de la Magistrature". L’Institut demande la "dissolution" du SM.

Des menaces de plaintes. De son côté, le syndicat de policiers Synergie officiers, lui aussi classé à droite, se dit "écoeuré par ces pratiques infectes" et "se réserve le droit de porter plainte pour injure publique". Lui aussi présent sur le "mur des cons", Robert Ménard, l'ex-président de Reporters sans Frontières, a fait savoir qu'il avait saisi son avocat pour déposer "une plainte pour injures contre ce syndicat".

philippe bilger

Bilger en colère. Sur son blog, l’ancien avocat général Philippe Bilger a lui aussi désapprouvé avec force l’initiative du SM. "Quelle présomption il faut, pour qualifier ainsi sommairement, brutalement autrui, précisément ciblé, coupable de penser autrement !",  écrit l’ancien magistrat qui a rédigé son billet avant même de s’apercevoir…qu’il figurait lui-même sur le tableau de chasse du SM. Philippe Bilger condamne la légèreté des syndicalistes du SM : "Quelle imprudence intellectuelle et politique, pour un Syndicat déjà gangrené et amoindri par l'idéologie, de manifester ainsi, de manière aussi ostensible, partisane, ses choix, ses préjugés et ses réflexes !".

Un "défouloir" pour le SM. Le syndicat mis en cause s’est défendu par la voix de sa présidente. Pour Françoise Martres, "ce sont des images prises à notre insu dans un lieu privé, notre local syndical, qui n'est pas accessible au public". Pour la présidente du SM, ce mur est un simple "défouloir" et une "action de "potache". "À un moment où le gouvernement de gauche est en difficulté, il n'est pas étonnant qu'un site de droite s'attaque à un syndicat de gauche", a pour sa part estimé Sophie Combes, secrétaire nationale du syndicat, y voyant un "travail de décrédibilisation".

Quelles suites ? La polémique a d’ores et déjà pris un tournant politique. Christian Jacob, le chef des files des députés UMP à l’Assemblée, a demandé mercredi à François Hollande ce qu'il comptait faire après la révélation de l'existence d'un "mur des cons". Jean-François Copé, le président de l'UMP, a lui demandé à Christiane Taubira de "diligenter une enquête" après ce "scandale absolu".

TAUBIRA 23 O4

© CAPTURE ECRAN BFMTV

Interrogé à l'Assemblée lors des questions aux gouvernement, Christiane Taubira a jugé inadmissible que des personnes soient mises en cause individuellement". Pour la Garde des Sceaux, ces personnes "peuvent saisir la justice" et "aucune entrave ne sera faite aux procédures qui seraient conduites", a-t-elle ajouté. Avant de conclure : "c'est un syndicat qui est en cause et non pas le corps de la magistrature".