L'air français radioactif

La présence d'iode 131, habituellement absent dans l'air, a été détecté dans le nçord de la France.
La présence d'iode 131, habituellement absent dans l'air, a été détecté dans le nçord de la France. © MAXPPP
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avec Matthieu Charrier et AFP , modifié à
Des traces de radioactivité détectées en France et en Europe. Fukushima est hors de cause.

La quantité a beau être infime et inoffensive, les autorités françaises n’en cherchent pas moins à identifier la source de la radioactivité récemment mesurée dans le nord du pays. L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a été alerté la semaine dernière par son "réseau scientifique" sur des traces d'iode 131 dans l'air de plusieurs pays d'Europe centrale. Il a à son tour lancé une vague d'analyses, dont les premiers résultats montrent de très faibles niveaux de concentration de cet iode radioactif dans la moitié nord de la France.

Une présence "tout à fait inhabituelle" mais "sans aucun risque pour la santé des populations" car ne dépassant pas quelques microBécquerels par mètre cube, a rassuré mardi l'Institut. Qui s'est malgré tout immédiatement lancé sur la piste de ces rejets anormaux pour remonter à leur source.

La piste Fukushima "exclue"

Pour l’heure, l’IRSN a plusieurs certitudes : d’abord, l’iode incriminé ne provient pas de la centrale de Fukushima, dévasté par un tsunami en mars dernier. L'iode 131 a une durée de vie très courte - sa radioactivité diminue de moitié tous les huit jours - et l'événement est "trop ancien et trop lointain", a expliqué Didier Champion, directeur de l'environnement et de l'intervention à l'IRSN. "Par ailleurs, on a regardé les trajectoires de l'air et ça aurait dû être détecté en Amérique du Nord si ça s'était produit au Japon, donc cette piste est exclue aujourd'hui", ajoute-t-il.

Autre certitude : "l’iode ne provient pas de France, parce que les détections en France sont plus tardives que celles venant d’Europe centrale", précise Didier Champion, joint par Europe 1. "Donc on pense que c’est quelque chose qui vient de loi, probablement d’Europe centrale ou d’Europe de l’Est."

C’est l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) qui a lancé le 11 novembre l’alerte et les investigations, lorsqu’elle a détecté de la présence d'iode 131 dans l'atmosphère en République tchèque, avant l'annonce par des pays voisins, tels que la Pologne, l’Autriche ou la Slovaquie notamment, ayant constaté la même contamination au-dessus de leur territoire.

"En remontant dans le temps…"

"L'idéal, c'est que le pays où s'est produit le rejet déclare l'événement, notamment à l'AIEA, ce qui, à ma connaissance, n'a pas été fait", reprend Didier Champion. Si le coupable ne se dénonce pas, il faudrait alors que tous les pays ayant observé cet épisode de contamination publient leurs résultats pour les mettre en commun et retracer ainsi le parcours des masses d'air polluées. Car "en remontant dans le temps", les scientifiques peuvent déterminer les territoires traversés par cet air radioactif et "voir si des activités nucléaires se situent sous ces trajectoires", explique Didier Champion.

Selon le directeur général de l’IRSN, "habituellement, on ne voit pas d’iode 131 dans l’air. Donc ça traduit probablement un rejet accidentel provenant soit d’un réacteur nucléaire, soit de fabrication d’iode radioactif à usage médical." Enfin, conclut Didier Champion, "on ne peut pas non plus exclure un rejet de type malveillant" même si "ce n'est pas la voie la plus probable", assure-t-il.