La hausse du Smic divise

Cette hausse du Smic suscite l'inquiétude des petits patrons.
Cette hausse du Smic suscite l'inquiétude des petits patrons. © MAXPPP
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Fabien Cazeaux avec Charles Carrasco et AFP , modifié à
La hausse, qui devrait être limitée, est annoncée mardi, avant le Conseil des ministres mercredi.

Elle risque de décevoir les attentes de certains salariés. Alors que la hausse promise du Smic sera annoncée mardi pour une application sur la feuille de paie de juillet, le gouvernement a préparé les esprits à une ampleur limitée.

En décidant une revalorisation intermédiaire le 1er juillet, hors du calendrier légal puisque le Smic est revu chaque année le 1er janvier, François Hollande entend "rattraper ce qui n'a pas été accordé" durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Aucun "coup de pouce" au-delà de l'inflation n'a été donné au Smic depuis 2006.

Vendredi, le gouvernement répétait que la hausse serait "raisonnable" et que "les arbitrages n'avaient pas été rendus". Le même jour, Les Echos évoquaient une augmentation de 2%, tandis qu'une des organisations consultées par le gouvernement faisait état d'hypothèse de 2,5%. Concrètement, une hausse d'1% représente 11 euros nets de plus pour un plein temps alors qu’un salarié sur dix environ est payé au salaire minimum soit 1.398 euros bruts et 1.096 nets pour 35 heures.

Une équation délicate

Cette hausse sera annoncée par le ministre du Travail Michel Sapin mardi à la Commission nationale de la négociation collective. Auparavant, le ministre aura rencontré le Comité d'experts sur le Smic, composé de cinq économistes, consulté avant chaque hausse légale. Un décret sera présenté mercredi en Conseil des ministres.

L'équation est délicate pour le gouvernement, appelé à "concilier deux logiques": préserver la compétitivité des entreprises, surtout des PME, où la proportion de smicards est la plus élevée et augmenter le pouvoir d'achat des bas revenus. La ministre des Affaires sociales Marisol Touraine a parlé dimanche d'un "compromis" entre "une période difficile" et la nécessité d'un "signal" en matière de pouvoir d'achat.

"On est en permanence sur la corde raide"

Cette augmentation du Smic suscite l’inquiétude des petits patrons. C’est le cas de Christian Grié qui emploie 40 salariés au sein de son entreprise de déménagement à Mery-sur-Oise, dans le Val-d'Oise où beaucoup de manutentionnaires sont payés au Smic.

"On n’a pas 2% de marges. On peut les donner mais il faut qu’on baisse nos charges d’autant. Je ne vois pas pourquoi je paierais. On me condamne à payer mais moi je n’ai rien fait. Je n’ai rien demandé. On est en permanence sur la corde raide. Si on augmente de 2%, il va falloir trouver  2% d’économies ailleurs", assure Christian Grié au micro d’Europe 1. "Je pense qu’on embauchera plus, ça c’est clair. On va faire des contrats d’été et à la rentrée, on ne gardera personne. Et puis, s’il y a des départs, on ne les remplacera pas. Nous, ça nous fera des économies mais par contre, ça fera des emplois en moins", déplore ce patron d’entreprise. 

"Trop modeste"

A l'inverse, pour la CGT, 2% serait "trop modeste". Force ouvrière (FO) redoute aussi que les salariés ne soient "déçus" si ce "coup de pouce" de juillet ne devait être qu'une avance sur la hausse obligatoire du 1er janvier prochain en fonction de l'inflation.

Le leader du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon a renchéri dimanche sur Europe 1 en jugeant que 2% serait "dérisoire" et même "une erreur". "On aurait dû être à plus de quatre points d'augmentation", a-t-il martelé.

"Le temps de travail"

Mais au-delà du niveau du Smic, deux autres débats sont ouverts, notamment par la CFDT et la CFTC, celui de l'évolution des salaires et du temps partiel. "Le vrai problème, outre le niveau du salaire, c'est le temps de travail", a récemment pointé le secrétaire général de la CFDT François Chérèque. Il plaide pour que les aides aux entreprises bénéficient davantage à celles qui "font un effort pour ne pas laisser, en particulier, les femmes en temps partiel". La CFTC, elle, réclame un débat sur "une politique globale de hausse des revenus" afin de "régler le problème des travailleurs pauvres".

Cette question sera abordée lors de la conférence sociale des 9 et 10 juillet. Le gouvernement réfléchit aussi à modifier les règles de revalorisation du salaire minimum pour l'indexer en partie sur la croissance.